la
grande verrerie Muller
Nostalgie en considérant les
hauts murs décrépis de la grande verrerie Muller et
devant les cités effondrées de l'usine ! C'est une
grande histoire !
environs de
Lunéville - Croismare
La verrerie de Croismare avait
été édifiée, sous Napoléon III,
par Guerner et Stinger. En 1886, elle avait un effectif de 285
ouvriers, logés pour la plupart dans ces petites cités
toujours visibles près du site industriel mais laissées
aujourd'hui en ruines.
La prospérité de la
verrerie qui avait notamment une production de gobeleterie a
entraîné une augmentation massive de la population : 806
habitants en 1856, 1268 habitants en 1886.
Mais à la fin du
siècle, la verrerie entre dans une phase de difficultés
: concurrence de la Bohème qui emporte tous les marchés
avec ses prix bas. La production diminue de 30 % et le
matériel mérite d'être
modernisé...
A la mort de Guerner (1893), les
dettes se sont accumulées et les créanciers font vendre
l'usine. Mme Bailly est déclarée adjudicataire et les
événements vont se précipiter : le Syndicat
ouvrier, particulièrement actif sur le site, choqué de
voir une femme à la tête de l'entreprise, provoque une
grève qui oblige la constitution d'une SA et conduit à
rechercher des investisseurs. Une soixantaine d'ouvriers ont
apporté leurs économies et sont ainsi devenus
actionnaires. Ces événements ont fait choc à
l'époque et célébrés par la presse :
"Cette tentative hardie et toute nouvelle prouve que la
conciliation du Capital et du Travail n'est pas une utopie. Les
ouvriers de Croismare vont faire l'essai."
Croismare - à
gauche, la verrerie
A l'époque, la verrerie
occupait 300 ouvriers dont 80 enfants avec une durée de
travail de 10h 1/4 par jour. L'exercice 1894, le premier après
cette exploitation originale, a permis la distribution d'un dividende
de 6 % aux actionnaires.
Mais l'euphorie ne dura pas et en
1904, "L'union du Capital et du Travail" a fait faillite et l'affaire
est reprise par la S.A. des grandes Verreries de Croismare sous la
direction de M. Lucien Hinzelin.
Celui-ci est spécialiste des
services de verre, livre également à l'usine Picard de
Lunéville (l'usine dite des verres de montre) les globes pour
les montres et les verres aux frères Muller, verriers de
génie qui se sont expatriés de la Moselle
occupée pour s'installer à Lunéville.
Après la guerre, les
frères Muller se sont rendus majoritaires de la gobeleterie
Hinzelin et assument le contrôle de l'usine. C'est
l'époque fastueuse où les frères et la soeur
imaginent les gravures des verres à l'acide et fabriquent des
objets à couches superposées de verres
colorés.
Après la période
brillante est venue la crise. La récession des
années 30 conduira les Muller à déposer le
bilan. Ils obtiendront un concordat dont ils ne peuvent pas tenir les
échéances et Henry Muller, qui assumait la direction,
devra céder la place en 1935 à Hubert Vaulot, un
houblonnier de Lunéville. Celui-ci racheta les murs de la
verrerie et y installa "les Forges & Ateliers de la Vezouze" qui
ont fabriqué pendant plus de 30 ans du matériel
électrique. L'immense vaisseau de l'ancienne Verrerie Muller a
été en partie racheté. II est occupé par
deux entreprises.
Croismare - les
Forges et Ateliers de la Vezouze
la deuxième verrerie
Pour sans doute profiter d'une main
d'oeuvre de verriers qualifiés, les Daum de Nancy sont venus
installer en 1926 une 2e verrerie en bordure de la RN4 en face de la
localité.
Les Daum, qui sont également
des réfugiés de Moselle, ont installé leur
atelier à Nancy. Leur créneau de fabrication : des
verres colorés à 4 ou 5 couches avec une
décoration florale ou de paysage vosgien.
Les conditions de travail des
verriers dans cette période d'avant-guerre étaient
particulièrement dures.
Ainsi, le témoignage de M. Maurice Kimmel qui travaillait
à l'usine Daum :
"Avant 1936, c'était pas
rigolo : on avait des coups de savates dans les fesses pour un oui ou
pour un non avec le chef, ou si vous cassiez un verre ou autre chose,
surtout les gamins, si vous cassiez quelque chose, c'était
toujours de votre faute.
Les gars n'étaient pas payés alors ils se rabattaient
sur vous. Moi, je ne leur en veux pas parce qu'ils ont
été élevés plus dur que nous. Dans le
temps, c'était encore pire, on venait les chercher parce que
le verre n'était pas affiné comme maintenant, il n'y
avait pas les fours comme ils sont faits maintenant, c'était
chauffé au charbon ou au bois, alors le verre n'arrivait pas
toujours à fondre à la même heure, ils venaient
chercher les verriers à 2 h du matin si le verre était
bon ou ils ne les faisaient travailler que dans la matinée.
C'était le four qui commandait !
Dans le temps là, les jeunes avaient dix ans et n'allaient
déjà plus à l'école. Une fois, j'amenais
un paquet de tabac à mon père qui travaillait à
la halle, le contremaître m'a dit : "Viens voir !", il m'a
emmené là-haut, m'a fait travailler et il a dit
à mon père : "Tu l'enverras tous les jeudis et toutes
les vacances". Si on n'avait pas fait cela, mon père aurait
été mal vu..."
I'église
Saint-Léger de Croismare
L'entreprise Daum subira la crise
comme la Verrerie des Frères Muller qui replièrent leur
activité à Lunéville. Les locaux Daum seront
transformés en centre d'apprentissage de la verrerie
après la guerre de 39-45 et aujourd'hui en tri de chiffons
pour l'industrie.
Source et liens :
1. le site de la
Communauté de Communes du Lunévillois
:
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2. Annuaires 1910 et 1933 de
Croismare : les principaux acteurs de la vie de la communes,
administration, clergé, commerçants... http://gmarchal.free.fr/
rubrique "La vie des communes", mais tout le site est à
découvrir.
https://www.stleger.info