necdotes, érités et égendes ??

à Saint éger sous euvray

 

 

(...) Saint Julien n'était pas un étranger dans les légendes du pays. Voyageant un jour dans nos mqntagnes, il aurait rencontré (en dépit de l'anachronisme), sur les confins de St-Léger-sous-Beuvray et de Laizy, saint Léger ; après avoir désigné l'emplacement de l'église de St-Léger-sous-Beuvray, saint Julien et saint Léger se donnent rendez-vous pour le lendemain ; le lieu où ils se rencontreraient serait choisi pour bâtir l'église de Laizy. La rencontre eut lieu à la Planchotte, à 500 pas du bourg de St-Léger. S'appuyant sur la convention de la veille, Julien voulait bâtir en ce lieu, mais saint Léger s'y opposa en disant que les deux églises seraient trop rapprochées. Ils se dirigèrent au levant et s'arrêtèrent sur la Buchena (terme local désignant un sommet couvert de buissons), montagne qui sépare St-Léger-sous-Beuvray et Laizy, et de laquelle on domine la vallée de l'Arroux. On montre encore deux rochers taillés en forme de sièges, sur lesquels les deux voyageurs se reposèrent et qui portent les noms de selles de St-Léger et St-Julien. Après cette seconde station, ils descendent la Buchena, et s'arrêtent à la brille de Pierre Pourtue (bruyère de Pierre Percée). Saint Léger dit à saint Julien : « Jette ton marteau. Là où il tombera, ton église bâtiras. » La tradition rapporte que le marteau, lancé du haut de la montagne de Meslé, tomba au lieu où a été bâtie depuis l'église de Laizy. Elle ajoute que le cheval de saint Julien laissa sur le rocher l'empreinte de son pied et que franchissant la vallée de l'Arroux, il alla s'abattre sur la montagne de Gueunand. Le nom de Pierre Pourtue ou Percée a été donné à la roche qui porte une ouverture ovale où l'eau se conserve toute l'année (...)

Source : Revue des traditions populaires - septembre-octobre 1902

 

Bulletin des lois de la République française - 1819

 

Le Petit Journal - 24 août 1875

 


 


 


 

(...) Guillaume Charvot succède à Pierre Balard en 1469 comme receveur de la châtellenie de Glenne. Son premier compte signale une singulière expédition, à l'occasion d'une exécution capitale. Il s'agissait de deux criminels enfermés au château de Riveau, et qu'un arrêt de justice avait condamnés, nous ne savons pour quel motif, à mourir au lieu de Montandé, près de Saint-Léger-sous-Beuvray. L'exécution paraît avoir été l'occasion d'une véritable partie de plaisir car, outre les procureurs, sergents et autres officiers de justice qui firent ripaille à l'auberge de Saint-Léger-sous-Beuvray, le compte mentionne que " tous les habitans d'icelle chastellenie accompagnèrent la justice de mondit seigneur et les deux coupables jusqu'au lieu de Montandey où ils furent mis au dernier supplice. " Autres temps, autres mœurs, et pourtant, sommes-nous bien sûrs que si pareille occasion se retrouvait de nos jours les suppliciés n'auraient pas une escorte aussi nombreuse et aussi avide d'émotions ? (...)

Source : La châtellenie de Glenne, par Eugène Fyot
in "Mémoires de la Société éduenne des lettres, sciences et arts", p.131 - 1904


(...) Comme tout château qui se respecte, celui de Vautheau a sa légende : sa wivre, serpent mystérieux qui garde des trésors non moins mystérieux. Chaque nuit, la wivre sort de son souterrain pour venir boire à la fontaine. Elle dépose alors le diamant qu'elle porte sur le front : talisman précieux qui rendra son ravisseur maître du trésor ou victime du monstre, selon qu'il sera plus ou moins leste dans son opération. Ce jour-là il faisait très chaud. Le voyageur but à la fontaine, mais la wivre ne se montra pas. Il perdit ainsi l'occasion de s'enrichir ou d'être dévoré. Bien des personnes, dit-on, ont vu la wivre, mais aucune n'a eu la témérité de tenter l'aventure.

 

Le château de Vautheau est situé à La Grande-Verrière en Saône-et-Loire. Il occupe une sorte de motte sur l'un des premiers contreforts du Morvan, où la silhouette d'une tour et sa tourelle se dessine sous un épais manteau de lierre.


le village de la Grande Verrière, non loin des ruines du château

Le château fort est en ruine, et son accès est périlleux. Au milieu des arbres et du taillis qui l'ont envahi, on distingue les fossés ainsi que des pans de murs de l'enceinte et d'une tour carrée. Seule reste debout la haute tourelle d'escalier qui flanquait cette tour : sa porte est surmontée d'une accolade qui renferme un écusson.


huile sur bois du château de Vautheau

Un peu à l'écart se trouvait un pigeonnier Renaissance qui s'est effondré voici quelques années. Le château, propriété privée, ne se visite pas.

Source et lien : http://www.vauteau.com

vidéo ici - belle rando entre St Léger et la Grande-Verrière

 

La Lanterne - 30 juillet 1901

 

La Lanterne - 23 avril 1904

 

Sans autres haltes, on arrive "enfin à Saint-Léger-sous-Beuvray, vieux village au milieu d'un très beau paysage". Ici, tout est disposé pour la séduction d'un peintre, tel que l'auteur, qui ne peut détacher son regard du tableau qu'il a sous les yeux : maisons groupées sans ordre dans un cadre de châtaigniers aux troncs puissants ; au bas, l'étang de Poisson, semblable à un petit lac ; au dessus, le Beuvray étageant ses croupes forestières ; tout lui rappelle quelque coin de l'Ecosse ou du pays de Galles. Le châtaignier surtout, "de tous les arbres le plus grandiose et le plus pictural", obtient ses préférences. Mais l'Antiquaire, qui ne perd aucune occasion de déplorer "la dégoûtante destructivité de ses contemporains", lui raconte que, depuis un certain nombre d'années, les plus beaux de ces vieux arbres ont disparu sous la hache meurtrière et il montre tristement du doigt les coteaux, aujourd'hui dénudés, que jadis des familles de frères géants couvraient de larges ombres. Mais, pour lui, qui n'a pas vu ce verdoyant passé, il subsiste encore, autour du Beuvray, bien des coins privilégiés qui n'ont pas encore été dégradés par la hache du bûcheron et la hideuse truelle du maçon moderne. Que nos pèlerins de l'art, cependant, ne se découragent pas. Dans quelques centaines d'années, quand le temps qui, lui aussi, est peintre, aura passé, ces bâtisses seront devenues chenues à leur tour ; elles auront perdu leur crudité vulgaire et, sous une couleur plus douce, le paysage retrouvera sa noblesse passée. Mais qui lui rendra l'arbre ? Quelle main restituera au sol frissonnant sa fourrure forestière ? Après une demi-heure de contemplation, on se remet en route en devisant sur les loups qui ont autrefois ravagé la contrée et qui, eux aussi, ont disparu, comme tant d'autres choses, mais l'extase ne faiblit pas. A chaque tour de roue, la vue change, sans rien perdre de son attrait. Durant l'ascension, l'œil n'est offensé par aucun contresens; rien n'a gâté l'œuvre de la nature : croupes boisées, prairies qui forment autant de clairières, ruisseaux dans le fond, avec un soleil de juin, qui donnait à tout cela l'aspect "d'une Arcadie disposée pour le rêve d'un poète" (...)

Source : Jacques-Gabriel Bulliot, président de la Société Êduenne
in "Mémoires de la Société éduenne des lettres, sciences et arts", p.307 - 1904

 

Bulletin de la Société nivernaise des lettres, sciences et arts - 1905

 

Revue du monde catholique - 1er octobre 1906

 

La Croix - 13 mars 1907

 

Annuaire du commerce et de l'industrie cinématographiques - 1911

 

Le Gaulois - 25 novembre 1912

 


École et famille : bulletin mensuel de l'Union des associations
catholiques des chefs de famille - novembre 1912

 

Le Temps - 1er décembre 1912

 

La Croix - 1er janvier 1913

 

Le Cultivateur aveyronnais - 1er juillet 1923

 

Le Gaulois - 8 février 1927

 

Le Petit Parisien - 10 mai 1927

 

Revue de folklore français et de folklore colonial - janvier 1932

 

L'Ouest-Eclair - 1er février 1934

 

 

t la ivre, dans tout ça ?

(...) Je poursuis ma route vers l’ouest en direction du Mont Beuvray. Un article du Guide Noir de la Bourgogne Mystérieuse, publié en 1976 par les Editions Princesse, m’a donné envie d’en savoir plus sur la Pierre de la Wivre, perdue dans les forêts de Saint-Léger-sous-Beuvray. Elle aurait la réputation de protéger un trésor. Je me mets donc en chasse, sans prendre garde aux rumeurs selon lesquelles le butin serait gardé par un serpent volant du nom de Wivre (ou « vouâvre » d’après les Morvandiaux) et que seule la ruse permet de détourner de sa mission. Mes indices sont maigres et approximatifs (…) Mes yeux louchent alors sur une carte routière pour tenter de situer le rocher aux abords du lieu-dit l’Echenault, sur la D18 entre Glux-en-Glenne et Saint-Léger-sous-Beuvray, en espérant que l’office du tourisme local aura songé à planter un petit panneau depuis la route. Peine perdue ! Point de pierre ni de panneau ! Tel Harry Potter à la recherche du Basilic, je ferais mieux de guetter le vol de la Wivre

C’est au moment où vous êtes sur le point de capituler que la chance vous sourit. De passage à Saint-Léger, je m’arrête à la mairie et me renseigne sur la Wivre. On m’indique alors Bibracte ! Comment n’y avais-je pas songé plus tôt : la pierre doit se trouver sur le site archéologique de cette ancienne capitale gauloise ! Je me rends donc au musée dédié à la civilisation celtique et aux découvertes de Bibracte. C’est effectivement la base la plus sûre pour sillonner, à pied ou en navette gratuite, les chemins de randonnée du Mont Beuvray. Depuis la Porte du Rebout, j’accède au "Teureau de la Wivre" à travers une forêt mystérieuse, hantée par le souvenir des Eduens, de Vercingétorix et même… de Jules César !


le Teureau de la Wivre
http://www.maison-hantee.com/files/morvan/morvan_legendes.htm

Face au rocher, le spectacle est magique : "Sur sa face nord, une sorte de rampe qui conduit au sommet paraît avoir été aménagée pour en faciliter l’accès. Une cuvette creusée à la partie supérieure, souvent à demi remplie par les eaux de pluie, porte le nom de Fontaine des Larmes ". Je peux constater en effet la présence de cette cuvette, d’après les exclamations d’une jeune fillette escaladant le rocher : "Y’a d’l’eau !". De l’eau, mais pas de trésor ! Plusieurs explications sont attribuées à ce rocher : S’agit-il d’un autel sacrificiel ? D’une tribune où officiait Vercingétorix devant ses chefs gaulois ? Des restes de la carrière utilisée pour la construction des remparts ?

Quoi qu’il en soit, l’hypothèse qui m’a mené ici est, encore une fois, ésotérique. Il y a moins d’un siècle, une fois l’an, lors de la procession des Pâques Fleuries, un serpent volant déplaçait la pierre et révélait un trésor. D’autres traditions racontent qu’il suffit de jeter de la mie de pain sur l’argent exposé au soleil. Tout ce qui est touché est à vous ! Ultime technique : s’emparer des richesses et traverser le plus vite possible un filet d’eau courante, aussi mince soit-il. La Wivre serait alors incapable de reprendre son bien. Mais qu’arrive-t-il aux audacieux qui manquent leur coup ?

Je me laisse alors rêver à l’histoire de cette femme qui, au lieu d’aller à la messe, se rendit à la Pierre, avec son enfant. Alors que la roche était déplacée et le trésor exposé, elle s’empara des richesses et échappa de justesse aux assauts de la Wivre. Mais elle ne retrouva pas son enfant ! Le curé lui conseilla de retourner à la Pierre chaque jour pour y verser du lait et du miel dans la "Fontaine des Larmes" pendant une année entière. Et, quand reviendrait le jour d’ouverture de la Pierre, elle devait rapporter le trésor et ne rien conserver. La malheureuse s’exécuta scrupuleusement, bravant tous les temps, jusqu’au jour où elle retrouva son enfant, en parfaite santé. Plusieurs variantes de cette légende existent dans les communes alentour avec des issues bien moins heureuses (...)

Pour poursuivre la visite, ce que nous vous conseillons :
Le Morvan et ses pierres de légende

http://www.maison-hantee.com/files/morvan/morvan_legendes.htm

 

 

Bien des variantes existent, en effet. En voici une fort jolie, signée Sandra Amanie et extraite de Légendes du Morvan (coordonnées ci-dessous) :

la ouivre du euvray

En parcourant les sentiers ombragés du Morvan, vous entendrez sans doute parler des vouivres, ces créatures redoutables, mi-femmes, mi-serpents, qui se plaisent à hanter les bois. Sans aucun scrupule, elles répandent leur venin sur le voyageur imprudent qui tenterait de s'emparer des diamants qu'elles gardent jalousement au creux d'une roche. La plus célèbre de ces vouivres se trouvait au Mont Beuvray, en Saône-et-Loire, non loin de Bibracte, une ancienne capitale gauloise dont on peut aujourd'hui visiter les fouilles et le musée.
Si, en chemin, vous vous arrêtez près de la rivière qui passe non loin de là, ne faites plus aucun bruit, fermez les yeux et souvenez-vous de l'histoire de cet homme qui, au péril de son âme, a osé défier le monstrueux serpent !

Ce matin-là, lorsque Martin s'éveilla, un beau soleil éclairait les murs de la modeste chaumière où il demeurait en compagnie de sa femme et de ses deux enfants. C'était le jour de Pâques. Un peu plus tard, après la messe, une procession partirait de l'église de Glux-en-Glenne, un village situé au pied du Mont Beuvray. Pour l'occasion, Jeanne, son épouse, avait revêtu sa belle robe noire. Elle l'avait portée la première fois le jour de son mariage et elle en prenait grand soin car, ses parents étant âgés et de faible santé, elle se disait que, sans doute, elle aurait, hélas, bientôt l'occasion de la porter de nouveau. En effet, dans les familles pauvres du Morvan, on se mariait en noir car la tenue que l'on revêtait ce jour-là devrait être ensuite portée lors de toutes les grandes occasions, dont les enterrements.
Les deux enfants se lavaient dans un baquet posé dans la cour où ils s'éclaboussaient en poussant de grands éclats de rire.
- Allez, les garçons, leur cria Jeanne, il est temps de s'habiller et de partir à la messe.
Ils obéirent et abrégèrent leurs ablutions à contrecœur.
Il ne faisait pas encore très chaud mais les petits n'étaient pas frileux et adoraient se laver le dimanche au soleil. Jeanne les essuya rapidement, leur mit des habits propres puis se prépara à partir.
- Tu ne viens pas avec nous ? demanda-t-elle à Martin.
- Non, c'est impossible, je dois aller couper du bois pendant qu'il fait beau. Il y aura encore des jours très froids dans la saison et, s'il pleuvait demain, je ne pourrais plus le faire. Le bon Dieu me comprendra puisque je fais cela pour notre bien à tous les quatre.
Jeanne soupira :
- Encore une bonne excuse pour ne pas aller prier ! Dimanche dernier, aux Rameaux, c'était la vache qui était malade, et le dimanche d'avant, tu m'as encore sorti un de tes plus beaux mensonges ! Tu es incorrigible, Martin. Je ne voudrais pas être ton âme !
- Ne t'inquiète pas pour moi, ma femme, répondit-il en riant. Mon âme se porte bien. Dis au curé que je viendrai me confesser demain vers onze heures chez Germaine. J'espère qu'il y sera ! À mon avis, oui, car il manque très rarement ce rendez-vous quotidien, même quand il doit aller administrer une extrême-onction !
Jeanne, outrée, se contenta de hausser les épaules en signe d'impuissance. Son Martin ne changerait jamais et préférerait toujours le bistrot de Glux-en-Glenne ainsi que Germaine, sa vieille patronne, à son église. Qu'y pouvait-elle ? Elle n'avait pas grand-chose d'autre à lui reprocher. Il était gentil, pas fainéant, bon père… Et puis, après tout, le curé n'avait qu'à montrer l'exemple ! Pour prêcher la bonne parole, il n'était pas obligé de se rendre tous les jours à l'auberge pour trinquer avec ses ouailles !
- Enfin, c'est bête à dire, mais les hommes sont ainsi faits, soupira-t-telle.
Lasse de se battre pour sauver l'âme de son homme, elle coiffa son chapeau, prit ses deux garçons par la main et se dirigea à pied vers l'église du village.

Lorsqu'il fut certain d'être seul, Martin décrocha sa cognée, fourra un morceau de pain et une bouteille de vin dans un grand sac, puis se dirigea vers la forêt du Mont Beuvray. Il chemina une bonne heure avant d'arriver près du rocher que l'on nommait " Roche de la Vouivre " car il était soi-disant gardé par un mystérieux serpent qui se transformait en superbe femme quand il se trouvait à l'abri des regards. Cependant, Martin se fichait bien de la beauté qui se cachait derrière le serpent. Lui, ce qui l'intéressait, c'était les diamants que renfermait la roche. Il se cacha donc derrière un gros chêne, posa la cognée qui ne lui servirait à rien aujourd'hui, et attendit. Un peu plus loin coulait une petite rivière : c'était là qu'au dire des commères du village, la vouivre allait boire quand elle quittait sa tanière, tandis qu'au village se déroulait la procession de Pâques Fleurie. À ce moment-là, la légende prétendait que si l'on se montrait vigilant, on pouvait s'emparer du trésor enfermé dans le rocher.

Martin entendit au loin sonner les cloches de l'église, signe que la messe s'achevait et que la procession allait commencer. Soudain, il surprit un léger bruit. Son sang se glaça et une sourde terreur s'empara de lui. La roche bougea. Quand elle fut totalement ouverte, il vit surgir de la grotte un immense serpent. Celui-ci mesurait au moins cinq mètres. Son corps était surmonté d'une tête énorme et sur son front brillait un gros diamant vert !
- La vouivre ! songea Martin, terrorisé par le spectacle qui se déroulait sous ses yeux.
Mais le bûcheron n'était pas encore au bout de ses surprises ! La vouivre s'approcha de la rivière et, lorsque sa queue effleura l'eau, le serpent se transforma en une magnifique jeune femme aux longs cheveux noirs. Elle se retourna en direction de l'homme, toujours caché derrière l'arbre. Celui-ci, émerveillé par la splendeur de son corps entièrement nu, fut pétrifié par l'éclat diabolique de ses yeux verts. Sans l'avoir remarqué, elle déposa son diamant sur le sol, puis elle entra dans la rivière pour se baigner.

Martin sortit alors de derrière son arbre et, après avoir constaté que la vouivre ne prêtait pas attention à lui, il s'approcha de la roche, dont l'ouverture était restée béante. Un monceau d'or et de pierreries s'étalait sous son regard ébahi. Le soleil qui resplendissait au-dessus du trésor rendait son éclat encore plus chatoyant. Comme il l'avait maintes et maintes fois entendu raconter par sa grand-mère, Martin prit le pain qu'il avait apporté, enleva la mie, puis l'émietta sur le trésor. Comme le stipulait la légende, tout ce qui se trouvait sous la mie devrait lui appartenir.
Il s'empressa donc de ramasser tout le bien qui lui revenait et le jeta dans le sac.
C'est à ce moment que la vouivre le repéra.
Furieuse, elle comprit qu'elle avait été fort imprudente de laisser quelqu'un voler son trésor. Elle songea à la colère de Satan, dont elle était la créature, et se demanda ce qu'il dirait lorsqu'il l'apprendrait. Elle décida donc de tout mettre en œuvre pour venir à bout du voleur. Elle s'approcha de lui, lui fit son plus joli sourire et tenta de le rassurer :
- N'aie pas peur, jeune homme, tu as respecté le pacte en répandant de la mie de pain sur mon trésor, et je ne peux rien faire pour t'empêcher de l'emporter. Je suis loyale et ne te ferai donc aucun mal. Mais la légende dit aussi que je dois embrasser mon vainqueur, une fois ma défaite consommée. Accepteras-tu d'accomplir cet acte ultime qui scellera ta victoire ?
- Moi ? répondit Martin, outré. Embrasser un serpent ? Il faudrait que je sois devenu bien sot !
Malheureusement, un sentiment sournois avait germé dans le cœur de Martin au moment où la vouivre avait planté ses yeux magnifiques dans les siens. Il tenta pourtant d'y résister :
- Aussi belle sois-tu, s'écria-t-il, tu n'es qu'une invention du Malin ! Hors de ma vue, maudite ! Je dois rentrer chez moi et retrouver ma famille.
Mais la vouivre, nullement impressionnée, s'approcha encore plus près de Martin et l'enlaça. Le bûcheron sentit sa résistance faiblir. Ce n'était pas tous les jours qu'une femme superbe lui faisait de telles avances. Éperdu de désir, il reposa à terre le sac qui contenait le trésor, puis laissa glisser ses mains sur les hanches de la créature diabolique.

Comme elle approchait ses lèvres des siennes, un petit cri retentit au loin :
- Papa ! Papa ! Où tu es ?
À ce moment, l'enchantement cessa. Martin repoussa la vouivre, qui, surprise, hurla de dépit.
Il vit les traits de sa bouche se tordre et un vilain rictus s'emparer de ses lèvres tandis que, peu à peu, son corps reprenait l'apparence d'un serpent.

Sans demander son reste, Martin ramassa le sac, fit demi-tour et se précipita dans le sentier, en direction de sa chaumière. Quelques centaines de mètres plus loin, il rencontra son fils aîné. Le garçon remarqua son visage pâle et ses traits tirés :
- Qu'est-ce qui t'arrive papa ? Aurais-tu vu le diable ? plaisanta-t-il.
- Peut-être, mon gars, peut-être...

Peu de temps après, Jeanne arriva, tenant son cadet par la main. Elle semblait très en colère :
- Ah ! Te voilà enfin ! grogna-t-elle. Midi est passé depuis longtemps déjà et on s'inquiétait tous ! Alors, ce bois ? Tu as terminé de le couper ?
- J'ai bien mieux que du bois, lui répondit Martin en souriant. Ouvre donc le sac, ma chérie.

Jeanne obéit. Elle éclata de rire quand elle découvrit le contenu du sac.
- Ah ! Bien vrai ! ricana-t-elle. C'est sûr qu'avec toutes ces caillasses, je vais pouvoir me chauffer tout l'hiver ! Pauvre Martin ! Tu dérailles complètement. Ne cherche pas plus loin. C'est Dieu qui punit ton impiété !

Martin, intrigué, regarda à son tour. Hélas, il constata lui aussi qu'au fond du sac ne se trouvaient que des cailloux à la place des pierreries ramassées dans la roche de la vouivre. Alors, le pauvre homme se souvint d'un point crucial de la légende qui lui avait, hélas, échappé, tant son impatience de rapporter les richesses à sa famille était grande. Après avoir échappé au serpent, il aurait dû traverser la rivière en prenant les diamants avec lui. Ainsi, il aurait pu conserver ce trésor qui lui revenait de fait. À présent, désespéré, il comprit qu'il venait de tout perdre !
Confus, il retourna près de la roche, récupéra sa cognée et regarda autour de lui. Il n'y avait nulle trace de la vouivre. Le rocher s'était refermé et aucun serpent ne rôdait près de la rivière.
Cependant, une douleur atroce rongeait à présent le cœur de Martin, une douleur que seul pourrait apaiser l'éclat de deux yeux verts et celui de deux lèvres rouges sur les siennes. Le diable, en lui laissant la vie sauve, avait infligé à son âme le plus épouvantable des supplices qui durerait, hélas, jusqu'à ce que les feux de l'enfer l'apaisent enfin. Martin était tombé amoureux du Mal et Jeanne, l'épouse si pieuse, ne devinerait jamais qu'un beau matin de Pâques, un diamant vert posé sur un front diabolique avait ravi la pureté de son gentil mari.

 

pour découvrir le livre de Sandra Amanie

Lire aussi "La légende de la Vouivre" à Saint-Léger-Vauban (Yonne)

 

 

 

 

https://www.stleger.info