Boissy,
chef-lieu du canton, doit cet avantage à sa position au centre
du pays. Ce petit bourg est assis au plus haut point d'une colline
élevée et, malgré les dix-huit kilomètres
qui le séparent de Paris, le regard étonné y
embrasse le magique panorama de la grande cité. Son nom vient
des mots latins Buxus ou Boscus. L'un indique l'arbre
de buis, l'autre un bois en général. Les diplômes
de nos rois qui ont servi à composer la vie de Saint Babolein,
premier abbé de Saint-Pierre des Fossés,
monastère appelé depuis Saint-Maur, portent ces mots :
Vicum qui Buxeus dicitur locus qui dicitur Buxidus.
Ce dernier est
employé par l'auteur du Polypticon fossatense,
écrit au plus tard dans le dixième siècle. Dans
les douzième et treizième, on n'employa presque plus en
latin que le terme Boissiacum, fabriqué visiblement sur
le français. Le nom du patron de la paroisse y a
été ajouté pour le distinguer des nombreuses
communes qui, en France, ont la même origine
étymologique. On y compte 846 habitants* ; ce chiffre tend
incessamment à s'accroître. Des rues nouvelles, ouvertes
à travers un enclos boisé, se bordent en ce moment
d'habitations qui n'auront pas à attendre
l'ombrage.
*On en compte
aujourd'hui plus de 1100.
Boissy est
traversé par l'ancien grand chemin de Paris à Troyes.
Un service d'omnibus rend les communications faciles avec
Villeneuve-Saint-Georges, point d'intersection des voies
ferrées de Lyon et de Corbeil ; la distance de Boissy à
cette dernière ville est de dix-neuf kilomètres. Le
chemin de fer de Mulhouse traverse aussi une partie du territoire du
canton. II y a à Boissy une brigade de gendarmerie. Dom
Mabillon pense que ce lieu était habité dès
le sixième siècle. C'est, dit-il, le Viccus
Bucciacus dont parle Fortunat, dans la vie qu'il a
donnée de Saint-Germain, évêque de Paris, dans le
cours de ce même sixième siècle. Un enfant et une
femme de Boissy, tous deux paralysés, furent amenés
à Paris auprès du Saint Pontife qui les guérit.
Clovis II donna cette
terre au monastère de Saint-Maur-des-Fossés, vers l'an
650. Ces moines en ont laissé cette singulière
nomenclature : "ils y avaient vingt-quatre maisons et demie de
paysans charroyants, dix de manoeuvriers et treize hospices ou
logements ; duquel nombre de maisons il y en a en
bénéfice cinq et demie et un hospice ; en tout, il
demeure à Boissy soixante-dix-huit hommes. Chaque maison de
charroyants paye à l'abbaye par année cinq sols et,
l'année suivante, une brebis et un agneau, et deux muids de
vin. Elle ensemence, en grains d'hiver, quatre perches, et, en grains
d'été, deux perches. Entre deux maisons, les habitants
labourent chaque semaine s'ils sont trois maisons ensemble, ils
labourent l'espace de terrain appelé une charrue ; et chaque
maison fournit à l'abbaye, tous les ans, une charretée
de baguettes pour clore les vignes, avec trois poulets et des
ufs. A l'égard des maisons de manoeuvriers, chacune
paye, par an, au monastère, deux muids de vin, une brebis et
un agneau. Elle ensemence de grain d'hiver quatre perches et deux en
été et elle paye des poulets avec des ufs. Ce
village est une terre à cens pour laquelle on paye, à
la Saint-Denis, neuf sols huit deniers".
C'est à
l'abbé Lebeuf que nous empruntons ce curieux document ; il
nous fait connaître les anciens usages. Les guerres intestines
diminuèrent graduellement le produit de cette terre.
Dès l'an 1210, les hôtes, qui jusque là avaient
payé une tolte et une taille, en furent exemptés. Dans
le siècle suivant, l'abbaye de Saint-Maur accorda aux serfs la
manumission*. En compensation, les droits de cens et de taille furent
doublés et les serfs cédèrent alors à
l'abbaye leurs usages sur le chemin de Marolles ; ils ne se
réservèrent que les bruyères, et la garenne
où ils s'engagèrent à ne chasser qu'au
lièvre avec le chien et sans filets.
*manumission :
droit d'affranchissement des serfs
l'église de
Boissy St Léger
L'église de
Boissy est sous le vocable de Saint-Léger,
évêque d'Autun ; le farouche Ebroïn l'avait
exilé à Fécamp, après lui avoir fait
couper la langue. La légende rapporte qu'il recouvra tout
à coup la parole, au doux concert des anges terrestres qui
chantaient dans le sanctuaire de l'Eternel. Saint-Léger
n'étant mort qu'en l'an 678, ce n'est qu'au huitième
siècle qu'une église a pu le recevoir pour patron. La
plus ancienne partie du monument est la tour des cloches ; on y
reconnaît le douzième siècle. Les murailles en
sont fort épaisses. L'édifice, composé autrefois
d'une seule et vaste nef qui accuse le treizième
siècle, a depuis reçu des appendices à droite et
à gauche. Une réparation générale,
exécutée sous la direction de M. Blondel,
architecte à Versailles, vient encore d'y en ajouter. On a
aussi prolongé la nef et construit un nouveau frontispice,
absolument dans le style du monument la porte et la rosace font le
meilleur effet. II y avait, à la façade de l'ancien
portail, une pierre saillante ou modillon, dont
l'extrémité était sculptée de trois
figures, emblème de la Sainte Trinité. Il est
fâcheux qu'elle n'ait pu être
conservée.
La voûte de la
nef, de forme ogivale, est adhérente à la charpente du
comble, par conséquent les entraits et poinçons qui le
supportent sont apparents. On en a un exemple à Paris dans
l'ancienne Eglise du prieuré Saint-Martin des Champs. Mais le
mérin, autrefois visible, a été remplacé
par du plâtre. Les deux fenêtres qui éclairent le
sanctuaire et la rosace sont garnies de verrières. Les cartons
sont d'un artiste de Paris, M. Gérente*, et un don de
M. Bourdon.
*Joseph-Alfred,
né à Paris le 11 mars1821, marié à Boissy
en 1852. Il est le digne continuateur de son frère Henri,
enlevé si prématurément (1849) à l'art de
la peinture sur verre.
On regrette la
troisième fenêtre, bouchée par le retable, qui y
a été appliquée. Autrefois, l'autel était
isolé ; c'est un don de Monsieur, Comte de Provence,
alors seigneur de Grosbois, mort sur le trône, où il
porta le nom de Louis XVIII. Il y a plusieurs tableaux ; il faut
distinguer un saint Thomas, posant le doigt dans les plaies du
Christ après sa passion. Il est de l'école
espagnole. C'est un don de M. le baron Hottinguer, alors maire
de Boissy. Cette belle toile provient de la galerie Aguado. Celui du
maître-autel est un don de l'Empereur. Il représente
Jésus-Christ remettant les clefs du paradis à
Saint-Pierre. Ajoutons une Descente de croix et les quatre
Evangélistes, uvre de M. Charpentier, artiste
de Paris*. Il en fit don lorsqu'il fréquentait Boissy
où il a passé plusieurs belles saisons. M
Frechou, artiste de Paris, a été chargé, par
M. le prince de Wagram, de décorer la chapelle de famille. Les
tons de la peinture sont heureux.
*Jacques-Denis
Charpentier, né à Paris le 8 juillet 1765, mort
à Fontenay-en-Brie le 9 sept.1840 et inhumé dans le
cimetière de Boissy
On admire, au
plafond, quatre médaillons qui représentent saint
Léger, saint Alexandre, saint Hubert et sainte
Françoise, inspirés par Rubens, dont tout le monde
connaît la Sainte Famille, uvre capitale, dont est
décorée l'église Saint-Jacques d'Anvers ; les
figures sont celles des membres de la famille Berthier de
Wagram. Il y a aussi une belle Sainte Elizabeth de Hongrie
au-dessus de l'autel ; et l'on s'arrête volontiers à
considérer l'autel, entièrement en fonte, y compris le
tabernacle, le gradin, même la croix et les flambeaux, le tout
richement peint.
On ne trouve plus,
dans le pavé de cette église, l'épitaphe de
Michel de Bonnaire, curé du lieu, chanoine de
Saint-Maur, décédé en 1552. On y lisait aussi
jadis le mémorial de la fondation de plusieurs saluts, faite
en 1576, entre autres, pour le jour de Pâques. Il y
était dit : le curé descendra la sainte hostie,
ce qui indique visiblement que, selon l'ancienne coutume,
l'Eucharistie était suspendue sous un pavillon. Le dallage de
la nef a d'ailleurs été remplacé par un parquet,
et celui du sanctuaire a été renouvelé. Le
chur est garni de deux rangs de stalles modernes en
chêne. La tour des cloches est au midi. Elle a son toit en
batière.
Il y avait autrefois
dans cette église une confrérie en l'honneur de
saint Blaise, dont on conservait des reliques. Il y en avait
aussi de saint Maur.
l'église de
Boissy St Léger
Dans une
propriété voisine de l'église, habitée
sans doute autrefois par la colonie envoyée à Boissy
pour en défricher le sol, on trouve une fontaine du nom de
saint Babolin, qu'on sait avoir été le premier
abbé du monastère de Saint Maur. Le chemin par lequel
on y arrivait était appelé Chemin de la
procession. Le cimetière occupait la place qui
précède l'église ; il a été
transféré au sud de la commune.
Les moines de
Saint-Maur ont été longtemps les seigneurs spirituels
et temporels de Boissy. Le droit à la cure leur fut
particulièrement octroyé en 1124 ; mais lors de l'union
de ce monastère à la mense épiscopale, le droit
d'y nommer revint à l'ordinaire. Cette cure relève de
l'évéché de Versailles depuis le concordat de
1802. Le titulaire, du 27 mars 1806 au 7 octobre 1807, a
été l'abbé Pierre-Marie Cotteret,
né à Argenteuil (Seine-et-Oise), le 8 mai 1768. A cette
époque, il vint habiter Paris où il dirigea plusieurs
feuilles religieuses, particulièrement le Journal des
curés. Il a aussi donné des articles à la
Biographie universelle. Bientôt il obtint la direction
du petit séminaire et reçut le titre de chanoine
honoraire ; plus tard, il fut nommé chanoine titulaire de la
métropole, et professeur à la faculté de
théologie de Paris. L'abbé Cotteret suivit te cardinal
de Clermont-Tonnerre qui allait à Rome, pour le Conclave, lors
de l'élection du pape Léon XII, et revint, de la ville
éternelle, honoré du titre d'évêque de
Caryste, in partibus. Il fut sacré à Paris le 29
juin 1824, et fut immédiatement pourvu d'un canonicat dans la
basilique de Saint-Denis. Le gouvernement l'appela ensuite à
occuper le siège de Beauvais, en 1837 ; il est mort dans cette
ville le 13 novembre 1841. Le mandement des vicaires
généraux capitulaires de ce diocèse a
payé un juste tribut à sa mémoire. On y
lit : "Interrogez les paroisses de Sannois et de
Boissy-St-Léger, et vous apprendrez le généreux
désintéressement dont leur digne pasteur fit
preuve". Il avait été précédé
à Boissy par l'Abbé Raussin, qui devint
curé de Corbeil, puis de Saint-Germain-en-Laye, et est mort
à Versailles, en 1837, chanoine titulaire de la
cathédrale. Après ceux-ci sont venus : MM.
Larcher, transféré à Luzarches.
Derobe, en 1815, qui bientôt passa ailleurs, et revint
à Boissy de 1819 à 1833. Langlois,
transféré à Montmorency. Ducorps, son
successeur, à Meulan. Bourgeois, qui a
résigné en 1857. M. l'abbé Louis-Antoine
Parent en était titulaire vers 1860.
Outre l'Eglise
paroissiale, il y avait une chapelle au Piple, ancien manoir
de l'abbé de Saint-Maur. Elle avait été
bâtie par l'abbé Pierre, vers 1280. Le nom de ce domaine
est écrit dans les titres latins : Populus. Au
treizième siècle, l'abbaye y possédait
vingt-deux arpents de vignes, deux pressoirs et sept arpents de bois.
Outre ces biens, la communauté avait cent arpents de bois ou
environ dans la forêt voisine. Les abbés de Saint-Maur
n'étaient pas tellement attachés à la jouissance
du manoir du Piple, qu'ils ne le donnassent parfois à
ferme.
En 1138, Odon,
archidiacre de Paris, attiré par la vue charmante dont on
jouit au Piple, le prit à bail. Il est vrai que la
communauté venait alors d'en faire l'acquisition de Pierre et
de Gilbert du Piple. L'abbé Pierre, qui y fit construire une
chapelle, ajouta aux Bâtiments une salle avec un cellier
au-dessous, et une maison qu'il fit entourer de murs et de grands
fossés. En 1268, Philippe de Montreuil, chevalier, et
Isabelle, sa femme, firent don à l'abbaye du droit de criage
(criée) qu'ils avaient sur son domaine du Piple. On trouve
dans les anciens documents de cette communauté, dit M.
l'abbé Lebeuf, que les moines, par reconnaissance des biens
que leur léguèrent Raoul de Chevry, mort
évêque d'Evreux, et Jean, son neveu,
cédèrent, l'an 1280, l'usage de leur maison du Piple,
à titre viager, à ce même Jean de Chevry,
avec l'usage des bois que les habitants de Boissy leur avaient remis
pour leur manumission.
Les subsides
occasionnés par les guerres intestines du seizième
siècle obligèrent alors les moines de Saint-Maur
à aliéner leur domaine du Piple. Ils en retinrent
l'hommage et la haute justice, qu'ils cédèrent dans la
suite aux seigneurs de Grosbois. A chaque mutation, le seigneur avait
droit à un écu d'or ou une paire d'éperons
dorés, à son choix. En 1544, le Piple était la
propriété de M. de Montigny ; au 17e, il était
possédé par MM. de Gaudart, Conseillers au Parlement,
puis il passa à M. de Cantorbe, fermier général
; plus tard on y vit le Maréchal de Saxe.
le château du
Piple
Ce valeureux guerrier
bâtit le manoir en 1725. C'était pour lui un
séjour plein de charmes. On lit dans une lettre qu'il
écrivit le 1er août 1750, à Favier son ami
: "Je reviens dans ce moment du Piple, où je suis la plus
part du temps, la Grange n'est pas encore achevée". En
1752, M. Chauvelin, seigneur de Grosbois, en fit
l'acquisition. Il soutint alors un procès qui lui adjugea la
haute justice du lieu. Ce seigneur vendit à Jean
Langlois, sous réserve des droits honorifiques ; et
celui-ci à M. De La Bourdonnais.
Au XIXe
siècle, le Piple a appartenu au Comte Boulay De La
Meurthe, conseiller d'Etat. Il en a fait replanter en partie le
parc. Compris dans l'ordonnance du 24 juillet 1815, il dut quitter la
France et vendit alors ce domaine à Charles
Schulmeister, d'origine suisse, qui y établit une
brasserie considérable. Cet établissement n'eut pas de
durée.
M. le Baron
Hottinguer*, banquier, en fit l'acquisition. Il y est mort le 11
septembre 1841, à l'âge de 77 ans, et a
été inhumé au Père-Lachaise.
*Jean Conrad,
né à Zurich (Suisse)
M. le baron
Hottinguer appartenait à une famille qui a fourni plusieurs
générations d'érudits et d'écrivains. Le
Piple est la propriété de M. le baron Hottinguer, son
fils qui en a rebâti le château avec une magnificence
princière, en 1857, sur le même emplacement. La vue dont
on y jouit est des plus exceptionnelles : Paris lui fait horizon.
Madame la Baronne Hottinguer, née Stéphanie
Madeleine-Caroline Delessert, a donné le jour, le 8
septembre 1846, au château du Piple, à
Henri-François Hottinguer.
le château du
Piple
Ce qu'on trouve de
plus ancien touchant la terre de Grosbois, qui donna naissance
à un village et à une paroisse annexés à
Boissy, est une fondation que le roi Charles V fit en faveur des
Macicots de la Cathédrale de Paris (officiers de l'Eglise
Notre-Dame de Paris inférieurs aux bénéficiers,
mais supérieurs aux simples chantres à gages). Ce
prince leur assigna cent livres de rente sur cette terre, par des
lettres données à Paris au mois de juillet 1367.
Grosbois est un démembrement de Villecresnes ; une cure y
avait été établie dès le commencement du
treizième siècle. On lit dans le Nécrologe de
l'abbaye royale de Saint-Victor-lez-Paris, en décembre 1400 :
Obiit Deus Réginaldus curatus de Crosso
Bosco.
Peut-être y
existait-il alors une chapelle titrée de Saint-Jean-Baptiste,
bâtie à Grosbois-le-Roi, comme on l'appelait alors par
ordre du roi Jean, père de Charles V.
Dès 1226, on
trouve Grosbois écrit en latin : Grossion nemus. On ne
connaît les seigneurs de cette terre qu'à partir du
seizième siècle. Il est probable qu'un rendez-vous de
chasse fut l'occasion de la construction du hameau et de la paroisse,
et que le domaine royal en fut longtemps en possession. C'est la
Duchesse d'Angoulême qui fit bâtir le Château de
Grosbois et ce fut son fils, François I, qui donna cette
seigneurie à Adam des Hayes, son premier valet de chambre, son
chirurgien et barbier.
le château de
Grosbois
Après une
lacune causée par les troubles civils, nous trouvons Raoul
Moreau, trésorier de l'épargne en 1580 ; il
était en même temps châtelain d'Auteuil et du
Tremblay. Marie, sa fille, qualifiée dame de Grosbois
en 1596, porta cette terre en dot à Nicolas De Harlay,
seigneur de Sancy, puis de Grosbois. C'est à son profit que
l'abbaye de Saint-Maur aliéna la terre de Boissy, en 1599,
pour acquitter les subventions accordées au roi pendant les
troubles de la Ligue. Le baron de Sancy était né en
1546. Il est mort à Paris le 17 octobre 1629, et a
été inhumé dans l'église des Pères
de l'Oratoire, devenue plus tard l'un des temples des
réformés. La famille, originairement militaire, a pris
son nom du fief de Harlay, dans le Vexin français. Né
Calviniste, il se fit catholique parce que, disait-il, il fallait
être de la religion de son prince, maxime qui donne la juste
mesure de son caractère. D'Aubigné a publié
contre lui une très violente satire, sous le titre de
Confession catholique de Sancy ; Blanchard a
donné la généalogie de cette famille.
Jacqueline de Harlay,
fille de Nicolas, épousa, le 15 février 1596, Charles
de Neufville, Seigneur d'Alincourt, Marquis de Villeroy. En 1616, M.
et Mme de Harlay vendirent Grosbois à Charles de
Valois, comte d'Auvergne, duc d'Angoulême. Ce prince
était le fils naturel de Charles IX et de Marie
Touchet. La fameuse Marquise De Verneuil, Henriette-Catherine
de Balzac d'Entraigues, maîtresse de Henri IV,
connue par ses intrigues à la Cour, était sa sur
utérine. Le duc d'Angoulême, né le 18 avril 1573,
s'est rendu célèbre par sa valeur sous quatre de nos
rois. II est mort à Paris le 24 septembre 1650, et a
été inhumé chez les Minimes de la place Royale.
On a de lui des Mémoires et quelques autres écrits. Il
épousa, premièrement en 1591, Charlotte, fille du
connétable Henri De Montmorency, morte en 1636. On a le
portrait de cette dame. Deuxièmement, Françoise De
Narbonne, en 1644. La bénédiction nuptiale leur fut
donnée dans l'église paroissiale de Boissy, le 5
février, par le curé du lieu, appelé
Bertrand. Cette princesse est morte le 10 août 1713, au
château de Montmort, en Champagne, dans un état voisin
de la misère, âgée de 92 ans. Le duc n'eut point
d'enfants de cette union ; il lui était né deux fils de
la première.
Dubreuil, dans
son Supplément aux Antiquités de Paris, nous
apprend que le duc d'Angoulême tenait une espèce de cour
à Grosbois, à cause, ajoute-t-il, de la noblesse
courtisane qui l'entoure. Ce prince y reçut plusieurs fois le
roi Louis XIII.
L'Itinéraire
des rois de France y marque la présence du monarque les 31
octobre 1637 et 19 novembre 1638. On trouve plus tard Louis XIV
à Grosbois, où il vint passer la revue des gens d'armes
de Monseigneur le Dauphin.
On croit que ce fut
vers l'an 1640 que M. d'Angoulême rebâtit le
château tel que nous le voyons.
le château de
Grosbois
Tallemant des
Réaux dit, dans ses historiettes : Il ne pouvoit
s'empescher de bastir toujours quelques maisonnettes ; mais il
n'avoit garde d'achever Grosbois. Comme il n'estoit pas riche, cela
l'incommodoit.
Le Château de
Grosbois a été plusieurs fois gravé :
Israël Sylvestre, Rigaud, Mériau et
particulièrement Lépicié, l'ont
parfaitement rendu. Madame la princesse douairière de Wagram
en a personnellement gravé une vue qui n'est pas dans le
commerce. Denon en a fait les personnages. N'oublions pas
l'uvre de Blancheton : Les plus remarquables châteaux
de France (Paris) 1826-1830, 2 volumes.
Le duc fit ajouter au
parc, déjà fort étendu, la plus grande partie de
l'emplacement du village de Grosbois. La destruction de
l'église de ce village se fit d'une manière assez
bizarre pour être racontée. Le duc, qui rencontrait des
obstacles à ses projets, saisit le temps où le
curé et ses paroissiens étaient allés
processionnellement dans un village voisin, pour mettre des ouvriers
et des soldats à la besogne ; il fallait que ce fut une simple
chapelle, puisqu'au retour l'édifice ne présentait plus
que des décombres.
L'archevêque de
Paris unit la cure à celle de Boissy. On ne dit pas quel fut
le sort du titulaire. Lorsque le duc d'Angoulême établit
non loin une communauté de Camaldules, il aurait voulu placer,
dans leur église, le titre éteint de cette paroisse, et
ne put l'obtenir de l'autorité diocésaine. Avant de
reprendre la chronologie des propriétaires de Grosbois, nous
ajouterons cette aventure racontée par Pierre De
l'Estoile, dans son journal historique :
Henri IV se trouvant
en chasse vers Créteil, entra dans une hôtellerie de ce
village où la broche tournait et où on lui refusa
à manger, sous prétexte que le rôt était
destiné à des procureurs, réunis pour traiter
d'une affaire. Le roi fit demander à ces messieurs une place
à leur table, ou tout au moins une portion du rôti. Tout
lui fut refusé. Vitry eut ordre de se saisir de ces gens de
robe ; ils furent conduits à Grosbois et là, ils furent
fouettés et étrillés pour leur apprendre
à être plus courtois avec les gentilhommes. On se
rappelle que Colle a placé la scène de sa partie
de chasse de Henri IV, non loin, à Lieusaint.
Louis Emmanuel de
Valois, fils puîné du duc d'Angoulême,
hérita de la terre de Grosbois. Il n'en jouit pas longtemps.
Il est mort à 58 ans, le 13 novembre 1653. De son mariage avec
Henriette de Guiche, dame de la Palisse, il eut trois fils,
tous morts avant lui, et une fille : Marie-Françoise de
Valois. Elle épousa, en 1649, Louis de Lorraine, Duc de
Joyeuse, mort en 1654. La duchesse lui survécut jusqu'au 4
mai 1696. Elle était tombée en démence et mourut
âgée de 66 ans, dans l'abbaye d'Essay, près
d'Alençon. Dès le 24 décembre 1667, la terre de
Grosbois avait été acquise par Antoine de Brouilly,
Marquis de Pienne, chevalier des ordres du roi. Elle passa,
à son décès, à Olympe, sa fille
aînée, mariée à Louis d'Aumont, Marquis
de Villequier. On a son portrait gravé ; il est fort rare.
Cette dame est morte à Passy, le 23 octobre 1723, à
l'âge de 62 ans. Dès le 12 juillet 1701, M. et Madame
d'Aumont avaient vendu Grosbois à Achille de Harlay, Comte
de Beaumont, fils du baron de Sancy, famille à laquelle
cette terre avait précédemment appartenu. Il
était marié à Anne-Magdeleine de
Lamoignon, morte la même année, le 8 octobre. M. de
Harlay a été premier président du Parlement de
Paris de 1689 à 1707. Le P. Jacques de la Beaune a fait
son éloge ainsi que celui de MM. de Verdun, Le Jay et Le
Peletier, qui ont occupé le même fauteuil, et ont
aussi habité nos cantons. Cet opuscule, écrit en latin,
a été traduit par M. Dreux du Radier (1753). M. de
Harlay s'est aussi rendu célèbre par son esprit fin et
mordant. On cite de lui une foule de mots piquants : on en fit dans
le temps un recueil sous le titre de Harloeana ; il est mort
le 23 juillet 1712, âgé de 73 ans. Ce magistrat a
terminé le château commencé par le duc
d'Angoulême.
Il obtint de changer
le nom de Grosbois en celui de Sancy, porté par sa
famille, par lettres patentes de 1707. C'est le nom d'un village de
l'arrondissement de Provins (Seine-et-Marne). Il ne donna pas suite
à ce projet. Une des rues de la cité, à Paris,
porte le nom de Harlay ; elle a été ouverte à
ses frais. Cette rue va bientôt disparaître, mais elle
restera marquée par la nouvelle façade de l'hôtel
de la Préfecture de police, édifiée sur son
alignement. Le fils de M. de Harlay porta aussi le prénom
d'Achille ; il conserva la terre de Grosbois. De son mariage
avec Louise Lowet de Coetjon, naquit une fille unique ; elle
épousa Christian-Louis de Montmorency-Luxembourg, Prince de
Tingry, lieutenant-général des armées du
roi, fils puîné du Maréchal de Luxembourg. Ils
vendirent Grosbois le 4 mai 1718 à Samuel Bernard, l'un
des célèbres traitants, enrichi sous le
ministère, de Chamillard. On prétend que sa fortune
s'élevait à trente-trois millions ? Il en fit un noble
usage.
Samuel Bernard
n'était pas juif, comme on le suppose
généralement, mais il avait été
Calviniste. Lors de la révocation de l'Edit de Nantes, il fut
du nombre des soixante-huit familles nobles qui abjurèrent ;
il évita par là la persécution et l'exil. Les
grands et importants services qu'il avait rendus à l'Etat lui
avaient mérité différentes marques d'honneur. On
prétend qu'il était superstitieux et qu'il croyait son
existence attachée à celle d'une poule noire, dont la
mort fut l'époque de la sienne. Il avait 88 ans alors ;
c'était en 1739. Ce fut, paraît-il, pour son fils,
Samuel Jacques Bernard, qu'il fit l'acquisition de Grosbois ; il
continua d'habiter son château de Coubert, qui n'est pas
éloigné. De son temps fut dressé le magnifique
atlas général de la terre de Grosbois, passé aux
archives de l'Empire, et, depuis 1811, retourné à
Grosbois. Samuel Jacques Bernard, maître des requêtes
ordinaires de l'hôtel, surintendant des domaines, maisons et
finances de la reine, grand'croix, grand prévost et
maître des cérémonies de l'ordre royal et
militaire de Saint-Louis, lieutenant des chasses et plaisirs de Sa
Majesté, épousa Louise Olive Frottine De La Coste
Messalière, dont il eut six enfants.
le château de
Grosbois
Le garde des sceaux
Chauvelin, l'ami constant de cette famille, posséda
ensuite la terre de Grosbois. C'est pour lui que celles de Sucy,
Boissy-Saint-Léger, Villeneuve Saint-Georges, Yerre, Santeny
et Marolles, furent unies à celle de Grosbois, avec les fiefs
de Cerçay à Villecresne, et de Narelle à Yerre,
pour former le Marquisat de Grosbois. Les lettres patentes
sont du mois de mars 1734, elles ont été
enregistrées au parlement le 19 avril, et en la chambre des
comptes le 16 juin. On sait que, disgracié, il avait
été exilé à Issoire. Il obtint
bientôt de venir vivre dans le marquisat de Grosbois. M. de
Chauvelin est mort à Paris, le 1er avril 1762 ; il a
été inhumé chez les Carmes de la place Maubert.
De son mariage avec Anne Cahouet, il eut un fils et trois
filles : Charles-Louis, son fils, marquis de Grosbois,
ministre d'Etat et commandeur des ordres du roi, est mort
célibataire, le 30 novembre 1750, à l'âge de 30
ans. Il eut la même sépulture que son père. Les
filles épousèrent les comtes de
Colbert-Maulévrier ; Chamillard, comte de la Suze ; et
François de la Rochefoucault, comte de Surgères. A la
mort de M. de Chauvelin, Grosbois fut vendu au contrôleur
général Peirenc de Moras, dès lors
qualifié Marquis de Grosbois. Il a été ministre
de la marine. Ce seigneur est mort le 3 mai 1771 ; il a
été inhumé dans l'église de
Favières (Seine-et-Marne). Il fut marié à
Jeanne-Louise Moreau, dont il eut une fille, la Comtesse de
Merle. Monsieur, Comte De Provence, depuis roi sous le nom de
Louis XVIII, acheta Grosbois de ceux-ci. Il le possédait
encore au moment de son émigration. Devenu bientôt
domaine national, il a appartenu quelques années plus tard au
directeur Barras. C'est certainement à cette
circonstance que nous devons la conservation de ce château.
Paul-François-Jean-Nicolas, Comte de Barras, né
à Fohemboux (Var), le 30 juin 1775, est mort à Paris en
1829, accablé d'infirmités. Il a été
inhumé au Père-Lachaise. Sa famille a pris part aux
croisades. On dit proverbialement en Provence : Noble comme les
Barras, aussi ancien que nos rochers.
Après la
fameuse journée du 18 Brumaire (9 novembre 1799), Barras,
ayant forcément donné sa démission, se retira
dans son château de Grosbois. Bonaparte, lui en
accordant la permission, lui donna une escorte de cent grenadiers
pour qu'il y arrivât sûrement. Devenu dès lors
trop mince propriétaire pour conserver cette terre, et
retiré d'ailleurs à Bruxelles, il la vendit au
général Moreau, ramené à Paris par
le gain de Hohenlinden. Jean-Victor Moreau, né à
Morlaix en 1763, est mort à Dresde le 2 septembre 1813. Mme
Houlot, sa belle-mère, lui écrivait au moment de
cette acquisition : Il ne convient pas à la grande
célébrité d'acheter un bien qui a appartenu
à B... Cette acquisition fera tenir des propos sur la fortune,
en ce qu'elle suppose au moins cent mille livres de rente et c'est
une contradiction avec tout ce qu'on a dit et fait jusqu'à ce
moment. C'est procurer une grande jouissance à ceux qui sont
à la piste pour trouver un tort à celui qui n'en a
jamais eu
C'est à
Grosbois que, dans les douceurs d'une union récente, au milieu
d'un petit nombre d'amis et d'étrangers qui se
succédaient en foule pour lui témoigner leur
admiration, Moreau cherchait à rendre moins importants de
sinistres présages et pourtant il refusa plusieurs fois de se
rendre à la cour, que venait de créer le premier
consul. Impliqué dans la conspiration de Pichegru et de
George, le général Moreau fut arrêté, mis
en jugement et condamné le 10 juin 1804. Il obtint de se
retirer aux Etats-Unis. Son épouse, voulant partager son
infortune, vendit Grosbois au maréchal Berthier.
Après la restauration, Mme Moreau revint en France. Le roi lui
fit remettre le bâton de maréchal de France qu'il avait
destiné au général, et lui accorda les honneurs
dont jouissent les femmes d'officiers revêtus de cette
éminente dignité. Mme Moreau est morte à
Bordeaux, le 1er septembre 1821. C'était une femme ambitieuse
; elle exerça sur la destinée du général
une déplorable influence.
Louis-Alexandre*
Berthier, Prince De Neufchatel et De Wagram, né à
Versailles, le 20 novembre 1753, est mort à Bamberg, en
Bavière, le 1er juin 1815. Ses hauts faits connus et
appréciés ont été
célébrés par ses nombreux biographes. On a de
lui une brochure sous ce titre Alexandre Berthier,
général de brigade, à l'opinion publique, et
Relation des campagnes du général Bonaparte en Egypte
et en Syrie, enfin Relation de la Bataille de Marengo.
L'Empereur, qui l'avait en grande amitié, l'avait fait
maréchal de l'Empire, Prince de Neufchâtel etc. II
épousa la princesse
Marie-Elisabeth-Amélie-Françoise de Bavière,
fille du duc Guillaume, beau-frère et cousin du roi de
Bavière, née le 6 mai 1784, morte à Paris le 1er
juin 1849, inhumée à Boissy. De ce mariage,
contracté en 1808, sont nés un fils et deux filles,
Mme la Comtesse d'Hautpoul, mariée à Grosbois,
le 4 octobre 1832, et Mme La Duchesse de Plaisance.
*On lit dans le
Supplément à la Biographie universelle : Le
"père des Berthier eut la manie de donner à tous ses
enfants des noms tellement illustres (Alexandre, Léopold,
César) qu'il était impossible, quels que fussent leur
valeur et leur succès, qu'ils en portassent dignement le
poids, et cela leur attira par la suite un grand nombre
d'épigrammes qu'ils ne méritaient pas plus que leur
grand nom". Le comte Léopold, mort à Paris, a
été inhumé au Père-Lachaise, où
repose aussi le comte César, mort au château de
Grosbois, le 19 août 1819. Une rue de Versailles, au quartier
Notre-Dame, y perpétuera le nom de Berthier.
Napoléon-Louis-Joseph-Alexandre-Charles-Berthier,
prince de Wagram, né à Paris le 11 septembre 1810,
s'est marié, en 1832, à demoiselle
Zénaïde-Françoise, fille du Comte
Clary, famille environnée de tous genres de souvenirs. De
ce mariage sont nés trois enfants : un fils et deux filles. La
plus jeune, Marie Elisabeth, est née au château
de Grosbois, le 9 juin 1849. L'aînée est mariée
au prince Joachim Murat.
Le château de
Grosbois consiste en plusieurs corps de bâtiments d'un style
général de décoration. La pierre et la brique
ont été employées à sa construction. Son
comble, recouvert d'ardoises, est décoré de fantaisies
en plomb coulé, fort en usage alors et du meilleur effet.
Blanchard avait autrefois peint la galerie. On ne trouve plus
dans ce château les amples cheminées
d'autrefois.
Grosbois - le salon
Empire
M. de Wagram a
entrepris la restauration de son château. Plusieurs plafonds
ont été restitués, et les couleurs qui
recouvraient les bois ont été rafraîchies ou
renouvelées avec soin. Le salon d'attente, au
rez-de-chaussée, montre les portraits des anciens possesseurs
de cette terre, peints en médaillons dans les panneaux des
portes, d'après d'anciennes gravures. La mosaïque de
cette salle, exécutée en 1847, est un objet de
curiosité. Les tableaux de chasse de Delaporte et
autres complètent la décoration de cette pièce.
Au premier étage, on voit la galerie des fêtes, et,
à la suite la bibliothèque, qui était autrefois
la Chapelle du Château. Au même étage, se trouve
un salon où sont réunis les portraits de la famille
Berthier et les armes et les armures du Maréchal de Wagram,
ainsi que les nombreuses décorations qu'il dut à sa
valeur.
Riche musée,
beau titre de la famille et son orgueil ! Tout atteste le bon
goût du maître, et le talent des artistes employés
à cette restauration. Le parc a été aussi
rajeuni dans son dessin ; la partie qui avoisine le château a
été transformée dans le genre
anglais.
On prétend que
c'est au château de Grosbois que l'impératrice
Joséphine signa l'acte de divorce exigé d'elle ;
nous n'en avons pas la preuve.
Plus tard, le 19
janvier 1813, l'Empereur Napoléon accompagné de
l'Impératrice Marie-Louise vint à Grosbois pour
prendre part à une chasse qui lui était offerte par le
Prince de Wagram. Le Comte de Montesquiou, Grand Chambellan,
accompagnait LL.MM.
Dans des
circonstances bien différentes, Marie-Louise revint encore
à Grosbois le 24 avril 1814 ; elle y trouva l'Empereur
d'Autriche, son père, qui l'attendait. Elle y reçut
plusieurs personnes venues de Paris pour lui faire leurs adieux, et
le lendemain elle partait pour Vienne. C'était la fin de
l'Empire et la déchéance de Napoléon.
Vers la fin de
l'année 1815, le roi Louis XVIII conçut la
pensée d'acquérir la terre de Grosbois, dont il avait
été autrefois propriétaire, pour en faire
hommage au Duc De Wellington. Vaulabelle parle de ce fait dans
son Histoire des deux restaurations. Nous avons la preuve que le roi
chargea Barbé Marbois, cet homme tant calomnié
par ses biographes, de cette négociation. On sait qu'il
posséda constamment une franchise qui eut pour la paix de sa
vie des résultats peu satisfaisants. Il n'en
persévéra pas moins dans son amour de la justice et de
la vérité. Voici ce que cet homme d'Etat écrivit
au duc de Richelieu à cette occasion : Cette marque
éclatante de la gratitude royale est une chose bien grave,
nous nous en entretiendrons demain matin avant que je fasse aucune
démarche. Quelques jours plus tard il écrivait au
roi : Je suis bien assuré de ne jamais déplaire au
roi en lui disant avec franchise ce que j'estime être la
vérité. Le roi m'a réitéré ses
premiers ordres relativement à Grobois. Je me suis
retiré après avoir exprimé la peine que
j'éprouvais d'être chargé d'une semblable
mission. Je consigne ici ce que mon respect ne m'a pas permis de dire
aussi fortement que je l'aurais dû. La terre de Grobois ne peut
être donnée à M. le duc Wellington sans blesser
grièvement tous ceux qui ont gardé le souvenir de
Bonaparte. Cette terre est pour ainsi dire aux portes de Paris, et le
général anglais ne pourra l'habiter tranquillement.
M'est-il permis d'ajouter que l'histoire racontera que le vainqueur
de l'année française a été magnifiquement
récompensé par le prince qui est remonté sur le
trône de France ; ce fait est un de ceux que la
postérité excuse difficilement. Ne voyez, Sire, dans
mon opposition qu'un zèle sincère pout votre gloire
! Louis XVIII dut céder. C'est alors qu'il conféra
au général anglais le titre de Duc De Brunoy. Et, en
lui en remettant le brevet, le roi lui dit : C'est le nom d'un
lieu qui s'allie dans mon souvenir avec celui de mes plus beaux
jours, voilà pourquoi je l'ai choisi pour vous. Les
brouillons de lettres de Barbé-Marbois au nombre de trois, un
seul écrit de sa main, ont été notre
propriété. Nous en avons fait don aux archives de
l'Empire.
Parmi le grand nombre
de personnes considérables venues à Grosbois, nous ne
pouvons oublier la reine douairière de Suède,
née Désirée-Bernardine-Clary, tante de la
châtelaine.
Grosbois - le
hall
Outre les terres de
Grosbois et du Piple, on trouve à Boissy plusieurs maisons de
campagne : la plus remarquable est celle de M.
Lacarrière. On a un arrêt du grand conseil du 9
janvier 1731 rendu en faveur de André de Vouges,
écuyer, seigneur de Châteauclair, de Vimpelle en partie,
président trésorier de France, en la
généralité de Caen. Il nous fait connaître
que ce seigneur avait des droits honorifiques dans l'église de
Boissy-Saint-Léger. Il avait certainement un logis des champs
dans ce village.
Au commencement du
siècle, on connaissait à Boissy Antoine-Auguste
Lambert, Gayet De Sansale, ancien docteur de Sorbonne, et ancien
chanoine de Saint-Paul, à Lyon, sa patrie. Il était
aussi conseiller au parlement et bibliothécaire de la
Sorbonne, au moment de la révolution. Il est mort à
Paris après le retour des Bourbons. Ce savant, avant de se
fixer à Boissy, était venu souvent passer ses vacances
à Boussy Saint-Antoine, chez son frère, qui y avait une
maison. On a de lui : Un mot à M. Pastoret, un rien
à M. Gaudin, sur le rapport qu'ils ont fait à
l'Assemblée nationale, au mois de février 1792,
concernant le tribunal de l'Université de Paris, la
Faculté de théologie et la Société de
Sorbonne. (Paris, 1792, in-folio de 18 pages).
MM. Collin et De
Merville ont aussi habité Boissy. Le dernier est mort
conseiller à la cour de cassation. On ya encore connu le
Baron Hautin et le Marquis De Quitry, ancien colonel de
cavalerie, officier de la Légion d'honneur.
Victor-Jacques-Guy-Georges-Henri Chaumont, marquis De Quitry,
ne dérogea pas à la valeur de ses ancêtres.
Né à Bienfaite (Eure), le 27 juin 1766, il est mort
à Boissy le 14 juillet 1848. On a de lui une fable ayant ce
titre : Le Papillon et le Chèvrefeuille. Elle a
été insérée dans le Magasin
encyclopédique (8e année, 1803, tome V, page 404).
A ces noms nous ajouterons ceux de MM. Guyot De L'Isle, Le Picard
et La Benette-Corse. Ce dernier, bas-comique du boulevard,
était un facétieux personnage ; on doit se rappeler
que, sous le masque risible de Mme Angot, il commanda si bien le rire
! Ajoutons qu'il fut honnête homme et bon père ! M.
Maudet, négociant en vins à Boissy, a publié
plusieurs brochures sur la réforme à apporter dans la
législation des boissons.
Boissy a vu
naître Théodore-Ferdinand Vallon de Villeneuve,
le 16 Prairial an VII (4 juin 1799), alors que son père y
était receveur des domaines. Il a travaillé pour le
théâtre et recueilli de beaux succès, quoique
toujours en collaboration. On a aussi de ce littérateur des
poésies et des chansons. Il est mort à Paris ces
années dernières.
C'est à tort
que la biographie Didot fait naître le Comte Gilbert Des
voisins à Grosbois ; son épitaphe, au cimetière
du Père-Lachaise, dit qu'il est né à
Paris.
L'hôtel-de-ville,
construit dans le cours de l'année 1860, est un bâtiment
architectural bien ordonné intérieurement.
Malheureusement, il faut le dire, l'Eglise et la municipalité
sont aux deux extrémités de Boissy. Parmi les maires
qui ont administré cette commune, nous nommerons M. Charlier,
mort en 1829 à Boissy ; le colonel Marc, né à
Paris en 1772, mort en la même ville le 2 mars 1853,
inhumé à Boissy ; M. le Baron Hottinguer, et M. le
Prince de Wagram.
Le Père
Michel, religieux Ermite de l'ordre des Camaldules, dans le couvent
de son ordre, à Grosbois, où le duc d'Angoulême
les avait appelés et établis, nous a laissé une
Lettre à monseigneur le duc d'Angoulesme sur les
cruautés des Mazarinistes en Brie (Paris, 1649, in-8). Elle a
été en partie reproduite dans le choix des Mazarinades
(tome I, page 263). Guy-Patin, qu'on sait avoir fait grand cas de
pamphlets, et Naudé, parlent de ce religieux avec
éloge. On trouve encore, parmi les brochures dites
Mazarinades, celles-ci se rapportant à Boissy : Les combats
donnés sur le chemin de Paris à Charenton et à
Brie-Comte-Robert, les 16 et 18 de ce mois, où les Parisiens
ont eu, en deux rencontres, plus de six cents cavaliers tués,
blessés ou faits prisonniers. Saint-Germain-en-Laye, le 23
février 1649, in-4.
Le Mercure
parisien, contenant tout ce qui s'est passé de plus
particulier, tant dans Paris qu'au dehors, depuis la nuict du jour et
feste des Roys, jusques à présent, et qui n'ont
été marqués aux imprimés cy-devant
publiés. Paris, 1649, in-4. Enfin. Le Mercure parisien,
contenant ce qui s'est passé de plus mémorable, tant
dans Paris qu'au dehors, depuis la perte de Charenton jusques
à présent. Second ordinaire, sans date,
in-4.
Th.
Pinard
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