alade vers les étangs et l'Oise

par Guy Friadt (2002-2003)

 

Aujourd'hui, nous irons nous promener jusqu'au bord de la rivière Oise et, si le cœur vous en dit, nous pousserons jusqu'au pont de "SAMAIN" en direction de Ribécourt.

 

 

 

Nous quittons la rue de Compiègne qui traverse le village du Nord au Sud pour prendre la direction de l'Ouest par la rue des Etangs.

 

 

Rue des Etangs

 

 

Cette rue, autrefois nommée rue d'Enfer, puis vers 1900 rue de la Fabrique, faisant référence en cela à la fabrique de balles à jouer de la famille BERNARD, est de nos jours la rue des Etangs.

Pour nombre de St Giotains, elle portait jusqu'à la fin de l'exploitation des glaisières vers 1980 le surnom de route de la Glaise, à cause des incessants allers et retours des camions qui transportaient l'argile des exploitations vers la briqueterie SAMAIN de Ribécourt.

Cette rue a vu se bâtir depuis une vingtaine d'années de nombreux nouveaux pavillons comme en témoigne ces deux vues :

La première, prise en 1963, nous montre encore une pâture au bout de laquelle se trouvait pendant la seconde guerre mondiale un camp de prisonniers marocains employés dans les dépôts de munitions de la forêt de Laigue :

 

 

la rue des Etangs en 1963

 

 

La seconde, prise en 2002, nous montre les nouvelles constructions et les trottoirs. Au fond, l'imposante bâtisse en brique et pierre de taille, aujourd'hui occupée par des logements, était la fabrique de balles à jouer BERNARD :

 

 

 

 

En passant devant l'ancienne fabrique de balles à jouer BERNARD, on remarque la date de construction de l'établissement : 1896. La fabrique disparaîtra pendant la première guerre mondiale avec la mort au champ d'honneur en 1915 des 2 fils de Restide-Léger (dit Aristide) BERNARD, propriétaire de la fabrique. La fabrique occupait les 2 bâtiments en brique avec parement en pierre de taille qu'il avait fait construire, et qui se trouvent de chaque côté de la rue.

 

 

 

 

 

 

 

 

Rue des Etangs
l'entrée de l'ancienne fabrique de balles à jouer (inscription 1896)

 

 

 

Nous sommes arrivés à la sortie de St Léger. Nous avons laissé sur la gauche la rue des Demoiselles et nous voici arrivés au carrefour dit "de la première croix", à cause du calvaire qui s'y dresse.

 

 

 

Nous laisserons sur la gauche le chemin de Taillepied qui conduisait autrefois à un écart où se trouvait une ferme isolée entre St Léger et Montmacq. La ferme de Taillepied fut tenue par la famille FRANÇOIS en 1728 (aujourd'hui disparue).

 

 

Nous prenons sur la droite la direction de la rivière. Les terres de l'ancienne ferme de Taillepied ont pour l'essentiel disparu par le creusement des glaisières qui ont laissé place aujourd'hui aux étangs.

La route laisse sur le côté le pré Lambert et le pré Lannoy et atteint la seconde croix.

 

 

Nous dirigeant vers la seconde croix, un regard en arrière nous permet d'observer les dernières constructions de pavillons qui gagnent le long de la route, sous l'œil malicieux des dernières vaches du village.

 

 

 

 

Nous sommes arrivés à la seconde croix, qui se trouve sur le bord du chemin et surplombe un méandre de la rivière Oise.

Autrefois, un vieux calvaire s'abritait sous un immense tilleul, mais cet arbre remarquable a été déraciné au cours d'une tempête vers 1976, emportant avec lui le calvaire. Aujourd'hui, au même endroit, un habitant de St Léger a érigé une croix sur un socle monumental en forme de cœur.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

photo prise en 1957

 

 

 

 

 

 

 

 

En hiver, lors des crues de l'Oise, l'eau monte de plusieurs mètres ici et recouvre pâturages et champs jusqu'à se rapprocher à quelques dizaines de mètres de la croix.

C'est aussi depuis peu l'aboutissement du réseau de tout à l'égout de la commune et l'emplacement de la station d'épuration.

 

A partir de là, le chemin est beaucoup moins praticable. Nous allons arriver aux différents étangs.

Sur notre gauche, voici d'abord l'étang bleu, ainsi nommé à cause de sa belle couleur sous le soleil !
Cet étang, fort profond, résulte de l'exploitation de la glaise pour la briqueterie de Ribécourt SAMAIN qui pendant des décennies a fait ici un chantier réellement impressionnant avec sa grosse machine d'extraction à godets et son réseau de wagonnets tirés par un tracteur.
Le réseau de rail conduisait par la forêt via le pont suspendu construit sur l'Oise par les Allemands pendant la guerre 1914-1918 directement jusqu'à la fabrique.

L'eau des étangs est de bonne qualité et la superficie du plus grand étang permit dans les années 1970 l'installation d'un centre d'accueil et de loisirs qui proposait aux jeunes l'initiation à la voile et à l'équitation. En fait un vrai terrain d'aventures pendant des années pour la jeunesse des environs... jusqu'à la vente à différents comités d'entreprises de tous les étangs dans les années 1990.

Un projet d'aménagement d'une véritable base de loisirs a bien existé ici, mais n'a jamais vu le jour.

 

 

L'étang bleu

 

 

Nous pénétrons maintenant dans la forêt en suivant le chemin emprunté autrefois par les wagonnets. Plusieurs petits étangs, devenus donc la propriété de comités d'entreprises, sont aujourd'hui clôturés. On remarque toujours la couleur de l'eau, fort bleue malgré les remblais industriels qui ont été pratiqués pendant longtemps dans certaines anciennes exploitations de glaise.
En effet, la fabrication de tuiles et de briques date de fort longtemps à St Léger : les registres paroissiaux du 18e siècle font déjà état de tuiliers, ces derniers travaillant à remplacer progressivement les couvertures en toit de chaume des habitations.

 

 

L'étang "Jébleu"

 

Nous arrivons à l'étang dit "Jébleu" (orthographe incertaine), du nom de famille d'un garde qui surveillait l'exploitation de glaise et résidait sur place dans une petite maison aujourd'hui devenu, vous le voyez, un simple abri.

 

 

 

 

Dans ces étangs sans surveillance, après la fermeture de l'exploitation, venaient aux beaux jours nombre de personnes des environs profiter de la baignade et du pique-nique à l'ombre des grands arbres, occasionnant à cette période une circulation de voitures importante.

Aujourd'hui, seul les pêcheurs occupent les bords de l'Oise, taquinant le gardon, la perche et autres fritures, et même, pour les plus expérimentés, le brochet.

 

 

 

 

Toujours en suivant le chemin surélevé emprunté autrefois par les wagonnets, et ainsi préservé des petites crues de la rivière, nous arrivons au pont dit "de SAMAIN".

Cet ouvrage audacieux en lisière de la forêt de Laigue enjambe l'Oise entre deux méandres.
C'est en fait un pont suspendu construit par Hilaire SAMAIN, le directeur de la briqueterie qui en fut pendant longtemps la principale utilisatrice et assura son entretien.
Sur des élévations en béton armé reposent de gros câbles auxquels est suspendu le tablier du pont.

 

 

 

 

Le front à l'époque, longtemps stabilisé juste au nord de St Léger aux Bois à Bailly, se prolongeait sur Ribécourt.
D'âpres combats ont eu lieu dans ces villages pour l'essentiel totalement détruits et l'obstacle naturel de la rivière Oise rendait la position stratégique. Aussi ce pont permettait-il sans doute de rompre l'isolement de certaines premières lignes.

Pour en savoir plus, lien vers les pages du site du Conseil Général de l'Oise sur la guerre de 14-18

 

 

La structure métallique du tablier était garnie de poutres épaisses.

On remarque encore la voie étroite du réseau des wagonnets.

 

 

Aujourd'hui, malgré une restauration faite il y quelques années par la société de chasse à courre, toute la garniture en bois a disparu et c'est un spectacle désolant qui s'offre aux promeneurs.
Dans cette végétation qui prend des allures de jungle, l'imaginaire nous entraîne vers des aventures tropicales où pendent les restes d'un pont, bien pratique il y a encore quelques années, avant l'ère de l'automobile, pour se rendre à la gare et dans les commerces de Ribécourt.

 

 

 

 

La sécurité du franchissement n'existe plus aujourd'hui, et l'avenir de ce pont est fortement compromis. Il figure toujours sur les cartes d'état major comme un élément stratégique d'une autre époque.

C'est un peu en amont que sous une pluie battante, en 1876, Robert Louis STEVENSON, futur auteur de "L'Ile au Trésor", tira son canoë sur la rive droite pour gagner Pimprez où il déjeuna en attendant la fin de la pluie. (voir plus bas)

Sous le pont coule toujours l'Oise.
En cet été 2002, le niveau n'a que bien peu baissé et les crues de l'hiver sont loin. Le silence règne, parfois troublé par le chant des oiseaux et les sauts des poissons.

 

 

l'Oise

 

 

Cet endroit, aujourd'hui quasiment oublié, était pourtant jadis le lieu d'une importante activité, la rivière étant un important axe de communication. On connaissait, un peu plus en amont sur le territoire de la commune, à Flandre, un port qui employait de nombreux habitants et générait des revenus.
Sur la rivière travaillait au 18e siècle Louis MOGNOL, "pescheur de poisson" de son état.
On pouvait aussi à l'occasion y voir passer les flotteurs de bois.

Sur le chemin du retour, mon regard est attiré par une traverse en tôle, vestige de la voie ferrée étroite qui guidait les wagonnets de glaise.

 

 

la voie des wagonnets

 

 

 

Bientôt, faute de passage, la forêt aura totalement repris ses droits.
J'espère avoir contribué à maintenir le souvenir de ces lieux.

 

Avis de recherche
Je recherche une carte postale ancienne avec le pont intact, et tous les témoignages et documents portant sur l'exploitation de la glaise à cet endroit me seraient précieux.
guy.friadt@wanadoo.fr ou

 

 

 

Robert Louis Stevenson, en canoë sur l'Oise,
fait halte à Pimprez (1876)


Stevenson en 1879 par P. S. Krøyer

 

Robert Lewis Stevenson (novembre 1850 - décembre 1894) est célèbre aujourd'hui encore pour des livres tels que "L'Ile au Trésor" (1881) et "Dr. Jekyll et M. Hyde" (1886). Son premier livre, plus méconnu, est "Un voyage intérieur" et relate un voyage en canoë.

En septembre 1876, Robert Louis Stevenson, accompagné de son ami Lord Walter Simpson, va parcourir les canaux depuis Anvers jusqu'à Compiègne en canoë, puis il continuera vers Pontoise. Pour mener à bien leur aventure, ils vont sillonner successivement l'Escaut, le Rupel et le canal Willebroek-Bruxelles. Bruxelles-Maubeuge étant encombré de 55 écluses, ils vont couvrir cette distance par le train. En étant descendus, ils vont repartir sur l'eau en empruntant tour à tour la Sambre, le canal de Sambre à l'Oise et enfin l'Oise, ce qui les amènera près de Pontoise.

Qu'il y a-t-il de mieux dans la vie que la canotage ? "Car se trouvera-t-il quelqu'un qui ose me soutenir que traiter des affaires est plus intéressant que s'emballer pour le canotage ? Il faudrait n'avoir jamais vu une barque, ou n'avoir jamais vu un bureau, pour parler ainsi. Et, bien sûr, l'un vaut mieux que l'autre pour la santé. Rien ne devrait être la véritable occupation d'un homme comme son amusement."

Au début du voyage, tout n'est pas si simple. Le premier essai du canoë à voile au milieu du fleuve ne se passe pas sans appréhension. "Qu'arriverait-il au premier vent gonflant ma petite voile ? J'imagine qu'il était quasiment aussi aventureux d'aborder ainsi l'inconnu que de publier un livre ou de prendre femme."
Les comparaisons sont hardies ! mais finalement tout se passera bien. Et le spectacle est à la hauteur du voyageur et de son inspiration. Par exemple, lorsqu'il croise une péniche tirée par un cheval qui "marche d'un pas tranquille comme si nulle autre affaire n'existait au monde et l'homme rêveur au gouvernail voit le même clocher sur l'horizon, une journée entière."
On voit que ça ne va pas trop vite. D'ailleurs, la vue des péniches rend Stevenson méditatif : "Il devrait y avoir beaucoup de gens satisfaits à bord des bateaux, car mener pareille vie c'est à la fois voyager et rester chez soi."

Ce récit contient de très belles annotations sur les paysages qui, vus d'un canoë, présentent une autre perspective : "Les haies très hautes s'enlianaient autour des troncs d'ormeaux alignés et les champs, la plupart du temps de peu de superficie, ressemblaient à des rangées de berceaux au long de la rivière."

Ce voyage est également l'occasion de rencontres, et les chapitres de ce livre sont souvent prétextes à digressions sur la société, ses mœurs, son comportement, sa morale. Avec parfois un humour assez dévastateur. Nos amis belges apprécieront... "Boom n'est pas un endroit agréable et n'est remarquable que sur un point : la plupart des habitants y sont convaincus qu'ils savent parler anglais, ce qui, en fait, n'est pas démontré."
Ou encore : "Le menu, comme d'habitude en Belgique, était de nature imprécise."

Récit de voyage autant que document sur les us du XIXe siècle, donc récit vivant, poétique, bucolique, mais aussi plein de réflexions sur la vie, la nature, la paresse, le voyage.

Ayant dépassé Noyon, ils poursuivent la descente sur la rivière sous une pluie battante, et Stevenson écrira : "Je ne me rappelle rien du voyage ; ce n'était rien que des rives argileuses, des saules, et de la pluie, de la pluie incessante, battante, jusqu'à ce que nous ayons cessé de déjeuner dans une petite auberge à Pimprez, où le canal est très près de la rivière".

Si ce voyage laisse une grande liberté d'imagination à l'auteur, cela n'occulte pas pour autant le paysage dont il donne de larges descriptions dans ce "Voyage intérieur", récit paru en 1877, dans lequel il rend compte de cette excursion. Cette aventure est aussi connue sous le titre : "Voyage sur les canaux et les rivières du Nord de la France et de la Belgique".

Né à Édimbourg (Ecosse) le 13 novembre 1850, Stevenson quitte en 1876 la maison paternelle et séjourne à Londres chez un ami. Il retourne en France, et descend la Sambre et l'Oise en canoë avec Walter Simpson. En août, à Grez, un village au sud-est de Paris, près de Barbizon et de Fontainebleau, il fait la connaissance de Fanny Osbourne (1837-1911), artiste américaine séparée de son mari. La rencontre avec sa future épouse, Fanny, devait changer le reste de sa vie. Lui a vingt-cinq ans, elle beaucoup plus. Elle obtiendra le divorce en 1880 et se mariera avec Stevenson.

Les oeuvres les plus connues de Stevenson restent "L'île au Trésor" (1881), "Docteur Jekyll et Mister Hyde" (1886) et "Le maître de Ballantrae" (1889).
Il décède d'une crise d'apoplexie le 3 décembre 1894, à 44 ans, dans l'Archipel des Samoa où il vit avec Fanny, au milieu de ses amis indigènes qui le surnomment "tusitala" : "l'homme qui raconte de belles histoires". Il sera enterré, comme il le souhaitait, au sommet du Mont Vaea, face à la mer.
Sur sa tombe sont gravés les vers de son "Requiem" composé à Hyères dix ans plus tôt.

 

Guy Friadt, janvier 2003

 

 

Guy a photographié St Léger en 2002

rencontre avec Edouard Muszynski : la glaise

2008 - nouvelles vues du village

2014 - les photos de Henri

 

erci de fermer l'agrandissement sinon.

 

 

 

https://www.stleger.info