Au
mois de mai 1925 ont lieu partout en France les élections
municipales.
A Saint-Léger-de-Balson, le maire sortant, Pierre
Lespès, présente une liste où figure la
moitié des conseillers sortants.
Il y a 10 noms sur cette liste car en 1925 le conseil municipal
était constitué de 10 membres (contre 11 actuellement).
Par ailleurs, il n'y avait qu'un seul adjoint de mairie. Ils se
présentent sous l'étiquette de "la liste
Républicaine et Socialiste".
Il y a également un candidat qui se présente seul sous
l'étiquette "socialiste". Il s'appelle Armand
Goupillot.
bulletins de vote de la
liste du maire sortant et d'Armand Goupillot
source : archives départementales de la Gironde
Le premier tour des
élections à lieu le 3 mai. Il y a 124 électeurs
inscrits, parmi lesquels 113 se présenteront au bureau de
vote.
Armand Goupillot recueille le plus grand nombre de voix (86) ; le
suivant sur la liste n'en recueille que 67. Le maire sortant est
réélu conseiller de justesse avec 56 voix.
Au total, 9 candidats passent la barre des 50% dont 8 figuraient sur
la liste de Pierre Lespès. Il faut donc procéder
à un second tour qui a lieu une semaine plus tard.
Un nombre important d'électeurs se présente (102) et au
terme du scrutin un candidat "indépendant", Marc
Castets, est élu.
L'élection du maire et
de son adjoint a lieu le 17 mai. Il serait logique de penser que ces
deux fonctions seraient attribuées à des conseillers
issus de la liste du maire sortant. Il n'en sera rien car, contre
toute attente, Armand Goupillot est élu maire (par 6 voix
contre 4) et Marc Castets premier adjoint. Il est difficile
d'imaginer que ce résultat a pu être atteint sans qu'il
y ait des dissensions parmi les "amis" de Pierre Lespès. Ce
qui va suivre en est peut-être l'illustration.
es
premiers roblèmes
|
En effet, à la sortie de
ce conseil municipal, le conseiller Jean Duprat rentre chez lui et
rédige une lettre de démission. Dans les deux jours qui
suivent, deux autres conseillers, Pierre Lalanne et Louis Pailley,
démissionnent également. Tous trois évoquent
des "raisons personnelles".
Le préfet de Gironde en
est informé par le sous-préfet de Bazas qui
précise que, suite à des renseignements procurés
par M. Callen, Conseiller Général, "il
résulte qu'à la suite de divers dissentiments ces trois
conseillers se refusent absolument à collaborer avec le
nouveau maire. Il est nécessaire de procéder à
une élection complémentaire dont la date est
fixée au 28 juin 1925".
Pour ce troisième
scrutin en moins de deux mois, Il y aura 86 votants qui vont
élire Arnaud Lacape, Jean Bonpan et Etienne Dupouy comme
conseillers municipaux.
Dans une lettre du 4 juillet le
sous-préfet informe le préfet de Gironde que les
nouveaux conseillers doivent être classés comme
socialistes S.F.I.O. (Section Française de l'Internationale
Ouvrière).
n
maire ommuniste
|
Deux jours plus tard, le 6
juillet 1925, le Commissaire Spécial (Commissariat
Spécial de Bordeaux) fait parvenir au préfet un rapport
qui signale qu'Armand Goupillot, maire S.F.I.O. de Saint Léger
de Balson, vient d'adhérer au parti communiste. Ce
Commissariat Spécial dépendait directement du
Ministère de l'Intérieur et pourrait être
comparé à ce qui s'appellerait quelques années
plus tard les Renseignements Généraux.
A partir de ce moment Armand
Goupillot est désigné comme "maire communiste"
dans les documents de la préfecture et sous-préfecture.
L'Humanité - 7 juillet
1925
'appel
au ecours
|
Les archives disponibles
n'indiquent rien de particulier à son sujet jusqu'à la
fin de l'année 1926. A cette époque, il semble devoir
faire face à de sérieuses difficultés
matérielles (les maires des petites communes ne percevaient
pas d'indemnités) et il va entreprendre une démarche
étonnante. En effet, il va rédiger une lettre de
demande d'aide dont il enverra une copie au sénateur et aux
parlementaires de Gironde, au préfet de Gironde, au
président du Sénat, au président du Conseil et
au président de la République !
Le texte de cette lettre
reflète le vocabulaire et les tournures de phrase de
l'époque mais également une certaine
obséquiosité que d'aucuns pourraient attribuer au
caractère désespéré de sa situation
:
Monsieur le
Président,
Par suite de circonstances
indépendantes de ma volonté, je viens de tomber dans un
état voisin de la misère.
Mes amis, parmi lesquels les
notabilités de mon canton, conseiller général
etc., ainsi que mes concitoyens, ont appuyé le principe d'une
souscription en ma faveur pour m'aider à parfaire à mon
relèvement et permettre d'assurer mon existence et celle de ma
famille.
C'est dans ces conditions
que, honteux et respectueux, je viens solliciter votre obole qui, si
minime soit elle, ajoutée aux autres, me sera d'un
précieux concours dans ma pénible situation
présente.
Confiant dans votre bon
cur, et votre générosité, je vous
présente, Monsieur le Président de la
République, avec mes plus vifs remerciements, le respectueux
hommage des sentiments attristés et dévoués de
votre serviteur.
Votre serviteur.
Le maire.
lettre envoyée au
Président de la République Paul Doumergue
source : archives départementales de la Gironde - pour un
agrandissement, cliquez sur l'image
enveloppe qui contenait la
lettre mentionnée ci-dessus - source : archives
départementales de la Gironde
a
réaction des utorités
|
Ces lettres ne sont pas
datées mais le préfet de Gironde reçoit une
lettre de demande d'information de la part du chef de cabinet du
président du conseil en date du 16 décembre 1925. Les
autres institutions contactées réagiront de la
même manière dans les jours qui suivent. Le
préfet répondra à toutes ces demandes par une
même lettre où il indique que :
"J'ai l'honneur de vous
faire connaître que M. Goupillot était, avant son
élection sur la liste du bloc ouvrier et paysan,
régisseur d'un domaine agricole assez important. En raison de
son attitude pendant la période électorale, les
propriétaires qui l'employaient renoncèrent à
ses services après les élections de
1925".
"Je suis personnellement
d'avis de ne donner, dans l'état actuel des choses, aucune
suite à cette étonnante requête. Tout au plus, si
M. Goupillot donnait sa démission de maire et de conseiller
municipal, pourrais-je lui allouer une somme sur les fonds mis
à ma disposition par le conseil général ; encore
faudrait-il pour cela que l'enquête à laquelle il serait
alors procédé révèle une situation
vraiment nécessiteuse".
La liste du bloc ouvrier et
paysan était une émanation du parti communiste.
Cependant, à l'examen des documents d'archives disponibles, il
est impossible d'affirmer qu'Armand Goupillot avait fait campagne
sous cette étiquette. Le bulletin de vote dont la copie est
présentée plus haut est la preuve du contraire.
pilogue
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Au cours du mois d'avril 1927,
Armand Goupillot informe le préfet qu'il mettra un terme
à ses fonctions de maire et de conseiller municipal le 30
avril et que cette charge sera assurée par le premier adjoint
à dater du premier mai.
Le 22 mai, des élections
ont lieu pour élire un nouveau conseiller municipal. Sur 118
inscrits, 80 électeurs se présenteront aux urnes. Jean
Darteyre est élu haut la main.
Une semaine plus tard, le
conseil municipal se réunit et élit M. Castets comme
maire et Pierre Gilles comme premier adjoint.
Il reste des zones d'ombre qui
ne permettent pas de connaître le fin mot de cette affaire.
Armand Goupillot est lui-même quelque peu une énigme.
Il a séjourné
relativement peu de temps à Saint-Léger-de-Balson. Son
nom apparaît dans le recensement d'avril 1926. Il habite au
lieu-dit Le Gay et est né à Paris en 1883. Il se
déclare "sans profession". Les archives départementales
possèdent un document avec la liste des conseillers municipaux
et qui le décrit comme "cultivateur".
On comprend pourquoi ce
"Parisien" est dans la région quand on découvre qu'il a
une épouse prénommée Maria et qui est originaire
de Narosse, commune voisine de la ville de Dax, département
des Landes.
Son nom n'apparaît pas
dans les recensements de 1921 et 1931. Il est absent des listes
électorales de 1929. On peut donc conclure que, tout au plus,
il était présent à Saint-Léger-de-Balson
de 1922 à 1928.
On ignore également s'il
a reçu ou non une aide financière de la
préfecture à la suite de sa
démission.
le puits du
bourg
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Merci de fermer l'grandissement
sinon.
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