le seigneur de la
Bussière, le curé de St Léger |
Le baron de la Bussière se
plaignait souvent au curé de St Léger de cette
situation, particulièrement des usurpations qui avaient lieu
à son égard. Mais le curé ne manquait pas de
trouver des excuses et même des justifications à ses
paroissiens. S'ils se plaçaient à l'église non
loin de l'autel, ou dans les processions tout près du
clergé, c'était, disait-il, parce qu'il s'agissait de
chanteurs qui chantaient très bien les chants liturgiques et
qui, par là, étaient très utiles dans les
cérémonies. Le curé promettait bien d'arranger
les choses, mais il n'y avait jamais rien de
changé
assé,
le seigneur se persuada que le curé, loin de rechercher
véritablement l'apaisement, montait la tête contre lui
des paysans. Il résolut de faire un exemple terrible.
Il manda auprès de lui le
curé et, n'ayant une fois de plus obtenu que des explications
insuffisantes, il finit par lui dire : " Vous savez que j'ai droit
de justice dans ma seigneurie. Or, vous me paraissez un ignorant.
Depuis trop longtemps vous semblez abuser mes vassaux et
moi-même et vous méritez un châtiment. Je vais
vous poser trois questions, si vous êtes dans
l'impossibilité d'y répondre, vous ferez connaissance
avec mes oubliettes. omme
bien l'on pense, le curé se retira peu rassuré,
d'autant plus qu'il ne savait quoi répondre aux trois
questions du seigneur. Le prêtre franchit donc la
passerelle et arriva au moulin : Le curé eut bientôt mis
au fait le meunier qui partit d'un grand éclat de rire, au
scandale du pauvre prêtre qui ne trouvait rien de drôle
à ce qui lui arrivait : "Mais tout cela va s'arranger,
messire curé, je suis très bien avec notre baron.
D'autre part, il n'y voit goutte. Vous allez me prêter votre
soutane et demain j'irai à votre place comparaître
devant le seigneur. Je lui en ai déjà joué bien
d'autres
" insi
fut fait et, le lendemain à l'heure dite, le meunier
habillé en curé de St Léger se présenta
en la chambre basse du château de la Bussière où
le baron attendait, prêt à exercer sa vengeance : e
baron rit beaucoup de l'esprit de son meunier et, le soir même,
il l'invitait à venir souper avec lui et le curé qui
n'en croyait pas ses oreilles. On raconte aussi que le meunier de la
Belouze, chargé de péchés, réussit,
malgré la vigilance de Saint Pierre, à entrer et
à demeurer au Paradis, lorsqu'il quitta ce monde.
Je vous demande de me dire combien pèse la lune, la somme que
je vaux et ce que je crois. Je vous donne 24 heures pour
répondre à mes questions. Demain, à pareille
heure, vous reviendrez au château et, si vos réponses ne
sont pas valables, vous irez voir mes oubliettes. "
L'homme le plus malin et le plus débrouillard du pays
était sans conteste le meunier de la Belouze. Le curé
résolut d'aller lui demander conseil : "S'il ne me tire pas
d'embarras, pensait le curé de St Léger, il ne
me reste plus qu'à prendre la fuite et à aller me
cacher dans les montagnes de St Rigaud et de la mère
Boitier."
- "Je vous donne le bonjour, messire curé, fit le
meunier, mais vous me paraissez bien triste
qu'y a-t-il donc
qui ne va pas ?
- Je suis menacé de mort par le baron de la Bussière,
dit le curé, et à vrai dire, je suis
déjà condamné à mort car je ne vois pas
le moyen de m'en tirer, sauf à me sauver dans les montagnes et
à errer loin de ma chère cure de St Léger.
- Entrez toujours dans la cuisine, messire curé, je me charge
de vous tirer d'embarras. La meunière va vous servir un pot de
Beaujolais, vous me raconterez votre histoire et nous aviserons aux
moyens d'arranger cela."
- "Eh bien, curé, avez vous trouvé à
répondre à mes questions ? demanda le seigneur.
- Mais oui, monsieur le baron, répondit le meunier, c'est
même si facile que cela m'a bien amusé.
- Voyons d'abord combien pèse la lune ?
- La lune, monseigneur, mais elle pèse une livre, puisqu'elle
a 4 quartiers.
- C'est exact, répondit le baron, mais maintenant
pouvez-vous me dire combien je vaux ?
- Mais bien sûr, vous valez 29 deniers.
- Comment 29 deniers ? s'écria le baron en colère,
attendez, vous allez voir de quel bois je me chauffe !
- Mais, monsieur le baron, notre seigneur Jésus-Christ a
été vendu 30 deniers. Je ne peux tout de même pas
dire que vous valez autant que lui, mais je vous estime un denier
seulement en-dessous de lui. Il me semble que ce n'est pas vous
manquer de respect.
- Passons, passons, fit le seigneur entre ses dents, mais il
reste une question et ce n'est pas la plus facile. Qu'est-ce que je
crois ?
- Mon seigneur, vous croyez que vous parlez au curé de St
Léger et vous avez devant vous le meunier de la Belouze, qui a
pris la place du pauvre curé terrorisé."