Source
: "Le Canton de Blangy sur Bresle autrefois" de Daniel Fauvel,
François Lézé et Denis Louis
Editions Bertout - 4e trimestre 2005
A noter que Denis Louis est natif de St Léger aux
Bois.
Autrefois,
Saint-Léger-aux-Bois était célèbre pour
son clocher penché, sa tour et son équipe de jeu de
tamis.
Comme Richemont et
Réalcamp, ce bourg a connu une moindre dépopulation que
les communes purement rurales et les fêtes y étaient
fort animées. Les anciens du village n'ont pas oublié
les mémorables parties de balle au tamis qui opposaient
l'équipe locale à celle de Mellemont ; quand Georges
Louis, le milieu de corde, ou Henri Martin, le fort du jeu,
recevaient les encouragements des supporters de la
commune.
Les équipes se
composaient généralement de neuf joueurs qui
évoluaient sur un terrain dix fois plus long que large,
souvent matérialisé par les allées de tilleuls
parfaitement taillés, comme à Réalcamp. Une
corde divisait le terrain en deux camps et le jeu s'apparentait
à la fois à la pelote basque et au tennis. Chaque
joueur se fixait au poignet un " tambour ", sorte de chistera
demi-sphérique qui allait lui servir à renvoyer la
balle à la volée ou après le premier
rebond.
L'élégance
était de règle, chacun étant vêtu de blanc
de la tête aux pieds. Les points étaient comptés
comme au tennis. Le " livreur ", serveur normand, envoyait la balle
dans le camp adverse avec son " tambour " mais son homologue picard
utilisait un " tamis " assez semblable à celui d'un
maçon pour effectuer le service. Le marqueur de chaque
équipe plantait des tiges de fer ornées de pompons
bleus ou rouges en fonction des actions de jeu : les dehors, les
buts, les chasses
La partie se gagnait en sept jeux
ordinairement, en quatre jeux dans les grandes compétitions
qui avaient lieu à Eu et à Réalcamp durant le
dernier dimanche de juillet.
'glise
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L'originalité de
l'église, c'est d'abord la flèche effilée et
penchée du clocher, qui est également l'une des plus
élevées de la région. Elle n'a cessé de
connaître des travaux de restauration au cours des deux
derniers siècles. Sur une carte postale de 1918, on voit les
couvreurs à l'ouvrage. L'orage du 6 juin 1917 avait
causé un début d'incendie et des dégâts
importants avaient été constatés par Julien
Darragon, maire de Saint-Léger. Les travaux furent
confiés à l'entreprise Charles Leuillet de
Réalcamp et payés par la compagnie d'assurances
l'Union.
Aujourd'hui, les travaux sont
beaucoup plus spectaculaires puisque le mardi 19 juillet 2005 la
flèche hexagonale du clocher a été
soulevée grâce à une énorme grue qui l'a
suspendue dans les airs avant de la déposer sur le sol,
près de l'église. Les nouveaux travaux de restauration
vont pouvoir commencer. Les touristes disposent de quelques mois pour
venir prendre des clichés de l'église sans
clocher.
Ce cliché
présente une nef bien éclairée, qui fait
contraste avec un chur plus sombre ; ce n'est pas dû
à un cliché de mauvaise qualité mais il s'agit
bien d'une impression très réelle quand on
pénètre dans cette église dont la nef est plus
élevée que le chur. La construction date du
début du XVIe siècle mais les nombreuses statues sont
plus récentes car, lors de sa visite pastorale du 29 septembre
1680, Jacques-Nicolas Colbert avait ordonné que les statues
brisées et indécentes soient enterrées et que
les cabaretiers ne donnent plus à boire pendant l'office
divin.
Ce cliché nous montre
les belles croisées ogivales du chur et l'une des
chapelles du transept dédiée à Sainte Vierge ;
l'autre, invisible sur le cliché, l'étant à
saint Joseph. Aujourd'hui, la grille a été
enlevée et le nouvel autel a été refait en
utilisant les belles boiseries que l'on voit au premier
plan.
e
resbytère
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Le presbytère est une
demeure construire au XIXe siècle, à un étage,
dont le style s'apparente à la mairie et dont l'ornementation
principale est ce fronton triangulaire qui met en valeur la
travée centrale. A la veille de la Première Guerre
mondiale, l'abbé Jean loue la propriété à
la commune et, pour 150 francs par an, il dispose de la maison, de
l'écurie, du cellier, de la buanderie et d'un beau jardin de
17 ares.
Le monument aux morts est
situé près de l'église. Il est fort classique et
a été fourni par Joseph Decostre, marbrier sculpteur
à Aumale. Il a été inauguré en 1922,
Henri Lefèvre étant maire. La Seconde Guerre mondiale a
été tout aussi dramatique car la commune a
été bombardée à cause de l'implantation
de deux bases de V1. Le bombardement du 5 janvier 1944 fit dix-neuf
victimes et, au cours de celui du 9 juillet suivant, trente maisons
furent endommagées.
L'inclinaison du clocher vers
l'ouest est bien visible sur cette carte postale datant de 1911.
L'école communale est cette grande demeure en brique, à
un étage, qui masque une partie de la nef au bout de la rue.
La construction de cette mairie-école a été
confiée en 1853 à Félix Leblond, de Richemont.
La mairie était installée à l'étage, la
classe mixte au rez-de-chaussée. Les annexes servaient de
cellier et de cuisine pour l'école et pour le maître. La
population était alors de 704 habitants.
Cette autre vue permet de
découvrir, sous un angle différent, l'ancienne rue
principale du bourg avec le long tènement de maisons
contiguës qui regroupaient les principaux
commerçants.
Les grandes mares des communes
du plateau sont des créations souvent assez récentes,
destinées à assurer l'approvisionnement en eau. La
grande mare de Saint-Léger-aux-Bois a été
creusée en 1862. On a alors enlevé 147 m3 de terre et
l'alimentation se faisait par ruissellement et par un puits communal.
En 1922, après la grande sécheresse de
l'été 1921, on a procédé à
l'approfondissement du puits, de façon qu'il puisse alimenter
la mare communale sise à proximité. Aujourd'hui,
l'adduction d'eau a rendu son existence moins indispensable et son
nouvel aménagement a surtout une vocation
décorative.
es
afés
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En 1911, on dénombre
encore 11 cafés épiceries à
Saint-Léger-aux-Bois, tenus par les familles Heu, Alexandre,
Amet, Hiesse, Dumont, Fourdrinier, Démarquet et Legay. Vingt
ans plus tard, ils ne sont plus que cinq, et seul Legay fait encore
partie de la liste. On pourra comparer ce cliché à ceux
des pages précédentes qui nous montrent que la famille
Leclercq devint également propriétaire de
l'établissement qui fut important au début du XXe
siècle, car une voiture à cheval partait de cette
auberge pour faire la correspondance avec le tortillard de la ligne
Envermeu-Aumale.
Le Café des Sports
renvoie directement au jeu de balle au tamis. Si les primes offertes
aux vainqueurs étaient minimes, un bon repas était
souvent servi par les sponsors de l'époque, les
commerçants du bourg. Les parties étaient longues et
éprouvantes, certains joueurs se dopaient au vin blanc, voire
même au calvados, au café voisin. Le cyclisme, en plein
essor dans la région, amenait une clientèle au
Café des Sports.
Le Café Hiesse se
trouvait au niveau du croisement des routes conduisant à
Richemont et à Rétonval, aujourd'hui respectivement D
920 et D 116. L'édifice, moderne, en brique, comportait une
partie avec étage. C'était aussi une épicerie et
un salon de coiffure proche de la place des Tilleuls.
Ce cliché a
été pris après la Première Guerre
mondiale, évoquée par les nombreux soldats
alignés devant une maison basse à colombage au pignon
en brique. C'était un ancien café-épicerie qui
faisait la vente du tabac, de draps et de nouveautés. Il
était tenu par la famille Legay.
Pour les liaisons entre les
bourgs, les véhicules hippomobiles sont encore nombreux
à la veille de la Première Guerre mondiale.
Saint-Léger-aux-Bois joue le rôle de carrefour. On y
trouve des correspondances pour la gare du tortillard, et le courrier
de Foucarmont assure la liaison de cette ville jusqu'à
Vieux-Rouen. Il s'arrête devant le Café du Centre, chez
Legay.
a
our
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L'histoire de cette tour est
assez mal connue, ce qui explique les désignations
variées qui ont fleuri sur les cartes postales. La "Tour des
Moines" semble vouloir rattacher cet ancien domaine seigneurial
à l'abbaye de Foucarmont, ce qui n'est certainement pas le
cas. En effet, si on remonte au Moyen-Age, c'était l'abbaye
d'Eu qui présentait à la cure et, à la veille de
la Révolution, Saint-Léger-aux-Bois dépendant du
bailliage d'Abbeville, de l'élection d'Eu et du parlement de
Paris. Au début du XVIe siècle, le domaine seigneurial
était un plein fief de haubert (1) dépendant du
comté d'Eu. La tour a dû être construite à
cette époque par les héritiers de Jacques de
Bailleul.
(1)
Le possesseur
d'un fief de haubert (qu'on appelait aussi plein fief de haubert ou
plein fief de chevalier) était tenu de fournir un homme
d'armes. En Normandie, le plein fief de haubert pouvait être
divisé en huit portions entre filles seulement, et non entre
mâles ; l'aînée rendait foi et hommage pour toutes
les autres. La plupart des fiefs de haubert relevaient
immédiatement du roi.
Source : http://mezidonhistoire.canalblog.com/archives/5___us_et_coutumes/index.html
Cet autre cliché,
postérieur au précédent, a été
pris quelques années après la Première Guerre
mondiale. On voit que la demeure en colombage dispose d'une porte
donnant sur la rue, ce qui n'était pas le cas auparavant. La
cour de la ferme et ses bâtiments n'ont pas changé. La
haute tour en brique reste la même et continue à
intriguer le voyageur qui cherche vainement les autres tours d'un
hypothétique château disparu.
Le photographe avait
manifestement une idée en tête : mettre en
évidence l'inclinaison du clocher en l'alignant à
proximité de la verticalité de la tour de 22
mètres de haut, qualifiée sur ce document de " Tour des
ducs de Mailly ". La seigneurie, le château disparu, la ferme
et ses dépendances ont effectivement appartenu pendant trois
siècles à la famille de Mailly, puis l'ensemble a
été acheté par Antoine Lemire en 1809. Pierre
Lemire fut ensuite pendant plusieurs décennies maire de la
commune. A notre connaissance, les de Mailly n'ont jamais
été ducs mais la confusion vient sans doute du fait
qu'ils rendaient aveu au comte d'Eu, duc d'Orléans.
Les commentaires de cette carte
s'appliquent également à la suivante et on remarquera
le titre erroné qui évoque cette fois-ci les comtes de
Moilly !
La taille des tilleuls de la
place est un autre élément intéressant qui nous
renvoie au jeu de la balle au tamis et à l'histoire de cette
place. En 1816, les héritiers d'Antoine Lemire engagent un
procès contre la commune car ils prétendent
détenir le droit d'ébrancher les ormes de la place
publique. Le maire, Quevallier, et l'un de ses conseillers
municipaux, Pierre Louis, défendent les intérêts
de la commune et, en 1824, les héritiers Lemire sont
condamnés par le tribunal de Neufchâtel ; ils feront
appel et perdront à nouveau en 1826, mais la commune devra
s'imposer extraordinairement pour payer les frais du procès,
et Pierre Lemire sera ensuite élu maire
En 1849, les
derniers ormes sont abattus et le conseil décide de planter 52
peupliers sur la place. Quant aux tilleuls qui ont remplacé
les peupliers, ils ont sans doute été mis en place
durant les dernières décennies du XIXe
siècle.
es
outes
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Ce carrefour a
déjà été évoqué à
propos du café Hiesse et la taille des peupliers dans le
chapitre précédent. Les oies et les canards
étaient soumis à l'arrêté municipal du 13
août 1873, qui interdisait la divagation de tous les animaux et
veillait à maintenir la salubrité des mares. Mais le
garde-champêtre semblait tolérer la circulation des
oies, y compris dans la rue principale du bourg.
Cette carte postale faisait
partie de la collection Amet. Ce patronyme était porté
par les nombreux membres d'une famille très connue autrefois
à Saint-Léger-aux-Bois : l'un était
cafetier-épicier, un autre coiffeur, un troisième
grainetier, et une dame Amet vendait des nouveautés. On ne
manquera pas de comparer cette vue avec celle du café
Heu-Caron.
Saint-Léger-aux-Bois a
toujours été un endroit stratégique, et le bourg
un lieu très prisé des militaires car ici on domine la
vallée de la Bresle et, au-delà, protégeant la
Normandie, la vallée de la Somme. On pouvait se permettre
d'observer l'ennemi depuis la tour des Mailly et le clocher
incliné. Un télégraphe y fut établi en
1822 et, pendant la Première Guerre mondiale, la commune
connut une activité inhabituelle car elle se trouvait juste
à l'arrière du front.
Ces documents datent
généralement des premiers mois qui ont suivi
l'armistice du 11 novembre 1918. Ils témoignent du rôle
des militaires affectés dans cette région. Il
s'agissait d'accueillir les blessés, les prisonniers,
d'assurer l'approvisionnement du front et le défense de la
Normandie, si la Somme et la Bresle avaient été
franchies par une contre-attaque ennemie
Pour découvrir
d'autres cartes postales anciennes du village et
connaître son histoire, de l'antiquité à la
seigneurie des "de Saint Leger"
inon,
merci de fermer l'agrandissement.
https://www.stleger.info