e patois du ays de etz 
 

 

 

 

 

 

Mémé

"Le patois est ma langue maternelle.
Je l'ai toujours employé, en famille et au village.
On me l'interdit à l'école, le remplaçant par le "français" qu'il fallait écrire.

Plus tard, un vieil imprimeur pornicais, Emile Bourrin, fit paraître dans "l'Écho de Paimboeuf" une série de mots patois.
Mais c'est surtout le regretté père Eloi qui rechercha locutions et mots de chez nous et les publia dans son recueil "Le vieux langage du Pays de Retz", véritable musée.

Pour la mémé que je suis devenue, le patois n'a guère de secrets.
Je l'écris pour le plaisir, sans vouloir faire école.
Je crois pourtant souhaitable que les enfants aient un aperçu de ce langage qui chante, sourit, pleure et prie, avec les mots, l'accent et le goût d'un terroir qui, toujours d'après Eloi Guitteny, n'est pas absolument breton, pas complètement poitevin, mais sûrement paydret."

Mémé (Sylvaine Billot)

 

 
Mon Pays de Retz

Je n'ai, dans le soleil, point vu de Pyrénées
ni gravi le Mont-Blanc au renom prestigieux,
ni foulé le cratère assagi des années,
ni sur la Tour Eiffel même... levé les yeux.
Je connais seulement les rives... familières
à mon Pays de Retz et les pointes altières
de clochers dont le coq chante clair et joyeux.

Je sais... les coins fleuris de la Côte de Jade,
la saveur que Bourgneuf donne à son grain de sel.
J'ai grimpé dans Pornic au dessus de la rade
et humé la galette au vent de Saint-Michel,
cueilli vers Saint Brévin...l'or... en mini-houpettes
dont chaque mimosa parfumait ses branchettes
sans attendrir le Pont... au péage cruel.

J'ai salué Paimboeuf au port chargé d'histoire,
le pionnier Maneyrol et la tour de Buzay,
redouté "Barbe Bleue" de sinistre mémoire
aux ruines de Princé où "soeur Anne attendait".
J'ai pris à Machecoul la pédale "Gitane"
pour le tour de Grand-Lieu, via Sainte Pazanne
et mon petit Chauvé dont la terre appelait.

J'ai fané sur des prés que la Loire enrubanne,
semé, dans les guérets, le blé d'un geste égal,
vendangé le grolleau de la pente océane
qui garde, en son bouquet, le goût du littoral
et, d'humbles laboureurs continuant la race,
senti mon pas plus ferme... en allant sur la trace
de ces rudes Paydrets... fiers de leur sol natal.

Mémé

 

 

la bouillie aux barbeaux

 

(histoire en patois présentée en 1987 à l’exposition "Langage et Traditions en Pays de Retz", contée par Mathurine Pagot)

Y avait à Pornic, oh y a-t’i longtemps d’ça, une petite boutique d’épicerie, pas bin loin d’où qu’all’est la Mairerie asteure. La bonne femme qui la tenait avait un grand dadais de fi qui mangeait core de la bouillie à s’n’âge ; il avait bin dans les douze ans !

Quante les p’tites filles a sortaient d’l’école, a zallaient aj’ter des pastilles à la menthe ou bin des acides. Mais comme ça s’trouvait souvent dans l’moment qu‘la marchande atait à faire la bouillie pour son gas, ça la fesait dire son compte :
- Sapristi de p’tites bougresses, vous allez d’ête cause que ma bouillie a va core rimer. Espérez un p’tit que j’la finisse.
- Bin dépêchez-vous, on n’a pas l’temps...

Plusieurs fois don, all’ avait d’mandé aux filles de la remplacer à brasser la bouillie pour pas qu’a brûle, à temps de peser les saprés bonbons. Les filles s’en fesaient un jeu, vous pensez bin !

V’la qu’un jour une gamine dit aux autres :
- J’ai deux sous, on va aller aj‘ter des bonbons chez la mère Titine.
- Oui, mais a va core nous d‘mander de brasser sa bouillie.
- Faudrait lui mette quequ‘chose dedans pour l’attraper.
- Dame oui, mais moi j’ai rin ; qu’est-ce qu’on pourrait don lui mette ?

Et chacune de fouiller dans sa poche :
- Moi j’ai des barbeaux (des hannetons), dit enfin l’une des p’tites bougresses.
- Oh, c’est ça ! Ou va les mette dans la castrole !

Et qui fut dit fut fait. Les bonbons pesés, les filles donnèrent leurs sous et partirent à s’en aller. Mais une plus maline s’avait cachée derrière les sacs et les autes affaires qu’étaient dans quielle boutique.
Au bout d’un p’tit temps, la v’la qui s’ensauve en étouffant d’rire.

Vite, les autes filles lui d’mandèrent :
- Quoi qu’i gn’a eu ?
- Qui qu’all’a dit ?
- Qui qu’il a fait ?
- Oh dame, si vous saviez ! Oh le rire ! Oh j’étouffe !
- Bin dis-nous don !
- I disait... i disait comme ça, oh ! j’en pisse ! i disait comme ça : "Ça croque, Minmin, ça croque..." Et pis sa mère a disait : "C’est du suque mon fi, c’est du suque !"
- Comment qu’i disait ?

Et la gamine racontait de r’tour ça qu’all’avait entendu ; et ces sacrées p’tites bougresses a z‘en ont-elles ri longtemps.

  


 

 

le promier nail 

 

 

Alexis, il était beune en peine depuis que sa mère liz avait dit :
- Tu vas nous enhonter, mon gars. Tu vas ouèr que ton poupon il ara pas les kioches à son baptême.

Lexis, il était mariail depuis la métive (la moisson) et Génie était ben ronde à la fin des vendanges. Pourtant, i liz avait jamais touchail avant la nét de leurs noces.

Sans trop saouèr à keu saint se vouer, Lexis il pensail que le maire qui les avait mariails pourrait ventié l'ékiairer.

Martin Evin demeurait à la petite Massérie et avait teurjous un bon mot pour ses administrails.
I connaissait Lexis, un bon gars pas trop dégourdi, mais bon travailleur et point portail su la bouesson.

Quand le pauvre gars s'a iu confessail, le maire i liz a dit :
- Lexis, t'as pouint à t'en faire. A la première naissance, y a point de remarques, on peut jamais saouèr. Ça peut attendre tois mois keume tois ans. Agarde Jean-Louis, ton ouésin, sa Gélique alle a étail tois ans avant d'aouèr sa feuille tandis que Bastienne alle a iu son gars après douze semaines. L'essentiel, c'est que la mère et l'enfant séjont en boune santaille. Mossieu le Curail i fera ce qu'i voudra de ses kioches. D'ailleurs je crès pas qu'i connaît grand'chouse là-dedans.

Lexis était prou soulageail. Sa mère avait béou lancer su Génie des yeux soupçonneux, oul a arrivail un grous gars à Naou (Noël), qu'iz ont nommail Désiré.

C'est-i pas mieux de s'entendre ?

Mémé

 

 

Ces histoires proviennent du site des Amis du Pays de Retz.

le musée de Bourgneuf en Retz

 

  

 

 

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