les ruyères de aint-éger

 

  

Le texte ci-dessous provient du bulletin municipal n°6 de St Léger de Rôtes, daté de 1984 :

ette histoire, vieille d'un siècle et demi, fit couler beaucoup d'encre et souleva bien des passions. Mais qu'était-ce, ces bruyères ?

Des terrains communaux communs à St Léger du Boscdel, Camfleur, Courcelles (réunis maintenant à Fontaine l'Abbé) et les Mollands, hameau dépendant de Rostes.

 

 

Les bruyères furent partagées sur ordonnance du roi Louis XVIII et par transaction selon le nombre de feux concernés dans chaque commune. L'acte notarié le 3 juillet 1824 fut signé par Charles Brunel maire de Courcelles-Camfleur, Pierre-Louis Ecalard maire de Rostes, et Louis Massiel maire de St Léger du Boscdel. Cet acte mit fin à des litiges datant de 1541 et relativement réglés par des sentences rendues au bailliage d'Orbec et en 1602 devant les tabellions de Serquigny.

De temps immémorial, les habitants desdits lieux avaient droit de pâture sur ces bruyères. Ils y récoltaient les bruyères, fougères et joncs marins, faisaient le bois de chauffage et tiraient sable, argile et cailloux pour construire leurs habitats. Sans doute ils y chassaient et braconnaient à l'occasion.

C'étaient pour la plupart des terrains pauvres situés à l'est et en lisière de la forêt. Certains des hameaux existant à l'heure actuelle ont gardé ce nom.

 

 

 

A cette époque, St Léger était bien différent de ce qu'il est aujourd'hui. Quelques petites fermes de quelques hectares, 2 ou 3 chevaux, suffisaient au travail des champs. Par contre, la grosse masse de la population était constituée de journaliers vivant sur quelques ares de terre avec une ou deux vaches, moutons, chèvres... Pendant les gros travaux saisonniers, fenaison, moisson, ils se louaient à la journée, d'où le nom de journaliers. D'autres, tailleurs, tisserands, forgerons, menuisiers, sabotiers... travaillaient à domicile de façon artisanale.

En ce début du 19e siècle, les choses avaient changé. La Révolution et l'Empire avaient amené des idées nouvelles. Il y avait pour certains le désenchantement de se retrouver sous la restauration de la monarchie. Le 16 septembre 1833, Louis Massiel, maire de St Léger du Boscdel, domicilié à la Trassinière, avec l'approbation du conseil municipal composé de MM. Oursel, Carpentier, Fleurent, Chéron, Rousselin, Mercier et Toufflet, publie un arrêté concernant le partage et la vente par lots des bruyères dans le but de financer une maison d'école et le traitement d'un instituteur.

Bien que tout le monde soit d'accord sur le principe de l'instruction des enfants de la commune, la colère gronde dans les chaumières. Pour les plus démunis, la misère va augmenter, c'est plus de 25 hectares de terrain qui leur sont retirés pour être vendus. Beaucoup de pauvres gens n'ont pas les moyens d'acheter et de mettre en valeur les parcelles de terrain.

Le commissaire enquêteur, Vivant Cardin, maire de Valailles, nommé par le sous-préfet, se heurte à la grogne générale. Les pauvres ont le soutien du châtelain local, Louis Chrestien, Chevalier de Fumechon, le plus riche propriétaire de la commune et le plus imposé. Il est contre le projet et déclare : "Il est plus avantageux pour les habitants pauvres ayant feu et lieu de conserver le parcours de la dite commune, que d'en avoir une part dont ils ne pourront tirer aucun avantage que de payer plus que la part ne vaudrait." Des conseillers municipaux rejoignent cet avis, MM. Carpentier et Fleurent. D'innombrables pétitions circulent alors dans la commune et sont adressées au sous-préfet, chacun voyant ses intérêts personnels ou ceux de la communauté. Des propositions sont faites, ainsi par exemple "imposer les habitants selon leur richesse pour subvenir aux besoins de l'école" (proposition de M. de Fumechon).

Toutes ces démêlées devaient se prolonger jusqu'en 1846 où les fameuses bruyères, contenant 25 ha 63 a et 67 ca, furent vendues par lots (en moyenne 20 a par lot) par ordonnance du roi Louis Philippe, le 9 mars 1846, sur requête de Juste Oursel, maire de St Léger du Boscdel, en date des 6 janvier et 23 février 1845.

 

bulletin des lois - juillet 1846

 

La recette dégagée par cette vente devait servir à différents travaux :

  • 1° - réparation à faire à l'église : 1 097 F
  • 2° - construction d'une tour et d'un clocher pour la même église : 3 987 F
  • 3° - la construction d'une sacristie : 1 017 F
  • 4° - construction d'une maison d'école : 5 600 F
  • Total : 11 701 F

Ainsi se termina cette vieille histoire des bruyères. Quelques habitants de la commune ont des ancêtres qui en furent les acteurs. Citons Etienne et Martin Picquenot, Masselin, Charles Ecalard, Louis Fleurant, Louvet, Georges Amiot, Pierre-Louis Paisant, François Véron, Jacques Beaumesnil, Motte, Duval, Lemagnant, Albert Duname, A. Guillolot, Pierre Houard, C. Meton, Vve Quigis.

Ces quelques noms pris au hasard rappelleront peut-être des souvenirs aux anciens de la commune, des noms qui restent gravés sur quelques vieilles pierres de notre cimetière.

 

 

cahier des plaintes et doléances - 1789
l'abbé Pétel, prêtre réfractaire - 1792

 

 

 erci de fermer l'grandissement sinon.

 

 

 

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