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Nous voici dans la
grand-pièce-cuisine-séjour-salon, devant un verre de
vin de la vigne voisine. Titrant sept degrés au maximum, il
aurait défié les alcootests s'ils avaient existé
! Mais il aurait aussi défié les teinturiers et leurs
composés éthyléniques nique nique, car les
taches étaient violettes et bio ! Après une conversation nourrie
des évènements familiaux, des conditions de mon
métier, de la santé des uns et des autres et des
aléas de la récolte du potager, je le sens distrait et
songeur : Telles étaient les habitudes
et coutumes. Les visiteurs ne repartaient pas les mains vides,
c'était le remerciement de la visite effectuée. - Mais, Georges, je suis venu pour
te voir, et le plaisir est entier, même si je n'emporte
rien. Et tout d'un coup, réaction
vive du bonhomme ! Son discours et son attitude sont
nets, malgré le bon sourire emperlant son visage, et
côté "Mystère, y es-tu ?", pas la peine de
discuter, le mieux est d'exécuter. Au troisième pas, un coup de
fusil me cloue, je n'ai même pas le réflexe de me jeter
par terre, et j'entends une voix : Je le regarde arriver, l'air
bête, avec l'envie de me pincer et essayant de recompter les
trois petits verres de vin rouge bus un quart d'heure plus tôt.
Mais non, je ne suis pas saoul, et Georges rigole franchement de
l'effet produit : Savez vous que je suis rentré
ce soir-là, vraiment heureux, avec mon lapin ? vécu aux
Chaumes d'Abzac, en juin 1974 Merci,
Jay
- Content de te voir, moun piti, c'est gentil de me rendre
visite.
- Ma tournée du jour s'est terminée plus tôt, et
j'en profite pour venir.
- Viens donc te rafraîchir et me raconter les nouvelles
!
- On dirait que tu es préoccupé ?
- Ah oui ! Je vais te dire, je ne sais pas quoi te donner à
emporter !
Il va falloir que j'en parle aux syndicats des commerçants,
ils vont bien trouver moyen d'en tirer profit. Non ? Il vaut mieux
laisser tomber ? Bon, d'accord.
- C'est vrai, mais ça m'embête, et j'ai beau chercher,
je ne trouve pas.
- Ne t'inquiète pas de ça, je reviendrai te voir quand
même.
- Je sais ce que je vais te donner !
- Encore une fois, Georges, ne te donne pas de peine.
- Tu as encore un quart d'heure ?
- Oui, je n'ai pas de rendez-vous en vue.
- Alors, écoute-moi bien, tu vas faire ce que je te dis, tu me
poseras des questions plus tard. Tu vas remonter le chemin par lequel
tu es venu, en marchant jusqu'à la grande haie que tu verras
sur ta droite, à environ 150 mètres. Là, tu
tourneras à droite et tu t'engageras dans le sentier, jusqu'au
trou dans le buisson que tu vois par cette fenêtre. Et
là, tu t'arrêteras de manière que je t'apercoive
d'ici, et tu ne bougeras plus avant que je te crie : "Avance" !
Donc je remonte le chemin avec un lourd paquet de questions me
chatouillant le cervelet. Ah, la haie, à droite, jusqu'au
trou. Il est là, j'avance d'un petit pas pour être
visible, et j'ai l'impression que la trotteuse de ma montre
dépose un préavis de grève !
A peine le temps de me dire que je fais un beau couillon dans la
nature que j'entends : "Avance" ! Ce que je fais.
- N'aie pas peur ! Tout va bien !
Alors je me tourne pour apercevoir le cousin courant vers moi avec un
fusil dans la main droite et un lapin de garenne dans la
gauche.
- Sans le savoir, tu as fait le rabatteur !
- Le rabatteur ?
- Eh oui, voilà plusieurs jours que je le voyais de ma
fenêtre rôder dans le secteur, ce lapin, et j'ai fini par
repérer son gîte !
- Mais... et le fusil ? Tu ne l'avais pas en sortant !
- Tu vois cet arbre ?
- Bien sûr.
- Il est creux en partie, c'est là que je cache le fusil
!