1897 - l'incendie du azar de la harité
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le château de Rigny de nos jours
Née à Tours en
1850, Jeanne Emilie Odart de Rilly dOysonville grandit
non loin des bords de Loire. Mariée en 1870
à Édouard Haward de La Blotterie,
sous-préfet, elle accompagne son époux au
gré des ses affectations Loudun, Issoudun,
Fontainebleau, Douai avant de devenir préfet
des Landes puis de lAveyron. Partageant son temps entre
Paris et le Poitou, elle rejoint la capitale quelques jours
plus tôt pour assister à cet
évènement mondain. Ce mardi 4 mai 1897, toute
la bonne société parisienne se presse rue Jean
Goujon, entre la Seine et les Champs Elysées, pour le
fameux Bazar de la Charité fondé en 1885. Vers 16h15, la lampe
à éther du cinématographe
sembrase. Rapidement, les flammes se propagent aux
décors, aux toiles peintes et à la charpente
du hangar de bois. La comtesse de la Blotterie
meurt étouffée dans lincendie. Sa
disparition laisse un époux et quatre filles
affligés. Sa fille aînée,
Andrée, entra dans la compagnie des Filles de la
Charité de Saint Vincent de Paul. Bulletin
municipal paru en janvier 2019 |
le château de Rigny - ©Francis Gardeur - http://photovuduciel.com
Le domaine, après
avoir appartenu aux Aubineau pendant un peu plus de 100 ans,
passa vers la moitié du XVIIIe siècle aux
Bunault. Né en 1752 au château de Rigny,
Charles-Louis Bunault termina sa carrière militaire
comme maître de camp. Il participa, en 1789, à
l'assemblée de la noblesse du Poitou, émigra
en 1791, servit à l'armée des Princes et fut
nommé Prévôt d'Angers en 1816. En son
absence, le château fut occupé par les
Vendéens qui, en 1793, y entreposèrent des
vivres saisis à Thouars, notamment de la
farine. Le 4 mai 1897, la comtesse
Jeanne Marie Haward de la Blotterie, née Odart de
Rilly, épouse d'un ancien préfet, fut à
Paris l'une des 100 et quelques victimes du tragique
Incendie du Bazar de la Charité, association
philanthropique présidée par la comtesse
d'Alençon, sur de l'impératrice
Elisabeth d'Autriche." Histoire des
communes des Deux-Sèvres - le Pays Thouarsais 4 mai 1897 article de http://www.lepoint.fr,
signé Frédéric Lewino et Gwendoline Dos
Santos, en date du 4 mai 2015 "La duchesse
d'Alençon, épouse du petit-fils de
Louis-Philippe, périt avec 125 membres du gotha
parisien lors d'une vente de bienfaisance. En fin d'après-midi,
ce 4 mai 1897, une odeur de chair grillée se
répand dans le 8e arrondissement de Paris. Cette
odeur horrible odeur provient d'un incendie qui embrase le
Bazar de la Charité, au 17 de la rue Jean-Goujon,
où se déroule une réunion de
bienfaisance. Le hangar en bois de 1 000 m² abritant la
vente s'est brutalement enflammé, piégeant
toutes les dames de la haute dont les longues robes se
transforment en torches. Hurlements de terreur !
Sauve-qui-peut général ! Agonies terribles !
Qui sème la charité récolte
l'incinération. Et Dieu dans tout ça ? Comme
d'habitude, il tourne pudiquement les yeux
ailleurs... Pourtant, cette
journée avait merveilleusement bien
débuté. Dès le matin, la foule de
précipite dans le Bazar où les architectes ont
reconstitué une rue de Paris au Moyen Âge, avec
ses éventaires, ses échoppes aux enseignes
farfelues, ses étages en trompe-l'oeil et ses murs
tapissés de feuillages et de lierres. Les enseignes
rappellent les temps anciens : "À la truie qui
file", "Au lion d'or", "Au chat
botté"... Au total, 22 stands
proposent lingerie, colifichets et objets en tout genre
collectés pour la grande vente. Tous les
bénéfices doivent être reversés
aux pauvres, aux invalides, aux orphelins. En début
d'après-midi, le hangar se remplit à vue
d'oeil, près de 1 200 personnes sont
déjà là. Surtout des femmes qui
adorent, une fois par an, donner un peu de leur fric pour
soigner leur réputation. Rien de nouveau sous le
soleil. On reconnait Son Altesse Royale la duchesse
d'Alençon, épouse du petit-fils de
Louis-Philippe Ier, soeur cadette de Sissi
l'impératrice. Mais aussi la duchesse de
Vendôme, la duchesse d'Uzès, la marquise de
Saint-Chamans, la comtesse Greffulhe, la
générale Février, la marquise de
Sassenay, Carla Sarkozy, Valérie Trierweiler... Bref,
tout le gratin, la jet-set française. L'allumette
fatale Pour ravir les aristos, le
baron de Mackau, président de l'organisation
caritative, a cru bon d'accueillir le tout nouveau
cinématographe des frères Lumière.
Chouette ! La salle de projection est installée dans
une sorte d'appentis en bois, adossé au hangar,
où, pour cinquante petits centimes, on peut assister
à la projection de "La sortie des usines
Lumière à Lyon", de "L'arrivée
du train en gare de La Ciotat" et de "L'arroseur
arrosé". Seulement voilà, l'entrepreneur
Normandin, chargé des représentations
cinématographiques, fait la gueule. Depuis deux
jours, il se plaint du réduit mis à sa
disposition pour abriter l'invention du siècle, alors
qu'un espace immense est consacré à la vente
de ces fichus chiffons de bonnes femmes. À peine
a-t-il assez de place pour loger ses appareils, ses bidons
d'éther, ses tubes à oxygène, ses
boîtes, ses bouteilles, tous très inflammables.
Il s'est même demandé à un moment si le
projectionniste et son assistant n'allaient pas finir sur
les genoux des spectateurs. Peu après 16 h, la
duchesse d'Alençon confie à une de ses
voisines, Mme Belin : "J'étouffe..." Celle-ci
lui répond : "Si un incendie éclatait, ce
serait terrible !" Elle brûle sans le savoir :
moins d'une demi-heure plus tard, dans la cabine du
cinématographe, la lampe du projecteur qui
brûle de l'éther est à sec. M. Bellac,
le projectionniste, entreprend de faire délicatement
le plein quand son assistant, Grégoire Bagrachow - un
ancien bonze tibétain - ne trouve rien de mieux
à faire que de craquer une allumette. Erreur fatale.
Les vapeurs d'éther s'embrasent
instantanément. Les deux acolytes tentent
péniblement de contenir les flammes. Autant demander
aux eaux de la mer Rouge de reculer. Effondrement Le duc d'Alençon, qui
accompagne son épouse, est discrètement
alerté de l'incendie. Aussitôt, il commence
à faire évacuer des centaines de personnes par
l'entrée principale. Soudain, un rideau du hangar
prend feu. En quelques secondes, les flammes se propagent
à tout ce décor fait de bois blanc, de carton
et de velum goudronné, agrémenté de
tapisseries, de tentures, de dentelles, de rubans. Que de
belles textures pour ravir les flammes ! Le calme cède
à la terreur. Les femmes se prennent les pieds dans
leurs longues robes, celles qui tombent finissent
piétinées par la horde de fuyards hurlants qui
se précipitent vers la sortie. Le hangar se
transforme en brasier. Certains invités, voyant la
sortie totalement bouchée, rebroussent chemin pour
essayer de s'enfuir par la cour intérieure. C'est le
cas de la duchesse d'Alençon, qui a voulu rester pour
aider quelques personnes à sortir. Mais la cour se
révèle un mortel cul-de-sac, car elle donne
sur les cuisines de l'hôtel du Palais, dont toutes les
fenêtres sont dotées de barreaux. Les
cuisiniers parviennent à en desceller quelques-uns,
permettant ainsi à une poignée de personnes de
s'échapper. À l'intérieur du hangar, le
faux plafond en velum goudronné s'effondre
enflammé sur la foule. Un plombier nommé
Piquet et un vidangeur nommé Dhuy, passant par
là, se précipitent courageusement dans le
Bazar de la Charité pour secourir de nombreuses
femmes et des enfants. "Deux bras se tendaient vers moi.
Je les saisis, mais il ne me resta dans les mains qu'un peu
de peau brûlée et un doigt" racontera
Piquet au Petit Journal. Ceux ou celles qui sont
restés piégés à
l'intérieur se transforment en torches vivantes et se
tortillent avant de tomber au sol, carbonisés au
milieu des décombres calcinés. Quinze minutes
après le début de l'incendie, l'édifice
s'effondre déjà. Peines de prison avec
sursis À l'extérieur,
les pompiers s'efforcent d'éviter que l'incendie ne
se propage aux bâtiments voisins. Dans la foule
épouvantée, le duc d'Alençon cherche sa
femme. En vain. Elle n'a pas réussi à
s'enfuir. Son corps méconnaissable sera
authentifié ultérieurement grâce
à sa sublime denture et à un bridge en or. Ce
jour-là, faire la charité coûte la vie
à 126 personnes et des brûlures graves à
plus de 250 autres. Les victimes sont essentiellement des
femmes. Alors qu'au moins deux cents beaux mâles se
pavanaient dans le Bazar, les victimes masculines se
comptent sur les doigts d'une seule main ! Et encore, il
s'agit de trois vieillards, d'un portier de 12 ans et d'un
médecin. Les autres n'ont pas hésité
à piétiner ces dames pour s'en sortir
vivants. Les lâches ! Les journaux à grand
tirage s'emparent du drame, glorifiant les deux ou trois
véritables héros et ironisant sur tous les
autres, les "chevaliers de la Pétoche" ou les
"marquis de l'Escampette". C'est comme si Brad Pitt
s'était tranquillement barré sur la pointe des
pieds en laissant cramer son Angelina Jolie dans le Bunker
du Festival de Cannes en proie aux flammes.
Impensable. Une fois le gratin roussi,
on cherche le coupable. Les conspirationnistes
débordent comme toujours d'imagination. Pour
certains, c'est un attentat perpétré par un
pays étranger. Pour d'autres, c'est forcément
la faute d'un juif. Le pauvre Michel Heine, qui a
gracieusement mis à disposition son terrain pour
accueillir le Bazar de la Charité, est montré
du doigt. La calomnie est de très courte
durée. Les causes de l'incendie sont formellement
établies après l'interrogatoire des
employés des frères Lumière, qui
avouent leur maladresse. En août suivant, ils
écoperont tous deux de peines de prison, mais avec
sursis, car ils ont eu une attitude très courageuse
pour sauver des vies pendant l'incendie. C'était
quand même la moindre des choses." |
complément - article de la ouvelle épublique
dessin du château de Rilly
l'acte de décès de la comtesse
le caveau de la famille Haward de la Blotterie
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