Village
situé entre l'Oise et la forêt de Laigue, à la
limite des anciens diocèses de Noyon et de Soissons,
dépendant de nos jours de l'arrondissement de
Compiègne, Saint-Léger-aux-Bois a d'autant moins de
spécificité architecturale que, situé en zone de
front pendant la Première Guerre mondiale, ayant
été fortement bombardé en 1918, ses maisons,
comme en maintes autres communes du Noyonnais ou du Ressontois,
offrent plus le visage et le style de la reconstruction des
années 1920, avec prédominance de la brique
contemporaine qui s'ajoute au calcaire et à la tuile,
matériaux locaux.
Saint-Léger possède néanmoins, outre la
forêt de Laigue, un édifice remarquable, classé
monument historique juste à la veille du conflit (1), qui en a
souffert et en porte encore les stigmates, mais a
bénéficié d'une belle restauration et
d'embellissements: son église Saint-Jean-Baptiste, ancien
prieuré à l'origine du village, qui est un des rares
édifices religieux de pur style roman conservé dans
l'Oise.
l'ancien prieuré -
l'église Saint-Jean-Baptiste
|
C'est l'édifice autour duquel
s'est formé le village, dont l'origine remonte à la
fondation d'un prieuré par les bénédictins de la
Sauve-Majeure, abbaye fondée par saint Gérard en
Gironde, grâce à la donation d'un morceau de son domaine
par le Roi de France Philippe 1er, arrière petit-fils d'Hugues
Capet, en 1083.
Le souverain ayant accordé aux moines les dîmes,
l'autel, une vigne, le plein exercice de la justice et l'usage de la
forêt sur toute l'étendue du territoire, un
prieuré y fut établi. En raison de la découverte
d'une source en forêt de Laigue, il fut dédié
à Saint-Léger, dont le culte était alors en
pleine expansion, comme guérisseur des aveugles grâce
à l'eau des sources.
A partir de la fin du XIe
siècle, l'abbé de Sauve-Sauveur fit construire des
bâtiments et une église en pierre d'appareil de pur
style roman. En 1108, Philippe 1er, conseillé par son fils, le
futur roi Louis VI le Gros, permit aux moines le défrichement
de la forêt, ce qui fut à l'origine de l'implantation de
la communauté villageoise. En 1190, le Pape Célestin
III conforta le prieuré-abbaye dans toutes ses possessions.
Son expansion et les aléas de l'histoire allaient l'amener
à changer plusieurs fois de main.
En 1590, il passa d'abord sous la dépendance des moines de
l'ordre de Grandmont établis au Francport. Puis, en 1624,
Louis XIII en fit don à son aumônier Michel de l'Arche,
comme prieuré simple.
Tandis que la forêt de Laigue était incluse avec celle
de Retz dans l'apanage d'Orléans institué par Louis XIV
en mars 1661, en faveur de son frère Philippe, le
prieuré de Saint-Léger revenait à Mgr de
Fitz-James, évêque de Soissons. Par son décret de
janvier 1749, il en réunit les biens à ceux du
séminaire diocésain, mais établit en
contrepartie pour la communauté villageoise une cure et un
vicariat à sa collation, dédiant la nouvelle paroisse
en la nef de l'église à Saint-Jean-Baptiste, le choeur
de l'édifice restant consacré à
Saint-Léger et au prieuré, qui conserva jusqu'à
la Révolution ses droits de basse et moyenne justice
seigneuriale.
l'église
Saint-Jean-Baptiste
L'actuelle église
Saint-Jean-Baptiste a été construite à partir de
1083, jusqu'au premier tiers du XIIe siècle, dans un style
roman homogène. C'est un des monuments les plus
représentatifs de cette architecture dans le bassin
supérieur de l'Oise, d'autant qu'il est un des rares à
n'avoir pas subi de modification profonde au fil des agrandissements
et restaurations.
La nef a été en effet replafonnée au XVIe
siècle, la charpente du clocher reconstruite en 1636, les
collatéraux en partie refaits en 1602 et 1789 (2).
Après les dégâts de la Première Guerre
mondiale, dont on peut encore voir extérieurement la trace par
des éclats d'obus et de balles, mais qui n'avaient pas
touché le gros oeuvre, la façade et le clocher ont
été refaits, Plus récemment, des travaux de
réfection des toitures, de traitement contre l'humidité
ont été réalisés, de nouveaux vitraux
installés, grâce à l'action de l'Association des
Amis de l'église, qui a su trouver les financements
nécessaires.
fenêtre romane de la
façade de l'église de Saint-Léger-aux-Bois
à la fin XIXe
La sobre façade occidentale a
conservé son allure d'origine, surtout dans la partie centrale
encadrée par deux contreforts plats, où l'archivolte du
portail central en plein cintre (repris au XVIIIe siècle), se
prolonge par un bandeau horizontal décoré de billettes.
Il est surmonté par une large fenêtre, dont l'arcade
ornée de rayons est dessinée par un gros boudin,
s'appuyant sur des colonnettes trapues. Un bandeau identique à
celui du portail traverse la façade en passant au dessus de la
fenêtre.
Le chevet est remarquable par la compartimentation des masses
juxtaposées typiques du roman, avec l'abside et les absidioles
arrondies en cul de four, la travée droite du choeur plus
élevée, et le "transept bas", situé au
même niveau que l'abside centrale. Les corniches sont sobrement
décorées par de discrètes ondulations, et
l'ensemble de la construction étayé par de simples
contreforts plats.
A l'intérieur, les cinq travées du vaisseau central de
la nef, couverte d'un plafond et éclairée par une
série de baies vitrées en plein cintre au dessus du
seul latéral gauche, communiquent avec les deux
bas-côtés par de grandes arcades en plein cintre
reposant sur des piles rectangulaires sans chapiteaux ni tailloirs.
La nef s'ouvre par un grand arc sur le "transept bas" donnant sur le
choeur, terminé par les trois hémicycles de l'abside et
des deux absidioles, qui prolongent chacun des vaisseaux de la
nef.
Le clocher en charpente (reconstruit au XVlIe siècle),
surmonté d'une flèche coiffée d'une croix et
d'un coq, contient les cloches installées en 1860-1862 sous
l'égide du curé de Saint-Léger LE BEAURAIN, et
de son confrère GILLES, doyen de Ribécourt,
remplaçant les quatre cloches bénies en juillet 1769
par le curé DIDELET (3), et descendues sous la
Révolution.
l'église romane de St
Léger aux Bois - carte signée M.
Féron
Le mobilier de l'église
comporte plusieurs oeuvres d'art intéressantes : des fonts
baptismaux, avec cuve octogonale sur un socle de même forme ;
plusieurs statues en bois polychrome, du XVIe au XVIIIe siècle
(une Vierge à l'enfant et un Saint Sébastien
du XVle, un Saint évêque, et un Christ en
croix) ; un chemin de croix en fonte datant du XIXe
siècle, qui mériterait une bonne restauration ; enfin
une belle série originale et homogène de vitraux du
peintre verrier Jean GRUBER.
Ils représentent : sur la façade au-dessus de la
tribune, Saint Michel terrassant le dragon et plus bas
l'agneau pascal ; dans le choeur, Saint-Jean
l'évangéliste au pied de la croix ; à
droite, la décollation de Saint-Jean
Baptiste.
L'église était
autrefois entourée par le cimetière, qui était
fermé par des haies vives, et dont l'emplacement est
rappelé par un calvaire. A proximité se trouvaient deux
moulins appartenant au prieuré, qui servaient à
l'exploitation du chanvre et au travail du bois de la
forêt.
Elle constitue véritablement
l'âme du village, dont elle occupe près de 80 % de la
surface, et son premier atout naturel, étant une des plus
belles du département et de la région.
Restée jusqu'à Henri IV, pour sa plus grande partie,
indivise entre les détenteurs du fief d'Offémont et le
domaine royal, rachetée par le roi, elle fut donnée en
apanage par lettres patentes du 10 mars 1661, à Philippe, duc
d'Orléans, frère de Louis XIV, restant dans sa
descendance jusqu'à la Révolution.
Forte de 7000 arpents, elle était alors exploitée en
taillis, pour le bois de chauffage et comme réserve de chasse
princière, placée sous l'autorité d'une
maîtrise particulière des Eaux-et-Forêts, qui
avait son siège à Compiègne.
Devenue forêt domaniale depuis 1791, gérée par
l'ONF, sa superficie actuelle est de 3827 hectares (4). A
l'écart des grandes voies de communication, avec ses sols
argileux et humides, comportant davantage de taillis que de futaies,
elle a conservé un caractère naturel et sauvage plus
marqué que celle de Compiègne.
Dans cette forêt, on peut
trouver deux intéressantes maisons forestières
(lieux d'habitation des anciens gardes forestiers) : celle de
Montmacq et celle du Puits d'Orléans, qui marquaient
pendant l'Occupation l'entrée du dépôt de
munitions.
Placée en un carrefour stratégique de la forêt,
cette dernière tire son nom du legs de 1661 en faveur de
Philippe, duc d'Orléans. L'ancienne construction à un
étage du XIXe siècle a été totalement
ravagée par un bombardement lors de la Seconde Guerre
mondiale, avant d'être reconstruite telle qu'on la voit
aujourd'hui.
La forêt offrant de nombreuses
ressources végétales et animales,
Saint-Léger-aux-Bois a donc été, depuis toujours
et en tous temps, un grand rendez-vous de chasse...
Depuis l'époque des rois mérovingiens qui aimaient
venir chasser sur les terres encore vierges qu'était alors
Saint-Léger, jusqu'aux scènes de chasse à courre
du milieu du siècle dernier, il n'y a qu'un pas... et il n'y
avait alors qu'un lieu de rendez-vous... la place du Quennezil
pour le départ... mais aussi pour l'arrivée et le
réconfort dans son ancien restaurant !
Après les légitimes
fiertés locales, invitons-nous à visiter le village,
rue par rue... Et commençons par. . .
Autrefois appelée place du
Calvaire, elle constituait la place centrale du village, sur laquelle
certaines fêtes villageoises avaient lieu. On constate encore
aujourd'hui la présence ancienne de cette place, puisqu'une
série de maisons est légèrement en retrait de la
route principale. En revanche, les nouvelles maisons et constructions
plus récentes sont à proximité de la
route.
la place du
Calvaire
Cette rue est une partie de ce que
les Saint-Giotains avaient coutume d'appeler la "Grande Rue". Cette
voie, qui est devenue la route départementale 165, compte une
des plus grandes bâtisses du village ; longtemps appelée
la villa du Gué, en raison de la hauteur qu'elle offrait pour
observer les environs de Ribécourt l Cette bâtisse,
visible sur toutes les photos anciennes, l'est encore aujourd'hui.
(7, rue de Noyon)
la villa du
Gué
Cette partie de la "Grande Rue" a
été relativement épargnée pendant la
Première Guerre mondiale, bien que le front se situât
sur Bailly. Elle a joué un rôle très important
dans la Seconde guerre mondiale, puisqu'elle permettait
l'accès au dépôt de munitions.
Cette rue possédait le bureau de poste, qui avait aussi une
fonction de café (aujourd'hui devenu maison d'habitation, au
n° 10 de la rue), ainsi que le Chalet Gabriel, la plus
grosse bâtisse du village, en style néogothique typique
de la fin du XIXe siècle. Elle a été un poste
d'observation fort intéressant pour l'armée allemande
(au second étage de cette construction, on voit jusqu'à
Ribécourt). Aussi les occupants avaient investi cette grande
maison pour stocker toute la partie administrative de l'armée
locale.
Grande Rue de
Saint-Léger-aux-Bois et Chalet Gabriel
Grande Rue, après la
reconstruction d'après la Première
Guerre
la rue et la place du
Quennezil
|
Véritable lieu de rendez-vous
du village, compte tenu de sa situation et de ses attraits (plus
grand commerce du village, bar, départs de chasse à
courre
), cette place s'est longtemps appelée place de
la République, jusqu'à ce que le patrimoine et la
langue picarde en aient raison.
En effet, cette place est (re)devenue place du "Quennezil", en raison
de sa proximité à la forêt et des chants ("
quenne " en patois picard) des oiseaux (" zil ", toujours en
patois).
Cette place a donc toujours été un point
névralgique du village, puisque la grande bâtisse (le
n° 4) de la place a été un hôtel, puis tour
à tour une épicerie, une mercerie, un restaurant, un
débit de tabac, une charcuterie, une salle de bal et
même une écurie dans les années 1950, avant de
devenir une discothèque (années 1965 à 1980)
puis un piano-bar, et enfin redevenir simple maison d'habitation.
Cette place a aussi longtemps été celle de la
fête patronale.
la place du
Quennezil
Autrefois appelée rue de la
Fabrique - le nom provenant de la fabrique de balles et de jouets
d'enfants BERNARD - ou encore rue d'Enfer (origine inconnue), cette
voie a finalement pris le nom de rue des Étangs, puisqu'elle
mène directement aux sept étangs situés en
bordure de l'Oise, qui offrent un cadre naturel extraordinaire.
Cette rue, durant la Seconde Guerre mondiale, a abrité
notamment la GESTAPO et l'atelier mécanique de l'armée
allemande.
La GESTAPO était logée dans une maison ancienne,
devenue une boucherie par la suite (n° 6 de la rue) et l'atelier
mécanique était situé dans la maison que l'on
voit en construction sur une carte postale d'époque,
achevée en 1910, portant aujourd'hui le n° 5 de la
rue.
la rue d'Enfer au début du
XXe siècle
Autrefois rue du Château, en
raison de son accès aux "Croisettes", une des immenses
constructions du village qui se situent au croisement de plusieurs
routes de forêt et du village, assimilée par les
riverains au château local (ancienne faisanderie), elle est
devenue la rue du Moulin, en raison de la présence de deux
moulins, situés à proximité de l'église,
qui servaient à la culture du chanvre, mais dont aucune trace
n'a jamais été retrouvée.
la rue du
Moulin
La rue du Marais tient son nom des
anciens marais qui se situaient au niveau de l'actuel centre
équestre. D'ailleurs, lors de pluies et averses abondantes ou
répétées, on peut observer encore certains
endroits marécageux.
Le Hameau de Flandre était
autrefois un "pâté" de maisons littéralement
indépendant du village. Sur de nombreux plans anciens, on
remarque bien distinctement Saint-Léger et La Flandre.
Aujourd'hui, il y est totalement relié par de nouvelles
constructions et le hameau isolé fait désormais partie
intégrante des rues du village.
carte ayant voyagé en
1910
Il existe cinq autres rues : de
l'Église, du Père Licourt, des Demoiselles, du Tour de
Ville et le square Maurice Lancel.
La rue des Demoiselles tire
son nom de libellules. En effet, non loin de cette rue, on peut
retrouver l'Oise et quelques étangs alentour, avec la
présence de grosses libellules appelées
demoiselles.
la rue des
Demoiselles
Le square Maurice Lancel a
été inauguré en 1994, en mémoire d'un
Résistant saint-giotain. Né le 31 juillet 1909 à
Servais (Aisne), membre du Parti Communiste et du premier groupe de
l'OS d'André DUMONTOIS dans le Noyonnais, il fut
arrêté le 6 octobre 1941 par la police de Vichy,
déporté, déclaré mort à Gusen
(Autriche) le 8 avril 1945.
L'origine du nom de la rue du
Père Licourt reste inconnue.
La rue du Tour de Ville, qui a
vu le jour dans les années 1960 fut ainsi nommée car
elle faisait la jonction entre la rue du Quennezil et celle des
Demoiselles, elle concluait le tour du village.
la rue du Tour de
Ville
(1) Par l'arrêté du 15
janvier 1914 du Ministre de l'Instruction Publique et des Beaux-Arts,
"La Gazette de l'Oise" 25 janvier 1914. Date de protection, par
arrêté du 30 décembre 1913, N° notice
PA00114864
(2) Louis GRAVES, "Description du canton de Ribécourt, 1839,
notice sur Saint-Léger-aux-Bois", rééd. Res
Universalis, 1991 - Philippe BONNET-LABORDERIE, "Guide Castermann,
Oise" 1997, Tournai, notice sur l'église de
Saint-Léger-aux-Bois, p. 259
(3) A.D. Oise, registre paroissial de Saint-Léger-aux-Bois,
juillet 1769
(4) Notice ONF, carte IGN 1/250000 des forêts de
Compiègne et de Laigue, 1984. François CALLAIS, "A la
découverte des forêts de Compiègne. Laigue et
Ourscamp-Carlepont", Société historique de
Compiègne. 1998
de
Saint-Léger-aux-Bois
à La
Chanvrière
(1789-1799)
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Saint-Léger-aux-Bois
dans la Première
Guerre
mondiale
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la
Grande Guerre, vue par
Maurice
Bonnart
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nos
soldats de la Grande
Guerre "Morts pour la
France"
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La
Seconde Guerre mondiale
et l'Occupation à
Saint-Léger
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de fermer l'agrandissement sinon.
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