LA HULOTTE

Egrenant les heures de nuit,
La hulotte crie son chagrin.
Pourtant elle me réjouit
Du chant doux-triste qui est sien.

Reine des rêves nocturnes,
Sans même un reflet de lune,
Comment trouves-tu ton chemin
Chaque nuit noire avant matin ?

Comment, de tes yeux mordorés,
Trouves-tu les âmes damnées,
Comment viens-tu les appeler
Pleurant qu'elles sont condamnées?

Egrenant les heures de nuit,
La hulotte chante chagrin.
Pourtant, ma déesse, on te dit
En amour avec le Malin.

 

 

LA PIE

Je voyais bien à son oeil inquiet
Qu'elle était aux aguets.
Blanche, en bavette noire et bleue,
Hochant bien haut la queue,
Pillant les graines des mésanges,
Elle était aux anges.

 

 

 

MISS L...

Elle dormait à poings fermés,
Impudique. Au soleil brillaient
Les reflets doux de ses duvets.
Quand j'ai voulu la mieux mirer,
Miss Linotte n'a point bougé.
Elle était venue s'assommer
Contre la vitre du jardin
Où le soleil luit le matin.

 

 

 

LE GEAI

Perché sur le fil, il surveillait
La cerise qui en rosissait.
Elle ne pourrait mûrir en paix,
Rougissante il la goberait
Et, tout heureux de son forfait,
Ses plumes bleues il lisserait.

 

 

 

LE VIEUX MERLE

Risée de la contrée, un merle déplumé
N'avait réussi à s'accoupler cette année.
Pourtant dès février il entama sa cour
Merlette l'écoutant jusqu'au lever du jour
Son chant annonçant un printemps vibrant d'amour.
Intriguée, curieuse, voulant voir ce galant
Et ne découvrant que prétendant vieillissant
Au crâne dégarni, au croupion dénudé,
Elle en restait interloquée et s'enfuyait.
Maintes fois le merlot fut ainsi délaissé
Et goba son dépit de se voir préférer
Des jeunots n'ayant pas ses bonnes manières
Mais portant fièrement plumes au derrière.
A l'été survenu, le bienfaisant soleil
Réussit à teinter d'une couleur de miel
Tout ce que notre oiseau offrait au bronzage
Sans pouvoir l'abriter de quelque plumage.
En voyant voleter ce caramel doré,
Oh combien la merlette fut-elle intriguée
lntriguée, que dis-je, bien plutôt attirée.
A cette étournelle se joignirent étourneaux,
Bergeronnettes, bouvreuils, pinsons et moineaux
A tel point que l'on vit ce spectacle étonnant,
Cet oiseau dédaigné devenir Don Juan.
Mais cela n'eut qu'un temps, rapace y mettant fin...
Il aperçut merlot prenant son premier bain.
Fiérot, content de lui, ne surveillant plus rien,
Enflé d'orgueil, il sifflait un chant prétentieux
Qui s'éteignit d'un coup de bec tombé des cieux.
Mon pauvre vieux merle imbu de tes sottises,
D'avoir préféré la débauche aux cerises
Te voici bien à point dévoré par l'autour
Alors que tu goûtais aux délices d'amours.

 

 

  Textes de Camille Lebossé
Illustrations de Anne Rousseau

Extraits du recueil "Envolées Vertes à Vertes" (2000).
L'album a une vertu supplémentaire, celle de voir sa délicieuse préface traduite en morvandiau et en gascon. Richesse de nos terroirs...

 

PRÉFACE : ENVOLEES DE VERTES A VERTES
Lorsque mon coeur manqua s’envoler à tire-d’aile pour mieux aimer et nicher au monde des oiseaux, je découvris se crénelant en ponant les rémiges de Bleu-Noir, le corbeau.
Tandis que je demeurai cloué sur mon lit -comme jadis la chouette à la porte de la grange- la terrifiante image s’effaça au chant doux-triste de la Hulotte.
A l’autre bout de l’horizon scintillait l’aura d’Anne Rousseau.
Illuminée d’un même bel amour de la gent ailée, elle lui trouvait des complicités avec les anges, thème de son exposition d’Arnay-le-Duc à l’automne 1999.
Je la remercie d’avoir bien voulu illustrer ce monde enchanteur et mystérieux des oiseaux dont j’ai rêvé d’amour.

Camille Lebossé

 

PREFAICE : ENVOULEES D'VORDES EN VORDES
Quand qu’y’ot qu’mon coeur ai vlu s’envouler d’tôtes ses orles pou mieux aimer pe nicher au byau mitan du monde des oûyeaux, i vié se détaichant du côté du vent d’Iai pleue, les pleumes du Bleu-Noere, le crâs.
Quioulé çhu mon lit- paireiI que les autres fôès lai choue ài lai porte de lai groinje- lai tarrifiante imaije s’effaiçot aux ptiots choulements rébollants d'l’ai Heulotte.
Ai I’aute des bouts du pays l'Anne Rousseau nôs ébarlûte. Illeuminée du minme brâve aimour du monde ài pleume, elle y ai troué des ersembyances daivou l‘monde des anjes, que s’envoulaint ài traivars soun esposition ài Arnay, ài l'arriére sayon d’I’an-née 1999.
I lai r’mercie brâment d’aivôer ben vlu illeuster c’te monde étounnant pe ébarlutant des oûyeaux que i ai rêvé d’aimour.

version morvandelle de Pierre Léger

 

ABANS DISER : BOULETS DE VERDES A VERDES

Quoand lou cor ém boulou préne la grane boulade enta cerca mey d'amou et ha lou soun nit aou miey dous aouzéts, qué troubaï harissats cap bad, lous canéts de Négue-Blu, lou courbach !
Clabat aou Iheyt -coum d’autescops la tchabèque a la porte de la borde- la tarrible imatye que disparechou aou cante dous é triste de la Hulotte.
A I’aut cap dou céou Iusibe lou cért d’Anne Rousseau. lluminade dou medish é ta bèt amou dou puple boulan, qu’ou trouba amic dab lous andjes, sutjèt a la sou espositioun a Arnay-Ie-Duc a I’estibet 1999.
Qué I’arremercie d’abé boulut illustra acquet mounde merbelhous e mysterious dous aouzéts qué m'an hèyt sounya d'amou...

version en gascon landais de Marc Bareyt et son équipe

 

 

 

 

 

 

 

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