Chef-lieu
de canton à l'est du mont Beuvray, Saint-Léger se
trouve construit sur un plateau assez étroit entre la
vallée du Méchet au nord et le vallon de l'étang
de Poisson au sud.
chaume du Mont Beuvray - le
panorama http://www.panoramio.com
La topographie et l'histoire lient
étroitement Saint-Léger et le Beuvray qui est un des
hauts lieux de la civilisation gauloise. La puissante place
fortifiée des Éduens a été
fouillée par J.-G. Bulliot sous le Second Empire. Sur le
chaume du mont Beuvray, le promeneur jouit par beau temps d'un
panorama fort étendu ; il constate la présence d'une
table d'orientation, d'une chapelle construite en 1873 et
consacrée en 1876, d'une croix montrant saint Martin donnant
son manteau à un pauvre, d'un monument érigé
à la mémoire de Bulliot ; il se promène enfin
sous une hêtraie admirable dont chaque arbre est un chef
d'oeuvre à lui seul. Mais il ne découvre rien du fameux
oppidum, ne voit aucune trace de fouilles et doit admettre la
présence du rempart gaulois, dit fossé du Beuvray,
à mi-côte, sans être certain de ne pas se trouver
devant une dénivellation naturelle. Toutes les constructions
et la plupart des objets exhumés ont été
réenfouis avec l'accord des propriétaires du terrain et
Beuvray a repris l'apparence d'un lieu banal oh rien ne se serait
passé. Quelques pièces seulement, offrant un
particulier intérêt archéologique, ont
été déposées au musée des
Antiquités Nationales, à Saint-Germain-en-Laye, ou au
musée Rolin d'Autun.
la forêt du Mont Beuvray
http://www.panoramio.com
L'historien de Bibracte doit donc lire
beaucoup, se rendre à Autun et dans le département des
Yvelines ; mais heureusement le simple amateur trouve
déjà de quoi satisfaire une partie sa curiosité
à Saint-Léger, dans une salle de la mairie. Il y
rencontre, à côté de la carte dressée en
1869 par le vicomte d'Aboville, une photographie aérienne
prise en 1955 pour l'Institut géographique national, sur
laquelle surgit à nouveau le tracé des fouilles. Une
vitrine contient de nombreux débris de poteries celtiques et
italiques, des fragments de mosaïques romaines, des
pièces de monnaie, des morceaux de fiches en fer venant du
rempart. Le petit musée possède encore la moule d'un
moulin à bras, des poteries gauloises trouvées
brisées et qui ont été reconstituées, en
particulier une marmite à trois pieds, et surtout deux belles
amphores découvertes en 1956, lors des travaux
d'aménagement de la route traversant le mont. Semblables
à celles trouvées en Méditerranée sur les
épaves des navires romains, elles démontreraient, s'il
en était besoin, le goût des habitants de la Gaule
indépendante pour les vins importés. Les marchands
italiens réalisaient alors de scandaleux
bénéfices dans ce commerce : acheminées par eau
jusqu'à Chalon, puis par chariots et porteurs, les amphores
exhumées au Beuvray ont toutes le col tranché, seul
moyen d'enlever proprement la fleur formée sur le vin au cours
du long trajet.
Ce que possède la mairie de
Saint-Léger demeure évidemment fort modeste, mais il
convient de reconnaître que le sous-sol de la commune n'a
jamais été méthodiquement fouillé ; on
est donc seulement informé d'une faible partie des
découvertes faites sur place, les "inventeurs" (laboureurs ou
maçons) évitant généralement toute
publicité à ce sujet.
Cela ne suffit peut-être pas à
faire revivre en esprit la grande ville qui exista sur le mont
Beuvray avant la venue des Romains et dont, selon la légende,
on entendait jadis crier les portes sur leurs gonds jusqu'à
Nevers chaque fois qu'on les ouvrait. Ces témoignages
épars ne provoquent pas moins chez quelques-uns de plaisantes
rêveries rétrospectives.
Andrée
Cotillon est le témoin-surprise du procès
intenté par l'inspecteur Pierre Bonny au magazine
Gringoire en février 1935 pour diffamation.
Ses déclarations accusant Bonny de tentative de
chantage à son endroit font sensation - photographie
illustrant l'article "Bonny arrêté" dans
"Police magazine" du 9 décembre
1934
|
L'héritière
des 40 rois, fusillée puis
réhabilitée
|
Charmant mais modeste chef-lieu de canton,
à l'écart des grandes voies de passage et des grands
centres urbains, Saint-Léger occupe curieusement une place
dans l'histoire secrète de la Troisième
République. Mademoiselle Cotillon vécut au Pomeret,
écart du bourg sur la route du Beuvray. Cette
mystérieuse personne y avait été placée,
enfant, par l'Assistance publique ; elle prit la fuite à
l'âge de treize ans. Des années plus tard, on la
retrouve portant plainte pour chantage contre "le premier policier
de France", selon le président du Conseil des ministres,
l'inspecteur Bony, bien connu pour son rôle dans le drame de la
Combe aux Fées (l'affaire Prince), et à l'occasion du
"suicide" du financier Stavisky. Mlle Cotillon gagne son
procès, le policier est révoqué. Les recherches
généalogiques entreprises par elle sur ses origines la
conduisent jusqu'à l'année 1845 du registre des
décès de Delft : son aïeul aurait
été Guillaume Naundorff qui se disait Louis Charles de
Bourbon, duc de Normandie, encore connu sous le nom de Louis XVII,
fils de Louis XVI et de Marie-Antoinette - "une histoire à
foutre par terre la République" avait dit Clemenceau.
Princesse de Bourbon ou non, Mlle Cotillon sera condamnée par
un tribunal spécial et fusillée en 1944.
Arrêté sous l'uniforme allemand, l'inspecteur Bony sera,
la même année, condamné à mort et
exécuté. Après la cessation des
hostilités, la Cour de Bordeaux jugera qu'aucun des faits
reprochés à Mlle Cotillon ne pouvait être retenu
et sa mémoire sera réhabilitée. Il n'en ira pas
de même pour celle de l'inspecteur de la police
judiciaire.
Andrée
Cotillon - ici en 1935 à la devanture de son
établissement "Chez Mlle Cotillon", au 52 bd
des Batignolles) est connue pour avoir été
notamment charcutière aux Batignolles, barmaid,
danseuse légère, tenancière de
bar-restaurant et présidente du Cercle d'Iéna.
"Sans doute désespérée de porter un
nom aussi roturier", elle achète en 1937 au
prétendu prince Charles Louis Mathieu de Bourbon
Naundorff une reconnaissance en paternité qui lui
permet d'arborer le titre fantaisiste de princesse.
Procédurière, elle n'intente pas moins de 12
procès divers entre 1932 et 1937. Après avoir
été rançonnée semble-t-il par la
bande Lafont-Bonny en 1943, elle finit
exécutée en 1944 par la Résistance pour
collaboration.
source
et lien pour en savoir plus sur Mlle Cotillon et Pierre
Bonny : https://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre_Bonny
|
Présence des
extra-terrestres
|
Doit-on enfin, dans l'histoire de
Saint-Léger, tenir compte de certains phénomènes
extra-terrestres survenus au cours des années 1953-1954 ?
Le 17 août 1953, par un temps clair, un
objet non identifié, sorte d'aéronef géant ou
d'étrange ballon-sonde, demeura stationnaire dans le ciel plus
de douze heures. Observé par un témoin avec une lunette
grossissant vingt fois, "il avait l'aspect d'un anneau d'une
certaine épaisseur, présentant deux taches très
brillantes diamétralement opposées". Nouveau
passage d'une "soucoupe volante" le 9 janvier 1954 entre 6
heures et 8 heures du matin, et dans la soirée du 10 novembre
de la même année. Les témoins, ce dernier soir,
virent comme un "phare braqué" en direction de la
terre, un faisceau lumineux découpant dans la nuit une surface
d'environ vingt mètres carrés, se
déplaçant lentement sans aucun bruit, variant
d'intensité, puis disparaissant après un
moment.
Les habitants de
Saint-Léger-sous-Beuvray, au demeurant, ne semblent point
tirer vanité de l'antiquité des lieux où ils
vivent, non plus que des phénomènes étranges qui
s'y produisent ou des énigmes historiques dont le souvenir
reste attaché à l'endroit. A peu près seul dans
le bourg, M. Taron, responsable du musée de la mairie,
consacre à l'histoire locale le meilleur de son temps et
l'essentiel de cette notice est dû à son
érudition et à sa bienveillance.
l'oppidum de Bibracte http://www.panoramio.com
La route de Saint-Léger à
Moulins-Engilbert monte jusqu'au lieu-dit Croix du Rebout (il
n'y a plus de croix) où, sur la gauche, débouche,
taillée au bulldozer, la nouvelle route carrossable du
Beuvray. Elle suit, pour l'essentiel, le tracé de
l'ancienne voie celtique coupant le mont en deux parties à peu
près égales ; la principale voie d'accès
à l'oppidum de Bibracte est ainsi devenue une route pour
automobilistes en promenade, et le sens unique imposé favorise
plus l'étude comparée des tournants pris avant ou
après avoir changé de vitesse que l'observation
archéologique. Aussi auront-ils franchi à peu
près certainement sans s'en rendre compte le rempart qui se
développait autour de Bibracte sur 5 kilomètres environ
et enfermait les 135 hectares de la cité. De ce rempart et de
la porte du Rebout (principale entrée de l'oppidum), il est
vrai, il n'y plus guère de traces.
A un mètre en avant de la muraille,
laissant ainsi une sorte d'étroit chemin de ronde, un
fossé de 5 à 6 mètres de profondeur et de 11
mètres de largeur avait été creusé, sauf
en quelques points de plus facile défense. Le rempart, qu'on
peut supposer haut de 5 mètres et épais de 3, avait
demandé une somme énorme de travail, mais
résistait également au bélier et au feu ; sous
sa protection, les Éduens pouvaient se croire inexpugnables.
La porte du Rebout était défendue sur chacun de ses
côtés par un épaulement se terminant par un coude
rentrant en dedans à angle droit et formant couloir. Un
fossé se détachant vers l'avant formait saillie et une
tour rectangulaire protégeait l'ensemble. Une deuxième
porte, donnant un dégagement au sud-ouest, a été
retrouvée : il avait fallu élargir le passage et le roc
porte encore la marque de l'outil gaulois. Après quelques
sondages entrepris en 1865, les véritables fouilles
commencèrent deux ans plus tard sous la direction de Gabriel
Bulliot et avec l'appui financier de Napoléon III ; elles se
poursuivirent sous la Troisième République, toujours
menées par Bulliot, puis par son neveu, Joseph
Déchelette.
Près de la porte du Rebout, Bulliot
laissa au jour, sur quelques mètres, à gauche de la
route, la base du rempart. On y voit encore le vide laissé par
les traverses pourries. Une épaisse couche de terre recouvre
les restes du rempart rasé. Au début de notre
siècle, il était possible, écrit
Déchelette, de faire "sans difficulté" le tour
de l'oppidum.
Les fouilles de 1869 ont
révélé, dès le rempart franchi,
l'emplacement de petites habitations, en groupements serrés,
tout le long et de chaque côté du chemin, sur 500
mètres environ. Les murs en pisé, de 30
centimètres d'épaisseur, étaient soutenus par
des châssis de bois élevés sans aucun souci de
l'angle droit. Il s'agissait de demeures de forgerons, de fondeurs et
d'émailleurs. Leurs ateliers - de 82 mètres d'un seul
tenant - se trouvaient un peu plus haut. La quantité de
monnaies gauloises trouvées indique l'activité de ce
quartier industriel. Bulliot exhuma des débris d'outils :
creusets, polissoirs, pierres à aiguiser, tenailles,
enclumes... gisant généralement le long des murs sur
l'aire durcie par le feu. Parfois, l'urne cinéraire du
forgeron se trouvait à la place occupée auparavant par
l'enclume. Dans certains ateliers, des fours à minerai de 90
centimètres de diamètre intérieur, en moellons
bruts, protégés du feu par 20 centimètres de
terre réfractaire, étaient groupés par quatre ou
par cinq; des scories lourdes gisaient alentour, ou collées
aux parois intérieures, ainsi que des buses et quelques
lingots de fer. Un aqueduc de un mètre dix de hauteur et de
soixante centimètres de largeur amenait l'eau dans ce
quartier. L'aménagement de la route en 1956, en mordant de
quelques décimètres sur le talus de gauche, mit au jour
une poterie brisée, en terre grise, contenant un fragment
d'omoplate portant une inscription en lettres grecques. A
côté furent trouvées deux anses d'amphore avec la
marque de leur fabricant romain, en caractères latins, ainsi
que sept petites tablettes rouges et blanches sans trace d'usure, qui
seraient peut-être un surplus de pavage. Un peu plus loin, sur
la gauche, avec l'amorce d'un terrassement, fut découvert un
dépôt d'amphores : en 1956, une vingtaine furent
trouvées, soigneusement décapitées.
http://www.nievre-tourisme.com
Le chemin herbeux venant de L'Échenaud
que l'on rencontre bientôt sur la droite délimite avec
le rempart et la route qui vient d'être suivie un triangle
baptisé le Champlain. En ce lieu, selon Bulliot, se serait
tenue l'assemblée des représentants de toute la Gaule,
appelés à Bibracte par les Éduens après
l'échec de César devant Gergovie.
Trois candidats briguaient le commandement
suprême des confédérés, trois anciens amis
des Romains : Vercingétorix, qui venait de tenir en
échec César devant Gergovie ; Éporédorix
et Viridomare, qui commandaient la cavalerie éduenne aux
côtés du proconsul. Vercingétorix reçut de
l'assemblée confirmation de ses pouvoirs et ses deux rivaux
lui prêtèrent serment d'obéissance.
Dans la partie nord-ouest du Champlain se
dresse un rocher isolé, haut de 4 mètres, long de 9,
sur une plate-forme rocheuse de 150 mètres sur 90. Cette
plate-forme semble avoir été nivelée de main
d'homme et le roc au centre de l'esplanade, tapissé de lichens
jaunâtres, a l'aspect étrange d'un "bloc
sulfureux". C'est la "Pierre de la Wivre". Sur sa face
nord, une sorte de rampe qui conduit à son sommet paraît
avoir été aménagée pour en faciliter
l'accès. Une cuvette creusée à la partie
supérieure, souvent à demi remplie par les eaux de
pluie, porte le nom de "Fontaine des Larmes".
S'agit-il d'un antique autel sur lequel avaient
lieu les sacrifices ? Doit-on y voir une tribune ? Est-ce de
là que Vercingétorix harangua les chefs gaulois et,
plus tard, que saint Martin adressa aux Éduens la parole
évangélique ? S'agit-il simplement d'un reste de la
carrière utilisée pour la construction du rempart
?
la Pierre de la Wivre http://silipion.kazeo.com/la-pierre-de-la-wivre-france-a125697856
C'était encore, il y a moins d'un
siècle, la pierre sous laquelle un trésor se trouvait
caché. La Wivre en défendait l'approche mais, une fois
l'an, le serpent volant déplaçait la pierre et
étendait le trésor au soleil, pendant qu'avait lieu la
procession, le dimanche de Pâques. Selon une autre tradition,
le trésor demeurait sans surveillance le temps que durait la
messe de minuit, la nuit de Noël. Certains disaient qu'il
suffisait alors, pour, s'emparer d'une partie ou de l'ensemble des
richesses, de jeter dessus de la mie de pain. Tout ce qu'elle aurait
touché appartiendrait à l'audacieux. Autre technique :
s'emparer du trésor et traverser une eau courante, si faible
soit-elle ; la Wivre serait incapable de reprendre son
bien.
On racontait qu'une femme, au lieu d'aller
à la messe, se rendit à la Pierre, accompagnée
de son enfant. Elle trouva la roche déplacée, le
trésor sans défense, s'empara de tout ce qu'elle put et
s'enfuit juste à temps pour échapper à la
Wivre... mais elle ne retrouva pas son enfant. Dans son
désespoir, elle consulta le curé ; celui-ci lui
conseilla de retourner à la Pierre chaque jour, de verser au
sommet du lait et du miel pendant douze mois et quand reviendrait le
jour où s'ouvrait le trésor, d'y reporter sans rien
conserver tout ce qu'elle avait emporté. Jour après
jour, sans en manquer un, par le chaud et par le froid, par le beau
et par le vilain temps, elle alla verser le lait et le miel. Le Jour
arriva : la mère trouva sous la pierre son enfant en parfaite
santé, assis devant une table de pierre sur laquelle
était une pomme. Elle restitua joyeusement le trésor et
emporta son enfant.
La Wivre ne demeurait pas toujours au sommet du
Beuvray, mais se rendait également à Thouleurs et de
là aux roches de Glenne. L'histoire de la femme qui s'empare
d'une partie du trésor et oublie son enfant a
été aussi localisée à Glenne, mais avec
deux variantes. Dans l'une, elle ne fit point d'offrandes et ne
retrouva l'année suivante qu'un squelette ; dans l'autre, elle
oublia de venir un jour et retrouva son enfant vivant mais auquel il
manquait un bras.
Poursuivant la route conduisant à la
terrasse, il est possible de voir sur la gauche, dans les
broussailles, cinquante mètres au delà du chemin de
L'Échenaud, l'emplacement d'un couvent de Cordeliers construit
au XIVe siècle et détruit en 1570 par les huguenots de
Coligny qui, après avoir vaincu à Arnay-le-Duc les
papistes de Cossé-Brissac, s'étaient repliés sur
Autun et, cette ville ayant résisté, avaient
gagné Saint-Honoré.
la Pierre Salvée http://www.patrimoinedumorvan.org
Sur la droite - à l'ouest - se trouvent
le "Teureau de la Roche" et la "Pierre Salvée"
où, à l'une des extrémités, une aiguille
isolée se dresse comme un pseudo-menhir. Dans le voisinage de
la "Pierre Salvée" s'élevait, à
l'époque impériale, un petit oratoire païen,
peut-être consacré à la déesse Bibracte,
si elle a existé. La chapelle de Saint-Martin se trouve
bâtie sur son emplacement. Le très modeste temple
antique se composait d'une cella rectangulaire,
flanquée de deux galeries latérales faisant portiques.
Selon Déchelette, "au chevet, tourné à
l'orient, s'ouvrait un petit sacellum en retrait,
élevé de quelques degrés et séparé
de la nef par un rang de colonnes. Là se dressait
peut-être la statue de la déesse."
Il est permis d'avoir quelques
hésitations sur l'existence de cette déesse Bibracte.
Sans doute, au cours des travaux de construction du séminaire
d'Autun, en 1679, a-t-on découvert dans un puits un
médaillon de bronze "A la déesse Bibracte, Publius
Caprilius Pacatus, Sévir augustal, avec reconnaissance, en
accomplissement d'un voeu", médaillon qui semblait assurer
le triomphe aux défenseurs de la thèse selon laquelle
la ville d'Autun aurait été édifiée sur
les ruines de Bibracte et qui fait dire à Déchelette,
partisan d'une Bibracte construite sur le mont Beuvray : "Il est
très naturel qu'après l'abandon du vieil oppidum, son
culte soit resté populaire à Augustodunum." Ce
document perdit d'ailleurs beaucoup de son intérêt le
jour où l'on s'aperçut qu'il avait été
gravé avec de l'acide et ne pouvait donc être
authentique. L'oeuvre de ces archéologues farceurs se trouve
aujourd'hui reléguée dans un tiroir du musée
Rolin, à Autun.
Un premier sanctuaire chrétien,
peut-être fondé par saint Martin (responsable de la
destruction partielle du monument païen), succéda au
temple, la cella se trouvant privée de ses portiques
mais agrandie d'une abside. Vint ensuite un nouvel oratoire, sans
doute après la ruine du précédent. Il disparut
au XVIlle siècle. Enfin, le 7 août 1873, la
première pierre de la chapelle actuelle de Saint-Martin fut
posée par Mgr Landriot, archevêque de Reims. Une croix,
dédiée également à saint Martin et sur la
stèle de laquelle on voit le saint partager son manteau avec
un pauvre, avait déjà été
érigée en 1851.
http://www.panoramio.com
Sulpice Sévère, disciple de saint
Martin, conte comment il évangélisa la Bourgogne et
écrit : "Le saint évêque renversait un
sanctuaire païen sur le territoire des. Éduens lorsque
des paysans accoururent pour défendre leur temple. L'un d'eux
menace saint Martin ; l'apôtre retire son pallium et tend le
cou à son agresseur. Celui-ci, poussé soudain par une
force invisible, tombe à la renverse et implore son
pardon." Selon la tradition, la scène se serait
passée sur le Beuvray, et Déchelette précise que
"les monnaies romaines les plus récentes retirées de
ces ruines (du temple païen) appartiennent à
Valentinien, mort en 375, soit deux ans avant l'époque de la
mission de saint Martin en Bourgogne". Il est encore
rapporté, mais non par les archéologues, que,
monté sur son baudet, saint Martin descendant du Beuvray vers
la Roche-Millay poursuivi par ses agresseurs, franchit d'un bond le
long et profond ravin de Malvaux (la mauvaise vallée).
L'empreinte du pied de l'animal se trouve sur le "Rocher du Pas de
l'Ane", d'où il prit son élan. Le saint se retrouva
ensuite au Fondon, où l'on montre son autre
"Pas".
Lors de ses fouilles, Bulliot découvrit
les fondations de nombreuses maisons. Construites en pierres
sèches liées par de la terre argileuse sans mortier de
chaux, de plan rectangulaire, elles étaient le plus souvent
à demi-souterraines : on y descendait par un escalier de
plusieurs marches. Le sol était de terre battue,
mêlée de tuileaux. Les toitures devaient être
généralement de paille, mais la tuile romaine à
rebord se rencontrait également. Le nombre des
pièces variait vraisemblablement selon la condition des
habitants ; Bulliot et Déchelette ont trouvé de vastes
constructions "bâties sur le plan classique des demeures
pompéiennes". L'une, assez luxueuse, couvrait 1 150
mètres carrés et se divisait en une trentaine de
compartiments disposés autour d'un atrium central, à
plan carré ; "elle était sans doute occupée
par de riches Éduens fixés à Bibracte vers
l'époque de César", c'est-à-dire vers
l'époque où la civilisation italique avait
commencé de pénétrer dans la Gaule centrale. Les
Éduens de Bibracte connaissaient l'hypocauste et les maisons
de bains.
Parmi les ustensiles trouvés à
Bibracte et fabriqués sur le lieu même, nombreux sont
ceux qui avaient reçu leur forme presque définitive :
couteaux, faux, faucilles, limes, râpes, burins, etc. Le bronze
était employé pour les petits objets tels que fibules
ou anneaux. Les émailleurs fabriquaient des bossettes
ornementales qui étaient appliquées sur les
pièces de harnachement, les ceinturons, etc. Abondante
était la céramique, étrangère ou
indigène ; cette dernière comprenait des terrines,
plats, assiettes, jattes, cruches... des poteries peintes à
motifs géométriques. La céramique
importée - les amphores notamment - venait le plus souvent
d'Italie du Nord, en particulier d'Arezzo. Sur un certain nombre de
tessons, il est possible de lire le nom gaulois du possesseur du vase
; il se trouvait toujours écrit en lettres
grecques.
http://www.nievre-tourisme.com
Plus de mille pièces de monnayage
gaulois ont été trouvées dans les fouilles ; en
1899, on comptait encore vingt-sept monnaies grecques de Marseille,
cent quatorze monnaies romaines, une monnaie celtibérienne et
une monnaie de Mauritanie. Les monnaies éduennes en bronze
représentaient le tiers des trouvailles.
Il convient également de citer parmi les
découvertes des archéologues au sommet du Beuvray des
bracelets, des grains de collier en verre de couleur, des clefs de
maisons gauloises, des chenets d'argile surmontés d'une
tête de bélier.
Sur la terrasse, au sud-ouest du plateau,
Bulliot a cru reconnaître les traces d'un petit retranchement
romain (castellum) construit par César après
l'affaire d'Alésia, lorsqu'il reçut la soumission des
Éduens et des Arvernes et qu'il décida de passer
l'hiver à Bibracte. Il dut s'y établir avec la
cavalerie prétorienne de recrutement noble,
disciplinée, sûre et seule capable de vivre en bonne
intelligence avec la population de Bibracte. La 11e légion, en
laquelle il avait confiance, se trouvait placée en soutien
immédiat, hors les murs, afin d'éviter les
échauffourées nocturnes. Les trois autres
légions, les 6e, 14e et 12e, occupaient Mâcon, Chalon et
la région de Nevers.
Sous le règne d'Auguste, les
défenses de Bibracte furent détruites et la ville se
trouva transférée à 25 kilomètres de
là, sur la rive gauche de l'Arroux : Augustodunum - Autun -
était fondée.
Au début du XXe siècle, bien
qu'une grande partie du sol de Bibracte n'eût pas
été fouillée - en particulier la région
du Porey, au sud-est, la partie la plus élevée du
plateau (822 mètres) - toutes les constructions et le plus
grand nombre des objets exhumés par les archéologues se
trouvèrent réenfouis avec l'accord des
propriétaires des terrains. Certaines pièces
particulièrement intéressantes furent néanmoins
confiées, on l'a vu, au musée des Antiquités
Nationales à Saint-Germain-en-Laye ou au musée Rolin
d'Autun.
le monument Bulliot http://www.panoramio.com
Le 20 septembre 1903 fut inauguré sur le
plateau de l'oppidum un monument érigé à la
mémoire de Jacques-Gabriel Bulliot, "né à
Autun le 20 janvier 1817, mort à Autun le 11 janvier 1902,
correspondant de l'Institut, qui sur le mont Beuvray retrouva et
exhuma l'oppidum gaulois de Bibracte, capitale des Éduens au
temps de Jules César, poursuivit avec un dévouement
aussi constant que modeste de 1867 à 1895 ses travaux sur ce
sommet et mérita la reconnaissance des Éduens et des
savants".
Si l'on excepte le monument Bulliot et la table
d'orientation, la chapelle Saint-Martin et sa croix, le Beuvray a
repris l'apparence d'un lieu où rien ne se serait
passé. Le Chaume est devenu un parking, un terrain de
pique-nique et de jeux pour les enfants. Quelques visiteurs seulement
s'arrêtent un instant devant le plan de l'oppidum gravé
sur le monument Bulliot, cherchent peut-être à imaginer
la cité gauloise, y renoncent et vont lire la table
d'orientation, ce qui demande un moindre effort.
Un seul jour de l'année, les traditions
renaissent, transformées bien sûr, mais renaissent tout
de même : le jour de la fête du Beuvray.
le monument Bulliot http://www.panoramio.com
L'oppidum gaulois avait été
d'abord un lieu de refuge, non une ville au sens moderne du mot.
Lorsque César envoyait des courriers "dans toute la
cité des Éduens", il s'agissait de l'ensemble des
territoires occupés par ce peuple, non de Bibracte seule.
Mettant le siège devant Avaricum, il espérait que la
reddition de cet oppidum entraînerait la soumission de la
cité entière des Bituriges. Il opposait ainsi oppidum
et cité. Il serait donc absurde de vouloir faire de Bibracte
une capitale, même régionale, telle qu'on la
conçoit aujourd'hui.
Lieu de refuge, l'oppidum gaulois était
également, en temps de paix, marché régional et
centre temporaire de commerce. Il paraît logique d'admettre
à Bibracte la présence permanente du personnel
attaché aux ateliers métallurgiques, comme il est
raisonnable de penser qu'à certains moments de l'année
une foule considérable affluait vers l'oppidum pour acheter,
échanger ou vendre tout ce qui était nécessaire
aux uns ou aux autres.
Après la conquête, le Beuvray
devint camp retranché romain, mais également lieu
d'attraction annuelle pour les populations voisines. Les
légions occupantes y avaient établi, selon
l'abbé Baudiau, le culte des dieux de leur patrie "et y
firent revivre les fêtes qui leur rappelaient les printemps de
l'Italie. Flore, Maïa, déesse des fleurs et de la
jeunesse ; Mercure, le dieu des marchands, et jusqu'à
l'impudique Vénus, y eurent leurs autels. Les fêtes des
nouvelles divinités, qui s'y célébraient avec
pompe, le premier mercredi de mai, la revue des cohortes romaines,
qui avait lieu ce jour-là, y amenaient en foule la jeunesse et
les curieux, non seulement d'Augustodunum et de ses environs, mais
encore des cités les plus reculées de la Gaule. De leur
côté, les marchands, attirés par le culte de leur
dieu protecteur et par l'espoir du gain, y accouraient de tous les
pays".
Cette foire du Beuvray survécut à
l'occupation romaine ; elle continua d'avoir lieu le premier mercredi
de mai et d'être renommée dans toute la France. "Les
fouilles du champ de foire, écrit J. Déchelette, ont
permis de reconnaître, en avant du Temple, de chaque
côté de la voie centrale, une rangée de petites
boutiques, occupées à l'époque antique par les
marchands et les artisans. Elles étaient
précédées d'auvents, portés par des
colonnettes de brique. Des monnaies, des poteries et objets divers de
tous les siècles, depuis l'époque gauloise
jusqu'à nos jours, témoignent de la persistance de
cette foire, persistance tout à fait singulière en
raison de l'isolement et des difficultés d'accès du
Beuvray."
Un "Champ de Mai" de la noblesse des
environs succéda, pendant la période féodale,
à la revue des légions romaines. Une revue des vassaux
des baronnies de Glenne et de la Roche-Milay avait lieu, puis un
tournoi, qui ne cessera qu'en 1547.
http://www.bibracte.fr
Moins fréquentée depuis le XVIe
siècle, la foire annuelle de Beuvray continua néanmoins
jusqu'au XIXe siècle. En 1850, on y menait encore quelques
boeufs et vaches ; quelques moutons en 1890. A l'aube de notre
siècle, seuls les villageois des communes voisines se
rendaient, à jeun, "en Beuvray" le premier mercredi de
mai pour y accomplir certains rites et se divertir en commun :
prières devant les sources de Saint-Pierre et surtout de
Saint-Martin, offrandes de pièces de monnaie, d'oeufs et de
fromages ; les nourrices se lavaient les seins dans la source afin
d'obtenir un bon "nourrissage"; les personnes de
précaution recueillaient au rocher du Pas de l'Âne
quelques gouttes d'eau laissées par la pluie -
spécifique contre la fièvre et divers maux - et
laissaient une obole ; chacun accomplissait les gestes rituels
indispensables pour se rendre favorable le grand saint Martin,
successeur de la déesse païenne et sensible aux
mêmes hommages qu'elle : bouquet magique de cinq plantes
cueillies avant l'aurore et liées de façon
particulière, jet de la baguette de coudrier derrière
l'épaule gauche sans se retourner, etc. Puis la fête
champêtre commençait : jeux, danses,
réjouissances diverses. On mangeait, on buvait et souvent on
se battait avant de regagner son domicile. La fête du Beuvray
avait vécu, mais la fête persistait. Elle continue
aujourd'hui, le deuxième dimanche de juillet, à la fois
religieuse et laïque. Il y a messe et discours ; il y a aussi
bal, boisson et distractions variées, dont certaines se
veulent folkloriques avec ce que cela peut comporter d'attendrissant,
de ridicule ou d'attristant.
Le lendemain, le Chaume a retrouvé son
calme, mais il faut, plus de temps, de la pluie et du vent pour qu'il
redevienne propre.
Patrice Boussel - Guide de la
Bourgogne et du Lyonnais mystérieux
http://www.panoramio.com
erci
de fermer l'agrandissement.
https://www.stleger.info