En
1867, Gaston Lavalley publie "Légendes Normandes".
Dans l'une d'elles intitulée "Le Maître de
lOeuvre", il est question de Bretteville l'Orgueilleuse, de
Norrey et de St Léger.
Nous vous en livrons ici quelques bribes qu'il sera
intéressant de comparer avec l'autre ouvrage en
référence ci-dessous.
Pour lire l'intégralité de cette légende
bretonne, rendez-vous sur
http://www.gutenberg.org/dirs/1/1/0/3/11036/11036-h/11036-h.htm#LE_MAITRE_DE_L'OEUVRE
"Une des nombreuses voitures, qui
faisaient alors le service de Caen à Bayeux, venait de
s'arrêter à Bretteville-l'Orgueilleuse. Deux jeunes gens
sautèrent de l'impériale plutôt qu'ils n'en
descendirent, emportant avec eux tout leur bagage : un sac en toile,
un bâton, un album ; avantage inappréciable qui
n'appartient qu'aux célibataires.
A peine arrivés, nos voyageurs se dirigèrent vers
l'église avec un empressement qui dénotait, sinon une
certaine exaltation religieuse, du moins un goût
prononcé pour l'archéologie (...)
http://www.viamichelin.com/
(...) Les notables de Bretteville,
entraînés par ce concert de louanges, et prenant, comme
toujours, la voix du peuple pour la voix de Dieu, demandèrent
comme une grâce au nouvel arrivé d'achever
l'église du village (...)
(...) - On avait entendu parler de
l'église que je construis ? dit Pierre Vardouin.
- Sans doute.
- Et alors ?... demanda le maître de l'oeuvre, avec un
étranglement dans la voix.
- Alors... il a été décidé que l'on en
construirait une autre à Norrey. L'abbé n'a pas voulu
que cette succursale de St-Ouen fût moins bien traitée
que le village de Bretteville.
- C'est folie, reprit Pierre Vardouin, de construire deux
églises dans un si petit espace. L'une fera tort à
l'autre (...)
(...) La tour de l'église de
Norrey s'élevait, gracieuse et coquette, au-dessus des
peupliers les plus élancés.
Rien de mieux ordonné que l'ensemble de l'édifice ;
rien de plus élégant, de plus achevé que ses
moindres détails. On n'y voyait pas les lourds et massifs
piliers de l'époque romane ; on n'y voyait pas les formes
contournées, les tours de force qui, plus tard,
caractérisèrent l'architecture dite flamboyante.
C'était un des types les plus heureux de cette belle
période du treizième siècle, dont la
Sainte-Chapelle est l'idéal." (...)
Ce qui suit est la toute fin de
cette légende normande :
(...) "Trois heures après, nos
voyageurs arrivaient aux premières maisons de
St-Léger. M. Landry s'arrêta et saisit avec
émotion les mains des deux artistes.
- C'est ici qu'il faut nous séparer, dit-il tristement.
- Déjà ! s'écria Victor.
- Vous êtes fatigué ? dit Léon.
- Il m'est pénible de vous quitter, répondit M. Landry,
car je commençais à vous aimer. Je me serais
bientôt arrogé le droit de vous donner des conseils ; de
vous dire, à vous, Léon, de combattre avec
énergie votre malheureuse disposition au découragement
; à vous, Victor, de savoir mettre parfois un frein à
votre imagination. Mais il ne faut pas y songer. Hélas ! mes
amis, se rencontrer, sympathiser, s'estimer, se dire qu'on ne
voudrait jamais se quitter et se quitter aussitôt, n'est-ce pas
la vie ? Nous aurions le ciel sur la terre si les âmes qui
sympathisent entre elles n'étaient jamais condamnées
à se séparer. Encore ! ajouta M. Landry, en allongeant
le bras dans la direction du cimetière de
St-Léger, encore doit-on se croire heureux, lorsque la
mort n'est pas la cause d'une cruelle séparation.
Les deux artistes n'insistèrent pas davantage pour retenir M.
Landry.
Ils avaient compris qu'il avait dans le voisinage un souvenir
douloureux.
Ils lui serrèrent une dernière fois la main, lui dirent
un dernier adieu et se remirent tristement en route."
Source
:
http://www.gutenberg.org/dirs/1/1/0/3/11036/11036-h/11036-h.htm
Le 2e ouvrage, paru 25 ans plus
tôt, est plus sérieux.
Ecrit par M. de Caumont et publié à Caen en 1842, il
s'agit de la "Statistique routière de Normandie : routes de
Caen à Cherbourg et de Caen à Rouen".
Nous reprenons ici une partie du chapitre "De Caen à
Bayeux".
Pour lire l'ensemble du texte, rendez-vous sur http://www.normannia.info/
et rechercher "Caumont" en
auteur.
Pour bien situer les lieux, 2 cartes vous sont
proposées.
Caen est en bas
à droite.
On voit, entre autres, Bretteville et St Léger sur la route de
Bayeux.
"Bretteville-l'Orgueilleuse a pris de
l'accroissement depuis trente ans. C'est aujourd'hui un bourg dont
les maisons bordent les deux côtés de la route sur une
assez grande longueur. Il y a halle chaque semaine, le jeudi. Le
choeur de l'église paraît de la deuxième
moitié du XIIe siècle, ainsi que la partie basse de la
tour ; la partie supérieure de cette pyramide doit être
moins ancienne. La nef est moderne et sans aucun
intérêt.
De Bretteville et des environs, on
aperçoit au sud la charmante église de Norrey, en
grande partie du XIIIe siècle ou du commencement du XIVe, dont
le choeur et le transept offrent des proportions
très-remarquables et une élégance que l'on ne
trouve pas habituellement dans une église de campagne. Parmi
les sculptures qui méritent d'être observées dans
le choeur, sont deux bas-reliefs représentant deux musiciens,
dont l'un joue du violon et l'autre donne de la trompe.
Un autre bas-relief représente
le massacre des saints Innocents et l'adoration des Mages. Des
feuillages très-élégants sont sculptés
dans le pourtour du choeur.
Une église plus
éloignée de la route, et dont on aperçoit la
tour à quelque distance de Bretteville, au nord, est celle de
Secqueville-en-Bessin ; elle est en partie du XIe
siècle.
Le village de Sainte-Croix n'offre
rien d'intéressant. La grande ferme où l'on relaie, au
fond du vallon, à droite de la route, était autrefois
une auberge où Louis XVI a couché en revenant de
Cherbourg, en 1786.
On retrouve St
Léger et on se dirige vers Bayeux, en haut à
gauche.
Le château de feu M. le marquis
de Chastenay, pair de France, est situé au fond du vallon qui
traverse la route en se dirigeant au nord ; on ne peut l'apercevoir :
au contraire, on distingue au sud l'église d'Audrieu,
reconnaissable à sa tour élevée ; on parcourt
ensuite la fertile campagne de Coulons, et l'on arrive à
Saint-Léger.
Saint-Léger avait un
prieuré dépendant de l'abbaye de
Saint-Sauveur-le-Vicomte. J'y ai découvert des
médailles et des constructions romaines dans un champ
situé au midi de la route. La commune de Martragny, dont
dépend ce village, est située du côté
opposé. On voit l'avenue du château de Martragny, en
sortant de Saint-Léger.
A gauche, sont les églises de
Ducy et de Carcagny, décrites dans ma Statistique monumentale
du Calvados.
La Seulle coule au fond d'un joli
vallon. On la traverse sur un pont qui a succédé
à un autre assez ancien. Ce pont avait fait donner le nom de
Vieux-Pont au petit village voisin. Ce village dépend de la
commune de Vaux, située un peu plus au nord, et dont
l'église présente des parties remarquables du XIIe
siècle. On y a construit, il y a peu d'années, une tour
ridicule et d'une effroyable pesanteur.
Le joli château de Vaussieu, dont on aperçoit les
combles, est à quelque distance au-delà de
l'église de Vaux ; il appartient à M. le comte
d'Héricy.
Au midi, et en remontant le cours de
la Seulle, on trouve Nonant, dont l'église assez curieuse se
voit très-bien de la route. Ce village était autrefois
du diocèse de Lisieux.
Saint-Martin-de-la-Lieue n'offre rien
d'intéressant que quelques maisons neuves assez riantes. Plus
loin, les restes de l'ancien couvent de Saint-Nicolas-de-la-Chesnaye
bordent la route.
Saint-Exupère est un lieu
ancien, à la porte de Bayeux ; plusieurs évêques
y ont été inhumés : mais l'église a
été complètement reconstruite de nos
jours.
Si l'on quitte la route royale, avant
d'entrer dans la ville, et que l'on se dirige vers le nord, on
trouvera, à peu de distance, l'église de Saint-Vigor.
Elle est moderne et ne mériterait guère d'être
visitée si l'on n'y trouvait le siège en marbre dans
lequel allaient s'asseoir les évêques de Bayeux lors de
leur prise de possession, et qui, selon l'opinion commune, remonte au
moins au temps d'Odon, frère de
Guillaume-le-Conquérant.
Ce siège, autrefois près de l'autel, est aujourd'hui
relégué dans la sacristie. La porte du prieuré,
voisin de l'église Saint-Vigor, paraît du XIVe
siècle.
Géologie - Dans le trajet de
Caen à Bayeux, on parcourt des terrains de qualités
diverses, mais en général assez fertiles, qui reposent
sur la grande oolite jusqu'au village de Saint-Léger.
Une dépression du sol indique le changement de terrain. Un peu
avant l'avenue de Martragny, on descend sur l'oolite ferrugineuse,
à laquelle succède bientôt le lias. La Seulle
coule au milieu de coteaux formés de ce calcaire, et il sert
de base aux terres arables comprises entre la Seulle et Bayeux : ce
sont des terres fortes et argileuses.
Source : http://www.normannia.info/cgi-bin/aurweb.exe/normannia/rechpdoc?aut=Caumont%2C+M.+de+
https://www.stleger.info